Description (survolée) du sujet
Si chacun est dans la dimension unique, ça ne se voit pas ; ça ne peut pas se discerner.
La structure est en elle-même indiscernable. Mais comme il n’est que de la détermination (et aucune « immatérialité » ou de spiritualisme qui soit supposable ; puisqu’alors de toute manière et quoi que l’on puisse croire sincèrement, si c’était le cas ce serait non pensable), même indiscernable la structure est nourrie de causes et produit des effets. Autrement n’existant ni en soi, ni en déterminations, elle n’existerait tout simplement pas ; or elle existe, mais en tant qu’elle inexiste. Entendant par là évidemment qu’elle est dotée d’une certaine forme d’existence.
La difficulté à laquelle nous sommes confrontés (non seulement théoriquement mais dans n’importe quel vécu, dans n’importe quel donné ou monde) tient donc à la compréhension que l’on peut acquérir de cet être qui inexiste. Il va constamment s’illustrer ; prendre ceci ou cela pour se figurer. Il est non pas lui-même mais représenté. Il délègue son être (indéterminé et donc non représentable) à une représentation ; il peut tout autant se signifier comme une tribu ou comme un groupe politique ou comme évidement une individualité, une personnalité. Ce qui nous préoccupe tous, puisque depuis que les sociétés se sont installées comme constitutionnalités (d’Etat, de droit, de culture et d’acculturation, de, enfin, personnalisation comme procédé d’humanisation maximale ou minimale, comme on l'entend), depuis cette installation, notre être s’est incarné au plus proche du donné, du monde, du vécu, du « là » ; en tant que personne immédiatement elle-même et recherchant son unité (vide) comme si il pouvait s’agir d’une unité (pleine).
Aucun groupe ou aucun ordre symbolique n’intercède à notre place ; chacun est jeté-là dans le monde donné (l’étendue cartésienne en somme, ce genre de monde tel qu’il peut être réduit, péjorativement, et volontairement, au minimum). De sorte que oui, chacun en est amené à non plus parler son vécu, ni même le symboliser (dans un ordre de parole imaginé), mais poussé à le signifier. En vue d’en opérer une synthèse qui prend tout ce qui vient, dans le bazar complet, le désordre parfois intégral, comme si il était lui-même une synthèse immédiate, immanente à elle-même, au monde, au vécu ; une destinée, un sens de cette vie propre. Cette synthèse immédiate est identique à la synthèse collective que la Parole dans un groupe restreint (une tribu) accordait à l’expérience du monde particulier dans lequel il existait. Elle reste, cette logique, intérieure à tout langage (qui voudrait encore s’exister comme Parole partagée et vécue comme monde et donc d’un corps significatif par exemple, mais nous pensons « corps » comme unité séparée ; le corps dans la Parole d’une tribu était déjà lui-même partagé et signifié ; le nôtre, non).
La représentation de notre être est impossible ; elle en produit donc des tas qui lui sont substitués. La progression est pourtant bien réelle dans cette représentation continuée ; on part d’un monde particulier (de tribu élargie ou non), au monde en général (l’universel, et son monde unique valable partout en tout monde particulier), et l’on aboutit au donné, là, (de science objective, de sociétalité de droit et d’échange pur, sans signification de synthèse, de personne humaine qui est « à sa propre charge » à se dépatouiller elle-même, sans secours ni recours).
Le représentation est impossible ; et donc utilise alors une définition dite « ontologique » de cet être spécifique. En ceci la philosophie est seule à en tenter la représentation (qui est impossible). Elle en accorde un « savoir ». Qui n’est pas une connaissance ; qui n’est pas objectif ni précisable outre mesure. Ce flou et ce vague n’est pas une faiblesse mais l’inverse ; approcher l’imprécisable demande une torsion. Il s’agit de tordre les mots, de distordre le représentable. Ça doit passer au travers de « ce qui est dit » littéralement, pour s’incruster, remonter, advenir dans la structure même, s’instaurer dans la forme via quelques contenus spéciaux (certaines idées, expériences, perceptions, imaginaire, etc, qui sont spéciales en ceci ; qu’elles sont structurées et donc apparemment tordues, distordues dans l’expression, la représentation, puisque la structure inexiste et ne peut pas se dire, autrement qu’en trifouillant le langage).
La philosophie se réalise donc dans l’intériorité de notre être ; sauf étant impossible, on ne peut pas parler d’une « intériorité » ; ce serait donc « se réalise en interne de la structure ». Comme mouvement non d’un contenu, mais mouvement de la forme sur elle-même.
Si je dis ; je pense donc je suis ; je n’énonce pas seulement une idée ; je réalise un réel. Mais de même, si je dis ; l’être est, le non être n’est pas ; je rends réel un mouvement de pure forme. Qui anéantit tout contenu. Qui se libère de tout contenu. Aucun contenu ne sera suffisamment architecturé pou prendre la place qu’occupe désormais la forme pure. La forme pure d’être.
Il n’est pas trente six déplacements possibles ; aussi on nomme « position » les quelques points supérieurs, et attitudes les quelques variations à partir de ces points. Les deux positions « l’être » et le sujet sont indépassables. Ce ne sont pas des « idées ». De même la démocratie n’est pas une attitude, (variation), mais un être-même (une position).
La différence tient en ceci ; une variation ne parvient pas à saisir selon la seule forme, la formalité de ce qui est, mais mélange un peu ou beaucoup de monde, de donné, de vécu et se réenfonce dans le particulier. La forme évidemment se mêle du monde, du donné, du vécu, mais attire ceux-ci vers la structure et pense par et via la forme-même. Une personnalité est attirée dans sa construction invinciblement dans la variation ; elle cherche une unité de soi qui serait synthétique (qui prend ce qu’elle vit pour argent totalement comptant, voir content). Une personnalité suffisamment aguerrie (et c’est ce qui se cherche en chacun) annule en partie la synthèse immédiate pour une synthèse médiate, médiatisée, un surplus, un en-plus que soi. Une conscience non plus collée à même « ce qui lui arrive » (qui ne ressemble à rien la plupart du temps).