la philosophie comme pensée intégrale
Ce que l’on nomme pensée est donc la capacité de la réflexion en tant qu’elle débute de rien, du vide, de la forme. On passe outre les définitions de la réalités engoncées dans un monde particulier, un monde immédiat, une synthèse immédiate qui admet tel ou tel monde localisé en un groupe de tel système d'échanges et de paroles, pour s’affronter à l’objet même que se propose la réflexivité : l’être.
L’être est une possibilité purement formelle dont il s’agit de trouver les conditions de définissabilité ; la pensée est donc la mise en conditions de l’énonciation qui permettra de comprendre tout ce qui est, soit donc l’être, en une fois, qui sera exprimée et qui augmentera totalement notre être propre ; aussi les grecs pensent d’abord tout ce qui est, en une fois, et c’est l’accès à cette pensée sous conditions qui nous confère notre être véritable (au-delà de l’individualité).
Mais ces conditions ne sont pas de l’établissement d’un discours objectif qui serait là, au-devant, nous laissant inchangés. Il faut se convertir à ce décentrement ; la pensée est l’être et cette augmentation de notre être ne peut pas entrer dans une pauvre individualité, et qui plus est, elle réclame, cette augmentation, un changement complet de « ce que nous sommes » : de se vivre, percevoir, désirer, parler, énoncer selon la totalité et en et par l’ensemble de ce qui est (universellement) au-delà du groupe particulier, du langage, de l’immédiateté, du corps, etc.
Evidemment cela n’est pas tenable comme tel ; aucune individualité ne peut exister, vivre dans l’universalité du tout ; il faudra la survenue de la pensée individuée (Descartes et toutes ces suites innombrables) pour que la pensée, c'est-à-dire la réflexivité, descende jusqu’à la réalité même, vécue, éprouvée, ressentie, dans et par ce corps, etc. Mais alors de ce changement dans le changement, de cette réflexivité dans la réflexivité (ce qui est constant ; toute pensée est articulée réflexivement ; mais franchit ici et là des étapes de son devenir possible, outre l’advenue de l’être et de la pensée, il y aura la conscience et le libre pur, comme réflexivité injectée dans le monde, corps, moi, langage subverti, groupe affronté, etc), de cette réflexivité dans la réflexivité (dès qu’elle nait, la réflexivité ne cesse pas de se renouveler, c’est sa nature, elle ne tient pas à une vérité, mais est le principe général de vérité qui génère quantités de vérités secondes) ; de cette réflexivité dans la réflexivité il sera évidemment d’une bien toute différente possibilité, bien plus ardue et exigeante en ceci qu’elle va puiser dans l’individualité même, dans le « qui l’on est », et non plus seulement dans le « ce qui est.
Cependant cela n’est pas fondamentalement différent de la réflexivité grecque, de l’universel et de la vérité (qui se connaitra comme principe, même si les grecs demeurent attachés à saisir la vérité même). C’est la même articulation ou super articulation, qui s’épanchera dans et par et sur le sujet. Et pareillement il n’est aucun abandon de la pensée métaphysique ; qui a toujours été non pas seulement la compréhension de ce qui est en un objet théorique extérieur, (objectif), mais la compréhension y compris de notre position ou possibilité en « ce qui est ». Autrement dit ; qu’est-ce que l‘être qui comprend cette possibilité de la pensée ou du sujet ?
Et cette compréhension (intégrale) ne se situe pas elle-même comme inobjectivité ; elle n’est pas la compréhension absconse ou éthérée de cet être et de notre être, mais elle rend compte avec objectivité (son objectivité intégrale) d’un être qui est en lui-même abscons, étrange et autre.