La multiplication gratuite des petits pains (la perfection formelle de ce-qui-est)
De tout on n’y comprendrait rien si justement tout n’était pas en son lieu et place, vrai.
Il n’est rien de la réalité ou du réel qui puisse être retranché ; c’est uniquement notre incapacité à comprendre ou à saisir tous les liens qui sont tissés qui nous bouche la vue.
Il n’est certes pas d’Ordre ou il n’est pas de Sens de toutes choses et êtres : aucun ordre en s’impose jusqu’au plus petit détail, d’une part, ce serait inimaginable, mais aussi il n’est pas de monde qui soit organisé en soi d’autre part. Des galaxies qui se collationnent aux espèces, aux règnes qui disparaissent, il n’est vraisemblablement qu’une loi statistique et une détermination mais seulement causale ; qui se heurte et se choque mais de laquelle il n’est pas de sens à retirer.
Or pourtant il ne fait pas de doute tout ce qui existe, est en une fois intégralement et parfaitement là où cela est tel que cela est.
On peut s’apercevoir nettement que suite aux dépassements historiques (de la parole, du groupe, du langage, du donné là immédiat, etc) a émergé la réflexivité de notre-être sur lui-même ; réflexivité est ce qui réunit l’universel grec et le devenir conscience chrétien (la dernière conscience possible indéfiniment reportée et donc libératrice de toutes les consciences antérieures, puis intérieures qui enferment toute conscience en ses consciences prises, et enfin qui unifie les consciences les unes les autres séparées selon le monde et les intérêts immédiats).
Suite aux deux extases, universelle (qui dépasse les mondes particuliers, les groupes, les langages) et de dernière conscience (qui subsume subtilement toute conscience prise-dans en sa libération indéfinie), s’ouvre l’acquisition par soi de chaque conscience ; cartésienne.
Le stop intégral de Descartes annule et remplace. Autrement dit le libre va désormais tenté de réaliser et l’universel et la dernière conscience en cette première conscience prise sur soi ; première conscience libre qui poussera donc quantité d’autres consciences libres au devenir.
De la première conscience cartésienne à la conscience première existentielle
On remarquera en tous cas la découverte de la conscience première dite existentielle ou ontologique (elle dé-couvre notre être en son squelette structurel, Husserl, Heidegger, Sartre, etc ) et l’affirmative conscience de soi comme expérience explosée nietzschéenne ; Nietzsche traduit en sa systématique le possible pur de par soi seul d’une conscience si radicalement libre qu’elle ne se connait pas elle-même , n’étant alors pas composée elle ne se soumet en aucune détermination ; elle les entraîne.
Consécutivement c’est à partir du sujet qui se sait cartésiennement que l’on peut (puisque au moins certain de « soi » et sans en passer ni par l’universel ni par dieu) envisager le monde tel quel en ses objectivités ; tenter alors, sous ses yeux de sujet pur, de décanter toutes les réalités en des sciences, des idéologies, des naturalismes, des mathématisations, des analytiques, des linguistiques. Peu importe puisque le sujet, lui, se sait (tout en s’ignorant radicalement ; son être-soi est ce savoir ignorant et autre que toute connaissance ; son savoir est structurel et non forcément énoncé, et donc n’est pas, en rien idéaliste ; Descartes échappe en son originalité à tout idéalisme, il décrit lucidement son être tel que « là » en son attentionnalité pure).
De même le principe de la Vérité, de la vérité comme non pas contenu mais comme principe formel, absorbe, quoi qu’on en dise, toutes les vérités que ce principe vérité rend secondes ; il n’est pas à strictement parler de vérité en quoi que ce soit (sinon devenant continuellement sous la pression du principe de vérité vide), mais il est structurellement une exigence pure que tout énoncé subisse la véridicité même.
La forme pure comme structure de ce-qui-est
Ce qui parait renvoyer notre réalité, notre vécu, à un vide formel sauf que la vérité s’existe. de même le libre est le second principe absolu ; quels que soient les choix ou les inventions ils ne valent que par et dans le libre ; or du libre, si telle invention conter-dit le libre, cette invention s’annule et lors même serait susceptible d’exister comme invention … le libre et la vérité principe dessinent les bornes externes. Au-delà des ces bords de tout monde, tout vécu, tout donné, il n’est plus rien.
Aussi peut-on dire que toujours, constamment et indépendamment de ce que l’on en « pense », ce qui est existe en sa plus complète extrémité ; ce qui est existe à l’extrême de ce qu’il peut être. Ce qui est encore un indice de sa perfection pure et simple.
Il se dessine donc que oui le monde donné là est rigoureusement ordonné mais ceci uniquement structurellement ; c’est la fine architecture de la structure qui porte et oriente la totalité des devenirs et des réalisations, laissant de fait une large possibilité de manœuvres, d’inventions, de délires ou de duretés susceptibles de « se produire ».
La multiplication gratuite des petits pains
On peut vouloir ou désirer mille réalisations, mais on ne passera pas outre le libre ou la vérité ; on est assujettis au libre et à la vérité mais comme il n’est « rien au-delà » et qu’ils fournissent les bornes du monde, de n’importe quel monde ou de tout vécu, il est visible qu’ils non pas restreignent mais autorise quantité de mondes ou de vécus possibles. Or de fait c’est ce qui se produisit ; il n’y eut jamais aucun de vérités (secondes, et non pas secondaires) que depuis l’installation de la vérité comme principe des grecs et jamais eu autant d’être-libre nantis de leurs propres devenir que depuis Descartes (ou, encore une fois, ce que Descartes repère et manifeste illustrativement). Les bornes du monde sont donc, comme de juste, « ce qui rend possible » qu’il y ait quantités de réalisations. La perfection si elle n’est pas du monde, des vécus ou de la détermination en général et en particulier, est assurément structurelle ; cela tombe bien puisqu’ainsi il peut exister tout ce qui est : de la particularité aux pluralités, des pluralités aux généralités, des généralités aux devenirs incessants.
Le devenir soi de la conscience vide pourtant
Peu importe donc que tout ce qui est, devienne. De tout on ne saisit jamais rien, mais dans le même temps, le même mouvement on saisit absolument la structure interne ; on l’existe d’une part et d’autre part philosophiquement on commence de ramener à soi, à une expérience effectivement réelle, cette structure ; on tente de la maintenir consciente de soi ; puisqu’il ne serait pas logique que ce qui est librement soi, la conscience, ne puisse pas justement de son savoir instantané de soi (elle l’existe de fait, activité pure) passer à un connaitre de soi, à une connaissance retorse de ce savoir ; ce qui se nomme philosophie.