Effacement et récupération du monde et du sujet
Humanisation puis individualisation
Tout généralement chacun des moi-mêmes, chacune des personnalités que nous sommes, de ces synthèses que chacun prend en charge en devenant lui-même, ces mois donc sont perdus dans leur propre unité supposée qui est uniquement imaginaire et qui ne tient que parce qu'elle continue de désirer.
Non pas « parce qu'elle désire » mais parce qu'elle admet le régime si spécial du désirable continuel et renouvelé, dont tout l'ensemble des représentations entretient la fonctionnalité et, sans laquelle force de désir, ces mois tombent en dépression. Et la structure de désir s'organise suffisamment difficilement pour se tarauder et tarabiscoter comme ci ou comme ça, selon des variations inventives mais aussi dangereuses ou éperdues ou folles ou paradoxalement déstructurantes ; ce qui devait faire office de moteur de toute personnalisation, se révèle, douloureusement, une incertitude extrêmement mordante et d'une impeccable cruauté inouïe.
Donc il est excessivement difficile de maintenir l'état de déséquilibre, et non d'équilibre, qui constitutivement élabore un « moi-même ».
En vérité rien que d'évaluer la quantité d'énergie, cad d’investissement, d'investissement psychique et physique, celle-là même du vivant effectivement réel, on ne s'étonnera que peu qu'il, le moi, ne perde pas son temps à se « remémorer » son Grand passé, sa longue historicité et ne s'attache qu'à organiser tout ce qu'il peut autant qu'il lui est possible … or pourtant c'est bien de récupérer, à son bénéfice, toute la longue procession de ses possibilités qui coure depuis deux mille ans, voire plus, qu'il se sauverait ou permettrait d »tendre indéfiniment ou même infiniment son registre, sa capacité attentionnelle, son intentionnalité, la considération de tout ce dont il est est capable, parce qu’autrefois il le fut.
C'est qu’une telle activité lui paraîtrait telle un remémoration, alors qu'en fait il s'agirait d'une réactivation, d'un activisme qui chercherait à intégrer encore plus loin tous les acquis de structure tout au long de l'historicité.
On a hérité, pour l'énoncer clairement, d'une structure d'ordre et bien au chaud en celle-ci on tente, vaille que vaille, d''en « profiter » un maximum, quitte à en égarer toutes les bases, tous les prolégomènes, toutes les antériorités. Uniquement acharnés à rendre réel la personnalisation et l’humanisation, et ceci même au point d'annuler la prédite humanisation et de ne s'obnubiler que du moi-même, inconsidérant toute autre formulation, négligeant toute la potentialité.
Bref nous nous sommes coupés du possible et nous voici cloués à telle ou telle destinée, qui, si régulièrement, nous paraissent subies et non pas voulues et décidées.
Aussi folies, diverses, et dépressions, plus ou moins conséquentes, et perversions et difficultés bizarres qui nous atteignent, doivent être considérées comme les effets seconds mais qui surgissent alors au premier plan, à l'avant scène et emplissent tout le champ, puisque le dit champ est structuré en et par un « désir » (ou des désirs, parce sitôt que l'on s'engage sur un tel principe de devenir, de venir soi, surgissent quantité de désirs concrets). Désir structuré ou déstructuré et à fondement imaginaire (autrement dit on imagine être heureux, ce qui pour le corps veut dire satisfait voire comblé, physiquement et quel que soit par ailleurs les enjeux de satisfaction, élevés ou très concrets, et que sitôt cet imaginaire flanche on saisit intuitivement, affectivement, émotionnellement que l'on est un corps coupé par le langage, découpé par l'intentionnalisation.
Ce qu'il faut comprendre c'est que l'imagination en tient pas toute seule mais est prise dans une systématique, une structure plus grande et tout à fait différente ; structure qui était articulée autrefois (par dieu, l'être, l'universel (ou l’État romain par ex, le droit), le christique et ensuite la chrétienté, puis par le sujet et la révolution, ce qui veut dire l'intentionnel individuel et universel, les deux, étant entendu que toute intentionnalisation est universelle au sens de mettre en signes et donc par ex transmissible, non seulement aux autres mais à-soi-même et atteignant par là une organisation, au lieu de se perdre dans l'immédiat, le moment ou le donné perçu).
Rappelons comment fonctionne l'intentionnalité ; un animal, un vivant, un corps perçoit son milieu, immédiatement donné là, mais nous, de notre arc de conscience, nous percevons l'horizon (et non le milieu) ; ce qui veut dire non pas que nous percevons l’horizon mais que nous nous percevons )à partir de l’horizon. Un animal ne se situe pas lui-même (ou ne sait pas qu'il va mourir), nous si. Donc nous sommes « Autre ».
ce mouvement de pure et brute, brutale altérité casse le corps du vivant, qui n'est plus « lui-même » et le moi pourtant pour assurer la continuité, va faire semblant de poursuivre la même spontanéité, la même immédiateté. Ce qui lui sera impossible mais il peut se figurer de manière plus ou moins organisée et complexe et élevée et intégrée que oui. Il rétablit une continuité à un niveau plus grand (par ex il sait qu'il est difficile de se comporter moralement, mais aussi que cette moralité, si elle n'accorde pas un bénéfice immédiat, si elle est coordonnée avec tous les autres, peut à terme moyen ou final énormément apporté au collectif et à chacun ; ce qui demande non seulement d'être pensé mais d’être admis dans le corps même, intégré, incorporé).
Or il se peut que l'on oublie toutes ces complexités et que l'on soit absorbé par le travail, déjà difficile, du moi-même qui n'admet que son seul champ et ses immédiatetés (qu'un monde industriel ordonne et contrôle ; tout l’ensemble de moyens sont utilisés afin de retirer aux mois leurs capacités internes et qu'ils soient dépendants de la mise en œuvre collectivisée des moyens de productions, comme en régime communiste en un sens, l'un selon les désirs individués, l'autre selon les besoins génériques).
Il ne faut évidemment pas se laisser prendre au piège du seul désir ; c'est une construction (et on vient de le dire de plus en plus collectivisée, même selon le libéralisme, qui distribue les factions de pouvoir au lieu que le communisme les centralisait). Mais la question est : qui construit ? Qu'est-ce qui construit cet édifice d’articulation qui n'est pas du tout évident en soi, qui est scindé, découpé, qui joue du langage et qui use du corps ?
Il est dit, ici, qu'il existe une structure réelle et activiste qui rend possible que si effectivement il est telle société humaine, tels échanges, tels corps vivants, tel langage, etc, tous ces moyens sont décuplés et attirés bien au-delà du simple donné et articulation est en elle-même tellement complexe qu'elle requiert une unité, une possibilité ; que notre humanisation puis notre personnalisation ne sont pas seulement des empilements. L'idée même qu'une telle auto-organisation soit seulement une composition est contradictoire ; sa souplesse ne s’atteindrait absolument pas si pour déplacer le moindre petit doigt il fallait constamment remodeler tout un ensemble, tout un pan de mémorisations. Il existe au contraire un pivot qui permet des modifications immédiates, voire instantanées pour chacun, individuellement. Que ces inventions, quotidiennes, soient ou non mémorisées collectivement est un autre problème ; et même on devrait avancer que les mémorisations qui seraient exclusivement collective très rapidement, voire structurellement, se perdent dans une construction hors sol, hors réalité.
Il est impératif que tous ces systèmes s'initient d'abord comme arc intentionnel, suffisamment souple et, donc, étant des rapports, toujours actif. Avoir conscience de, c'est un rapport ; le rapport qui intègre et désintègre des signes, des relations, etc.
Après tout dans tous les mondes humains particuliers (clos chacun sur soi) c'est ce qui est arrivé ; il fallut créer la structure vide formelle (dieu, l’universel et l'être, le christique et le sujet, la révolution et le réel tel quel) pour le collectif comme typologie, s'ouvre au donné tel que « là » (l'être des grecs ou l'intentionnel individuel christique).
Échanges, langage, représentation, groupe humain sont inventés par les mondes humains, mais leur potentialité se révèle ensuite dans l’articulation qui concentre l'attention, l’intentionnalité sous la forme des idées et des individualités ; qui ont accès, ces deux principes de structures, au donné tel que là, à organisation non pas mémorisée par un groupe mais intégré par des individualités ; qui se créent ainsi leur propre mémorisation réelle et forcément active, puisque ça ne tient que par l’intentionnalité, le rapport au réel, ce qui veut dire aux réalités diverses et multiples ou vécues et éprouvées deux caractéristiques grecque et christique, qui continuellement réclame une attention, un activisme de l’élaboration de champs de perception, intellectuels ou d'affects spécifiques et dénommés, désignés et créés par la pensée et le christique, expressément).
Ce surcroît, ce surcroît de complexité ne se décrète pas d'en haut mais doit être assumé par et pour chacun (soit comme pensée universelle, soit comme instance du vécu qui transforme la vie de chacun en Existence, placée sous le regard du un tout-seul, qui meurt seul et méprisé et abandonné et souffrant, qui assume et résume la Possibilité du sujet, étant bien compris que l'on se place là dans la structure et qu'elle produira quantité de sujets, de structures réelles et actives, étant non épuisable en elle-même, elle n'est pas de ce monde, de ce vécue t donc créera des réalisations humaines et individuées).
Et cependant les mois sont perdus ; ils ont oublié, annulé, effacé leurs anciennes compétences, leurs possibilités antérieures. On a délaissé la structure pour se concentrer sur les contenus (que seule la dite structure rend possible ; nous ne serions pas des mois sans le statut de citoyen ou sans les récits ou les éthiques, ou donc sans la pensée ou le christique).
On a récolté les fruits de toute l’historicité et nous n'avons imaginé que d'en « profiter », sans chercher à les redéployer selon une autre et une plus grande complexité que celle déjà acquise ; donc nous sommes tombés dans le monde donné là en espérant être heureux. Ce qui est louable mais ça n'est justement pas le bonheur qui est la finalité ; il faut que chacun réduise la souffrance ou les difficultés mais non pas que chacun se contente de cet « état » (remarquons que c'est tellement difficile que l'on a inventé des systèmes, économiques pour le dire, qui puissent se substituer à l'ancienne contrainte naturelle et nous maintenir dans un corsetage de nécessités, toutes artificielles, puisque nous disposions bien suffisamment de ressources pour échapper à l’impératif extérieur ; ce que nous n'avons pas acté, maintenant tout le monde dans la difficulté).
Les mois adviennent au bout de cette historicité, de cette histoire humaine et proposent dans l'humanisation générale et généralisée, laquelle est basée sur l'universel, sur l'humanisme, ils proposent ces mois une seconde version de humanisation ; que non seulement nous sommes universellement humains, mais qu'en plus nous sommes personnellement des mois. L'humanisation, la révolution qui devait inscrire la liberté et l'égalité dans le monde humain, dans le monde humanisé, qui a tenté de gérer universellement l’homme et ses besoins (le communisme) a été de la sorte dépassée du dedans par une plus grande humanisation encore ; la personnalisation. Dont on a déjà dit qu'elle constituait toutes les années soixante et suivantes (lorsque l'on se demande de quoi ces années furent le signe) ; la démocratisation en somme de la personnalisation. Dès lors plus de « masses », populaires, prolétaires, révolutionnaires, humanistes, mais des individus.
Et chacun enfermé dans son propre piège. Dans l'ensevelissement de déterminations de toute sorte et ayant à maîtriser, contrôler la soif de déterminations, ayant à charge de tenir non pas les contenus de réalités mais la forme réelle de ces réalités.
Or ceci exige une éthique, et une éthique non du comportent mais de la structure même du regard, de la contenance de la perception elle-même.
C'est en cela qu'il faut rejoindre la conversion ; le décentrement universel grec ou la conversion individuelle christique ou la suspension cartésienne de tout, ou l’exigence monothéiste de dieu, ou l'évidence que l'exister tel que « là », cad l'évidence du réel pur et brut.
On comprend bien que l'intégration dans les structures (dieu, être et unievrsel, christique et sujet, révolution et réel brut) ça n'est pas une simple affaire de sujet abstrait et dégagé, soit donc le sujet (absenté) de la raison, de la science, ni celui bien au chaud du moi-même qui se plonge dans des œuvres et des comportements, des désirs et des objets, mais qui ne bouge pas d'un iota ontologique.
Lorsqu'il s'émeut ontologiquement c'est par le bas ; puisque ne possédant pas les moyens structurels de (se) comprendre (de se prendre dans, un plus grand que lui-même). Et donc ontologiquement il subit l'angoisse ou les affects néfastes, les immersions étouffantes (obsessions, perversions, névroses et psychoses et dépressions). Lorsqu'il croit qu'il est le moi qu'il est (alors qu'il est un sujet qui relève de l'exister et non de l'être, de la liberté et non du bonheur). Ou lorsqu'il ne sait plus être, exposer un tel moi (de désirs et d'images et d'objets) et s'effondre du dedans ; d'un dedans pour lequel il ne dispose pas du tout des outils pour s'en sortir ; il traitera ces « problèmes » par de la pharmacie ou de la psychologie (ce qui est légitime, évidemment). Il analysera ces difficultés d'un point objectif (ou subjectif, c'est le même) mais non pas en saisissant qu'il doit lui-même se positionner et se percevoir d'en haut, de plus loin. Que non pas il perçoit le Bord du monde et du vécu et du corps, mais bien qu'il (se) perçoit à partir du Bord...
Dans la conscience, cet arc, est intégrée l'hyper-objectivité (qui rend possible, entre autres, objectivités diverses et subjectivités en nombre indéfini et tous les champs de perceptions découverts depuis l'origine méditerranéenne de la ré-anthropologisation, celle de l’acculturation qui passe outre, au-delà des mondes seulement culturels, au dessus du langage et des échanges et des représentations et des groupes humains dans leur monde parlé et agi tels quels).
Et cet enfermement est aussi une réalisation (on l'a déjà dit), positive.
Parce que la personnalisation, qui semble si « naturelle » permet d'installer une bien plus grande complexité, valant non pour elle-même mais pour les possibilités qu'elle autorise.
Or à se manœuvrer comme une bête brute le moi ne recherche jamais vraiment son historicité, l’ensemble de toutes ses possibilités de structures actives et bruyantes ontologiquement ; il patine.
Prenons par un autre bout.
Et donc si l'on veut éviter la contradiction (selon laquelle, fort communément admise sans sourciller, toutes les philosophies sont des erreurs ou des illusions), il reste très simplement ceci ; toutes les philosophies, tous les systèmes, toutes les religions et toutes les mystiques sont vraies.
L'erreur qui consiste à constater les « contradictions » ou les divergences, de tous les systèmes entre eux, a déjà choisi, élu ce principe bizarre qui voudrait que l'on pourrait ou devrait contempler la vérité telle que toute figée et toute achevée ; comme un objet, un gros objet, une chose morte. Ce qui est absurde.
C'est la même pensée qui ne parvient pas du tout à concevoir la liberté ou la création ; si il y a un vrai ou un bien ou un beau, il suffirait de produire la conformité et voila tout. Si cependant il est possible de créer et de créer le bien, le beau et le vrai, c'est que précisément la vérité de ce qui est n'est pas l'être mais l'existence et cela désigne un champ ample et situé au-devant qui appelle le Possible lui-même.
Peut-on créer le bien ? Évidemment que oui puisqu’antérieurement à telle règle énoncée on n'en avait pas idée du tout et que postérieurement cette même règle devient si évidente que ce sera pas elle que l'on jugera du reste. Parce que l'on peut admettre que le Bien en général soit une conformité, mais si le Bien consiste à proposer que chacun soit à lui-même son repère propre, son repérage, sa liberté, comment entrer cette singularité, ces singularités dans l'universel ? Sinon d'étendre ce que l'on nomme universel au structurel …
Et si l'on doit inventer « ce qui sera » cela amoindrira-t-il la valeur de cette création ?
Non si l'on considère que le but, la finalité est précisément de créer des règles telles que toujours le possible se tienne en réserve et soit encore, ensuite, encore plus possible. Ce qui se constate si on instaure la liberté comme règle mais aussi l'égalité comme possibilité de cette liberté (et non l’égalité à la manière communiste qui voudrait imposer l'universel, comme si la liberté précisément n'existait pas et n’était le fondement de toute complexité, réelle, et non pas abstraite ou idéelle ; le communisme a disparu de ce qu'il lui était impossible d’admettre la réalité et les libertés dans sa simplification universelle, ancienne mode, métaphysique, ou si l'on veut scientiste ; le scientisme est une proposition « métaphysique » qui croit seulement en la connaissance et non au savoir, au se-savoir inauguré par Descartes).
Ainsi on invente la science et ensuite quantité de sciences seront possibles ; étant entendu que la première science est celle, grecque, de la pensée, qui organise objectivement le raisonnement et use de toutes les intentionnalisations possibles de telle sorte que l'on soit en mesure de tenir et non pas de se perdre dans l'universalité de ce qui est énoncé et perçu (à la fois). En ce sens la pensée est une aide absolument formelle à la perception (de ce dont auparavant nous n'avions pas du tout connaissance, entendons conscience, et que seules les idées font apparaître, aussi sont-elles divines, au sens grec).
Autrement dit le Bien qui n'est plus la conformité à un ensemble de règles éternelles, mais l'invention à l'usage de chacun et de tous (de telle sorte que chacun entre en une supposée a priori possession de lui-même et que tous se rapportent à une commune organisation, à une coordination, ce que l'on nomme idéalement la démocratie, étant défini que la démocratie est celle non de la seule liberté, anglo-saxonne, mais de la liberté-égalité, française, qui seule entre dialectiquement en mesure de se réguler et de se conférer des finalités internes, de sorte que la complexité ne se réduise plus à un simple jeu de rivalités libres, mais s'auto-organise les uns les autres).
Pareillement il fallait mettre en place l'autonomie de chacun ; ce qui débuta par le christique ; qui vous plaçant sous son regard (qui vous laisse là à la surface du monde, mais en ajoutant « je suis parmi vous », dans la liberté et l'égalité de tous et de chacun) sous son regard il vous crée libre et un à chaque fois. Historiquement c'est ce à quoi cela a abouti. Ensuite que les institutions humaines aient quelque peu déliré c'est très communément ce qui arrive.
Tout cela réclame une énorme élévation générale et individuelle et collective ; ça ne se crée pas sans explorer quantité de possibilités et ouvrir quantité de champs de perception. Il faut qu'il existe un champ de perception qui rende possible par ex l’individualité et le regard du christ est cette ouverture. Qui ensuite sera brodée et étendue et créée en récits divers et variés. Ceci se nomme comme on a dit, l'acculturation généralisée (et individuée).
On n'impose pas la démocratie du jour au lendemain ; il faut que chacun soit averti de son individualité et de celle des autres, et que le collectif soit en capacité de suffisamment se coordonner et que la généralité offre les repères, les repérages, intentionnels, la cartographie assez réaliste. Accessible plus ou moins et selon divers degrés à chacun et à tous. Que ce soit par le christique, les récits, romans, poétiques, esthétiques, politiques, éthiques, images ou fait historiques (1789,1848,1871, ou alors l’événement « christ », etc). De même il arrivera, toujours et à chacun, un « fait » étrange dans sa propre vie qui transformera cette vie (du vivant parcouru par le langage, autrui, etc) en Existence (on y reviendra, un jour).
On a donc avancé que déjà « cela » nous est arrivé ; le réel, pur et brut, s'est déjà introduit dans l’histoire humaine ; sortant de tout monde particulier (qui se refermait sur le groupe humain faisant fonction de validité de cette vérité là, de véridicité, incommunicable à quiconque n'est pas né dans ce monde humain donné), on déboule dans le monde donné là (les grecs) et selon ce corps (que l'on est, le christique).
On peut essayer de retrouver une sorte de communauté … mais c'est peine perdue parce que c'est « déjà arrivé ». On est déjà Autre. Selon l’altérité du grand possible qui anime tout ce qui est, partout (au point qu'il est impossible de définir ou s'imaginer une « réalité » qui ne soit pas de l'ordre de la Possibilité, ce qui implique de l’altérité ; le réel est d'une brutalité effarante, son possible, sa possibilité est la subtilité de plus en plus différenciée, la distinction.
Bien sur le moi tend à échapper le plus loin possible du regard Autre... Il aimerait se tenir au chaud. Et l’altérité c'est aussi bien l'existence, la « vie », autrui, l’histoire, le collectif mais aussi dieu ou le christique ou l'universel ou la vérité. Autrement dit soit l'existence soit l’exigence. Le moi ne sait plus du tout par où s'enfuir. On ne s'étonnera donc pas qu'il en devienne fou ou névrosé ou dépressif. C'est normal.
C'est normal parce que ce à quoi on se mesure c'est à la potentialité intégrale de tout. Tout le possible. Et ce que l'on doit acté, décidé, créé c'est la Possibilité du réel lui-même. Non pas continuer la réalité, dans des sortes de compostions diverses et variées (on nomme cela ici les mondes humains ou les mois) mais décider et créer la structure même dite Réel. Ce qui est en jeu dans le réel c'est le réel, ou donc le Possible.
C'est en ce sens que nous sommes déjà passés de l'autre côté ; non plus dans une des mises en forme culturelles (qui inventent le langage, la représentation, les mondes humains, et tentent de gérer le donné du vivant parlant et échangeant et interprétant le monde et sa propre vie comme contenu), mais passés dans l’acculturation ; par laquelle au lieu de recevoir une forme de monde, on se doit de s'efforcer. De se soumettre à l’exigence. Dieu est prioritairement l’exigence (l’altérité formelle et non plus seulement celle « brutale » de la survie ou de la vie parlée dans un monde humain particulier), le christique est la reprise délivrée en quoi consiste l'intégration de l’exigence ; il ne s’agit plus d'accepter la loi mais de la vouloir, ce qui veut dire de la créer (liberté et égalité).
On n'y comprend donc rien si l'on croit qu'il suffit de s'y décider abstraitement ; il faut intégrer, intégrer le corps, de chacun et de tous, dans la même coordination (ce que le christianisme nomme l'esprit-saint, la communauté des croyants, mais qui ne suffisait pas en tant que tel ; il fallait que cela devienne réellement un État et son principe et ses lois, et que chacun comprenne, intellectuellement et tout autant sinon plus selon ses Affects...
Les affects et les affectivités sont fondamentaux ; c'est bien pour cela que le christique s’instancie selon une modulation d'affects tout à fait surprenants (et que le monde ou organisation antique ne comprenaient pas du tout, qui divinisait César par ex, et non pas le plus méprisé et le plus petit d'entre tous, et pas en tant que fondations affectées du vivant humain parlant et décidant, se convertissant). Si l'universel d'une part et l'individuelle intention d'autre part ne s'inscrivent pas dans et par un corps, rien n'est possible. Qu'il y ait une passion de l’individuel peut à peu près sembler compréhensible, mais l'universel a nourri également toute révolution et pour des millions de personnes (sans parler des éthiques, esthétiques, poétiques, etc).
Le lien, le rapport interne entre individuel et universel peut paraître artificiel mais c'est que l'on a oublié leur intégrité absolue ; on les imagine selon l'affect du moi, cad la liberté subjective (anglo-saxonne, qui doit par contre intégré ce rapport comme « moralité », la moralité made US, si l'on veut, enfin auparavant parce que depuis les années soixante ce serait plutôt la désintégration, la transgression généralisée, comme summum de la structure de liberté, prétendument, parce que c'est évidemment une perte aberrante de l'horizon, une localisation mortelle, un effondrement interne de la structure de la liberté elle-même. Pourquoi ? Pourquoi également l’universel est-il intégralement lié à l’individuel ?
Parce que la forme réelle de l'individuel est l'intentionnel et ce qui est intentionnel est rapport, et le plus grand rapport possible est celui de universalité de ses propositions ; on a dit déjà que la structure est antérieure au divorce subjectif-objectif ; elle est précisément « ce qui est capable de l'un et de l'autre », ce qui rend possible et l'un et l'autre (et tout le reste). De même l'universalité est dite universalisation ; un processus et un procédé et non pas un état ou un corpus ; il est bien un corpus mais en tant qu'on le porte plus loin, en tant que l'on redéfinit sans cesse le Bien, le vrai, le beau. Et que par tout cela la réalité, le vivant, le corps, les échanges, les réalités sont soulevées, élevées ; entrant dans un champ renouvelé (le christique ou la pensée sont des champs de perception en constante évolution, approfondissement, incorporation, perception au sens total).
Aussi il n'est aucunement question d’opposer l’universel grec et l'individuel christique ; c'est bien pour cela que ce dernier reprend intégralement la pensée grecque.
Si un sujet considère sa substance selon ce corps donné et son immédiateté, il s’enfonce dans la détermination et ne parvient plus à la maîtriser, à la transmettre, à la communiquer ; tout s'efface dans et par des images et non plus des idées, qui seules instancient, instruisent, in-forment le corps. Le basculement images/idées possède son inverse le basculement, la perte idées/images, lorsque les images et le miroitement du monde ou du vécu ou du corps deviennent la finalisation.
Contrairement à ce qui peut sembler ça n'est pas en percevant mais dans l’élaboration intentionnelle que l'on perçoit plus et plus loin (individuellement) et de manière coordonnée (collectivement).
On ne collectionne pas les idées, de Descartes par ex, comme un entomologiste de choses mortes, mais en renouant l'intention cartésienne, celle-là même qu'il décidait du dedans mais qu'il méconnaissait tout autant ; et on lira Descartes avec Kant et Husserl, Sartre et Lacan.
Tout est affecté de relecture parce que la substance même est le mouvement, l'intentionnalisation et l'exploration du possible (à partir de là, du « là », où l'on est, en lequel on existe, puisqu'aussi bien ce qui seul existe est le présent et que l'on ne quitte jamais le lieu même de l'existence, de l'exis-stance, la « stanciation » si l’on veut, là où tout apparaît c'est toujours le même Ici, le même Instant).
C'est le réel absolu, ce qui veut dire formel, qui a déjà commencé et qui est à vrai dire venu tout entièrement à chaque fois ; l'être est, le non être n'est pas ; dieu ou le christique ; le sujet ou le réel, tout cela arrive soudainement point par point et pourtant en une fois, dressant la verticale qui contient toutes les horizontalités ; à chaque fois la page se tourne et se réécrit.