Remontée par le dedans du sujet
Non le sujet substantiel ou monolithique dont on ne saurait où placer l’unité qui devrait être un « quelque chose déterminé », quelque chose de concentré, d’identifié.
Mais le sujet de structure, forme et trame, pointillé qui dessine le regard vers le réel, mouvement qui tisse son activité, son activisme. Celui dont l’unité est la forme, ce qui veut dire le rapport, el mouvement et qui se colle dans le présent, en articulation. On verra pourquoi ou plus modestement comment le réel est ainsi.
De sorte qu’il n’y aura pas de prêchi-prêcha dans l’occidentalisation ; c’est une technologie, mentale pour ainsi dire, qui creuse non dans l’essence des choses (c’est une conséquence seconde, pas secondaire du tout mais seconde, un effet), mais une technologie qui creuse dans l’apparaitre même (et a abandonné la représentation, partagée dans tel groupe, de l’apparaitre du monde ; il n’y a plus de monde selon tel groupe mais le monde donné « là », unique et universel, de même plus un corps marqué selon telle relationnel humain, mais le corps-de-chacun).
Le sujet est et n’est que la distance ; c’est en cette distance que l’on travaille ; les grecs pensent le monde, la vérité parce qu’ils sont par-dessus la vérité (sinon ils s’identifieraient à telle ou telle vérité et ne produiraient pas des vérités, des systèmes, des éthiques, des politiques). C’est bien de se situer en dehors de l’être que l’on nomme, désigne l’être ; mais alors de où perçoit-on ?
C’est ce lieu, externe, qui est exploré : il n’est pas dans le monde et c’est à partir de lui qu’il y a « un monde », un corps, un vécu, un donné, une œuvre, une réalisation humaine ; comme il n’est pas, ce lieu, cette structure, un autre monde, une autre détermination, il est inutile de la rechercher ; les idées de Platon ne sont pas un double monde, intelligible, mais chaque idée montre, dans l’effectif, les réalités (et sans ces idées on ne les perçoit tout simplement pas ; c’est en ce sens que pour Platon l’idée est le vrai et le réel, parce qu’elle fait-voir les choses, qui sinon sont seulement perçues dans l’immédiat, non identifiées, ou perçues et enregistrées dans le langage, commun, habituel ou imaginaire). Dieu a créé le monde, mais il insiste pour que nous changions le monde donné, et de sorte qu’il soit exigeant et interventionniste dans l’humanisation. Le christique crée la possibilité que chacun soit pour-lui-même en vue, de la naissance à la mort et donc en-plus. Etc.
Dans l’historicité cela revient à dire qu’ayant d’abord inventé la mise en forme culturelle du monde tel que localisé en et par un groupe dans un langage, une représentation qui cadre la perception et une mythologisation de ce groupe par lui-même (expliquant notamment pourquoi il existe une telle humanisation, une telle culture et qui croit en sa Vérité) – on est passé ensuite à l’acculturation, autour de la méditerranée, bien au-delà de tous les groupes et tous les langages, et qu’il y eut alors deux faits majeurs (tous ayant abandonné leur groupe, et leur monde, respectifs), deux faits majeurs ; que nous ayons un Corps dans le même-Monde.
Le christique (entre autres) reprendra ainsi toute la pensée grecque dans la forme du proto-sujet, pour ainsi dire, qu’imprimera Descartes définitivement, comme forme unilatérale de notre réalité humaine. Tout personne ayant un corps dans un monde, si elle n’est pas concernée spécialement par le christique, le sera par la révolution ; qui fonde la réalité humaine sur la raison de chacun … mais cela veut dire « sur la liberté de chacun », sur la raison non comme corpus défini mais sur la raison « en exercice », soit donc le jugement et la décision, le projet et les possibilités, etc. L’historicité pense plus loin que la version rationaliste universaliste ; qui « croit » que le discours est la mesure de la réalité et du réel, alors que la philosophie qui n’est pas la raison mais la pensée, réfère au sujet ; la philosophie pense et donc elle pense le sujet ; la pensée, grecque, comme sujet, l’esprit hégélien comme sujet, la volonté de Nietzsche comme sujet, l’inconscient comme sujet lacanien, etc.
La version mondaine du rationalisme ou la transformation de cette théorie et idéologie (au grand sens) revient soit à chacun ses besoins, soit à chacun ses désirs ; dans les deux cas le donné explique le donné ; et à tout désir correspond un objet et « on peut être heureux », supprimant de fait qu’il y ait une réflexion, une réflexivité, une articulation qui excède la réalité … que donc la réalité est déjà en elle-même non pas plate et serait-elle plate et compliquée, mais que la réalité est renvoyée, scindée, divisée, ontologiquement autre qu’elle-même et spécifiquement notre être n’est pas un « être » (déterminé) mais une structure, ontologiquement Autre et c’est pour cela qu’il existe, pour nous, un monde, un vécu, un corps ; la rupture est donc absolument, pas à moitié ou ni même engendrant une réconciliation dans quelque « chose » ou objet de désir ou bonheur ou universalité, mais la rupture est structurelle et c’est elle, cette altérité, qui devient et c’est précisément cela qui est pensé (au sens réel et non idéologique).
Et donc la transformation du rationalisme naturaliste et réaliste c’est l’économisme, l’idéologie du corps. Puisque si l’on refuse, nie, annule qu’il y ait un décrochage originel (par lequel tout le reste, qui est humain, existe, et qui est, de plus, le décrochage même qui devient et se structure lui-même), un décrochage originel structurel (ce qui se nommait autrefois spirituel ou idéaliste ou transcendantal, etc) alors pour chacun et pour tous la masse, la densité, la détermination même est la vérité et non pas la structure et la densité c’est le corps. Le corps est l’ancre, la pesanteur, la lourdeur qui commandite de près ou de loin ce qui autrement, par la structure, était, peut-être, en mesure de s’élever, d’être plus grand (comme de concevoir les ouvriers en tant que Prolétariat, par ex ; de sorte à devenir, cette notion, un horizon plus grand ; mais aussi élever le corps comme musique rock et pop crée un immense horizon ; ou les extensions informatiques, numériques de notre perception ; ou les revendications des femmes ou des lgbt ; etc). D’être plus grand : de percevoir plus loin ou … de plus loin.
Sans ce décrochage ce qui opère le tri dans les intentionnalisations revient au corps, à la satisfaction ; une satisfaction évidemment complexe et rendue diffractée par les multiples possibilités qu’ouvrent l’arc de conscience, mais arc qui cherche sa cohérence et qui ne la trouvant pas ou peu retombe ou s’écrase dans le corps ; le corps, la satisfaction, programme les intentionnalisations qui partent en tous sens (programme au sens de : puisque la détermination, dans le moi et l’humanisation, ne trouve pas dans l’arc de conscience de quoi consister, alors elle se rabat sur la gestion effectivement réaliste du corps, qui permet de sélectionner, mais de sélectionner à sa mesure, cad en canalisant mais réduisant le champ).
Mais n’oublions pas que l’on se situe, quoi que l’on fasse ou dise ou pense, dans le dialectique ; le dialectique, hégélien, n’est pas le jeu de la pensée, du penser comme substance, mais est le champ lui-même ; tout objet, d’intentionnalité, se pose sur un horizon, et donc bien que ce soit l’objet qui se présente, il est en fait représentation, représentation, délégation de l’horizon lui-même sur lequel il est incrusté. Donc le moi, qui Croit en ses contenus, ce sont en fait Ces contenus, des trucs laissés « là », et qu’il perçoit d’un autre point de vue ; de là qu’il soit toujours pris dans le regard des autres, sous-entendu qui devrait signifier l’Autre regard (celui de dieu, de la pensée, du christique, du sujet ou de l’altérité). Ce jeu dialectique, qui suppose non pas une résolution (dans la pensée hégélienne, qui se trompe elle-même, parce que l’esprit en fin de compte n’est rien, sinon le Un vide qui déroule tous ses contenus, alors qu’il faut penser le Un comme vide certes mais formel… ayant, étant, existant, ex-sistant comme formel et donc relevant lui-même d’un discours qui repère cette dimension, mais Hegel ne pouvait pas le savoir), ce jeu dialectique renvoie à plus grand que ce pour quoi il se donne, se prête.
Or pourtant bien que renvoyant à plus grand que soi, cette altérité de supériorité doit être voulue, décidée, intentionnalisée. Sinon elle redescend. Elle re-tombe dans le donné, et le corps devient effectivement la seule mesure de tout ; ce qui réduit drastiquement l’ampleur des intentionnalisations.
Lorsque Hegel supposait l’esprit (au terme des contenus, de toutes les intentionnalisations de la phénoménologie de conscience ou de la phénoménologie du savoir) il s’abandonnait à l’optimisme ; il croyait que l’esprit existait. Il avait raison en ceci que depuis que l’arc de conscience est surgi, hors de tous les mondes, sur le monde unique et universel, dans et par le corps individuel, il FAUT que l’on réarticule à chaque fois intégralement toute l’historicité (tandis que chacun des mondes particuliers demeurait cycliquement attaché à sa propre re-dite exacte et précise, la Parole étant le trésor lui-même qui devait à chaque fois réintégrer non seulement chacun dans le Même Monde, mais réintégrer les perceptions dans la même cohérence parlée et échangée).
Puisque l’on est passé dans l’articulation, qui doit se réaliser, se rendre réelle volontairement, par décision, par conversion et affirmation (dira Nietzsche, Nietzsche est l’affirmative absolue de l’altérité de par elle-même ; la volonté se veut, la volonté qui ne vient de rien qui est à elle-même sa propre mesure est la forme assumée de l’arc de conscience, puisque la « Volonté » si l’on est sincère, on ne sait pas du tout ce qu’il faut y entendre, sinon précisément la même structure cartésienne du « je suis, je veux », la volonté comme sceau de dieu en et par le je, la structure de sujet formelle).
Sans doute aucun on voulût humaniser et ramener au connu l’arc de structure tel qu’il fut extrait de tout monde humain clos et cyclique ; il s’agissait de produire l’humanisation d’une part et la personnalisation d’autre part (le monde selon la pensée grecque et le sujet selon le christique individué par le regard unique du un-seul du christ). Mais Nietzsche et Heidegger prennent tout à coup fait et cause pour l’altérité pure et brute ; l’arc de conscience, sa position dans et par le réel (soit donc la Volonté et l’Etre de l’un et puis de l’autre) ne sont pas humains. L’altérité est absolument formelle (seule le formel peut se désigner comme absolu, autrement dit le formel est l’absolu ; l’arc de conscience et le présent sont l’absolu lui-même en pur et brut mouvement, l’absolu est et n’est que mouvement exclusif).
Ce qui fut découvert autour de la méditerranée (après que mille mondes humains différents aient créé la mise en forme culturelle, les représentations et les langages, etc) ce qui fut découvert n’est pas de l’ordre du donné (dieu, la pensée, le christique sont hors du champ, et c’est pour cela qu’ils permirent l’augmenter, les grecs, et d’accélérer, le christique, toute la perception de tout) ; c’est bien parce que ça n’est pas dans le monde mais que ça ex-siste hors du monde que ça n’est pas du tout naturel ni donné là ; et si cela fut découvert, et étant forme de la réalité, comme arc de conscience et présent, en plus d’être découvert cela doit être créé ; on ne découvre pas un donné là, notre être est dynamique (cad n’est pas un être mais une structure, même la perception est re-construite ou construite tout court, en plus et ajoutant au monde, au corps, au donné, au vécu).
Ce qui est découvert fut élaboré, et si cette élaboration est oubliée alors les intentionnalités se courbent vers le monde, l’immédiat. L’élaboration fut voulue et décidée ; parce qu’elle ne tient pas à telle ou telle partie du monde, mais doit sortir du Bord du monde ; on perçoit le monde et on le parle et l’arc réflexif est dans le groupe qui parle le monde, mais ici on perçoit le monde et on doit le penser ; la pensée fait appel à la considération individuelle qui perçoit le monde hors et par-dessus le groupe et perçoit et conçoit la pensée, les notions, les idées en elles-mêmes, selon leur propre cohérence ; inversement le corps, le donné, le monde, le vécu courbent massivement la réflexivité, l’arc de structure vers l’immédiat et il faut l’extraction soudainement requise du christique pour que tout le sujet soit en une seule fois exonéré de toute la réalité, et donc sous la formulation de son vécu et de son corps, de par le fait de tout ce qui nous atteint au cours d’une vie ; cet arrachement est la libération, et qu’il passe outre quelque échange que ce soit.
Une seule fois puisqu’il n’est pas question d’une composition (fut-elle universelle : ce que présupposait la pensée, grecque, et bien qu’il faille se convertir à l’être, à l’idée, au un) mais d’une unilatérale conversion im-possible (ayant à se soutenir de celui-qui-n’est-pas-mort, qui est hors de sa vie, hors de tout contenu, hors de toute intentionnalisation (idée et même volonté qui serait encore liée au monde, ou à quelque partie du monde ou du vécu ou du corps ; le christique décide à partir du Bord le plus éloigné possible).
Que par le christique nous ne soyons pas ici dans ce monde (mais au moins, au minimum sur le Bord, du monde et du corps, du vécu et du donné) implique que rien dans le monde n’est à la mesure de la structure de présent pur et brut. Déjà la pensée implique la conversion du regard, mais le christique veut dire l’intégrale de l’équation du réel : ce qui fut fait.
Dire que la vie n’a pas de sens est absurde. Elle est le sens. Elle n’indique rien, mais c’est parce que le réel est plié et que l’on existe en ce pli ; il n’est rien qui soit tel que « là », bêtement ; tout est dans et par la torsion, le réel est en acte, et ce qui devient est la torsion elle-même ; non pas qu’elle prédispose à ceci ou cela : elle ex-siste et est cela qui devient (tout le reste est effet, à nous de régler cet effet spécifique qu’est l’arc, l’acte de conscience qui se reflète par le plus-grand-présent qui s’y manifeste ; le réel étant plus grand que lui-même et l’infini ayant pour finalité de créer des infinis et pour nous du sur-divin).
A quoi se destine ce réel en acte ? Cette forme qu’elle existe ici même, en tout ici et maintenant, est le sens ; cela même qui doit être exploré. Se priver des infinies articulations qui furent mises en place et déroulées depuis 30 siècles (depuis les juifs, les grecs et le christique) est parfaitement vain. Il n’est pas un déroulé notionnel ou déterminé de la r »alité, mais une réduplication, une pluralité de torsions de la Même Structure. Toute conscience étant parfaitement (parfaitement) égale à toute autre (comme vide et vide parce que formelle, et non pas vide pour « rien », de sorte que la forme contient toute la possibilité de structure), et toute conscience est parfaitement instanciée dans le même et unique Présent, et donc toute conscience doit se décider ici même et ici et maintenant (selon donc le monde, el donné, le corps, le vécu) selon cette a-temporalité (dont on ne sait absolument pas du tout ce qu’elle comporte, implique, transmet, trace, réalise, trame, tisse).
Qu’on le veuille ou non nous sommes assujettis. Et l’on se doit. Selon l’arc du réel.