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instants philosophie

Carte actuelle de l’esprit

18 Août 2018, 08:28am

Publié par pascal doyelle

Sous le prétexte fallacieux que seule la réalité est, et non pas le réel, nous nous sommes précipités dans tous les désirs (on utilise « désirs » pour signifier « petites intentionnalisations médiocres »).

Et en somme « profiter » c’est juste un certain énervement. De ce que l’on prend une partie quelconque du monde ou de sa propre vie, pour l’ensemble, pour le tout, pour la totalité ou ce qui revient au même pour l’essence même, fut-il momentané, de notre désir.  L’immense commentaire durant plusieurs (voire  décennies du « désir » en l’être humain n’est pas un hasard. Qui se soulage à peu de frais, individuellement, et qui gaspille globalement la totalité des ressources de la planète. Voila bien à quoi se réduit tout ce narcissisme, ces obsessions et ces mégalomanies diverses.

Or il est bien évident que si l’on perçoit, ou décide ou imagine ou désire telle ou telle partie du monde c’est que l’on n’est en aucune de ces parties, découpages, limitations, mais que l’on existe en tant que perception, vision d’ensemble, arc traversant qui éventuellement perçoit ou désire ou imagine telle partie ou telle autre. Donc est requise, appelée une signification de structure qui prenne cet arc en compte comme tel, comme un arc de structure (qui ne tient pas aux parties, aux découpages et implique une plus grande stratégie que ces tactiques plus ou moins inférieures) ; c’est ce qui arrive lorsque l’on pense à soi … On se dit « je suis Pierre Dupond » et on voit bien qui est Pierre mais qui est le « je » qui dit « je suis un-tel » ?

Cet X pourtant toujours individué (et non pas une fonction ni un universel formel, mais un sujet et une étrange unité) est l’interrogation majeure ; non de ce qu’elle soit subjective mais bien de ce qu’elle autorise tout subjectif et toute l’objectivité, toute l’universalité et toute les  expériences et tous les corps ; et donc une hyper objectivité. Ce que l’on nomme structurel.

La forme du réel est une forme de sujet, arc de conscience ou présent.

Structure de sujet que décrivent les grecs (l’être, l’idée, le un), le sujet (christique et cartésien, kantien, hégélien, jusqu’à Lacan). Non pas une fébrilité subjective, mais une cohérence de forme singulière formelle, ce qui veut dire absolue (qui n’étant pas composée n’est pas relative et qui permet le défilement de toutes les compostions et déterminations). On situera mieux la valeur de cette cohérence si l’on affirme, de but en blanc, que le présent est la forme absolue du réel unaniment singulière ; la forme « sujet » s’applique, techniquement parlant, au réel en tant que le réel (tel qu’il nous est connu en tout état de cause) se présente comme présent pur et brut, très brut.

Que cette stratégie, qui définit notre être comme une forme vide mais active et même hyper active, puisse manquer et ce sont alors les limitations obsessionnelles, fantasmatiques, irréelles, exigües qui nous enferment. Impossible de non pas contrôler (comme le conscient et le moi croit maitriser) impossible de prévoir, présager, de lancer une vision qui se tienne et quand cet arc qui traverse le possible vient à manquer toutes les réalisations commencent de s’effondrer dans les corps, au travers du monde, dans le néant (puisque tout ce qui est du monde disparait, en éléments composés qu’ils sont, lesquels éléments se perdent et s’écoulent dans l’infériorité ; les tactiques, limitées n’y suffisent pas, une stratégie est requise sinon c’est la nature même des éléments , qui composent les choses et les êtres, de se dissoudre, c’est bien pour cela que christiquement ou philosophiquement c’est une autre dimension qui, elle, perdure ; la révolution, la structure de l’Etat et du droit nous maintiennent, bien que toutes les intentionnalités et tous les images, les syntaxes, les mois se dissolvent).

Et cet effondrement n’est pas dû seulement aux répercutions extérieures (les images, les infos, la pub, internet qui nous happent et nous découpent), mais vient de l’absence de stratégie générale ; et toute l’intentionnalisation s’effondre sous le poids des données ; puisque l’on considère que le monde est le donné et que le monde suffit ou devrait suffire au monde, aux vies, aux psychologies, alors il suffit de placer ou déplacer des petits bouts de monde pour faire un ensemble ; mais des petits bouts produisent un tas, et ne constituent pas un ensemble.

Pour qu’il y ait un ensemble il faut lui appliquer un mot, un signe, une orientation, un effort, une volonté intentionnelle et cela ne veut pas dire un élément de langage (on retombe dans la sale manie du rationalisme, mécanisme, naturalisme, etc) mais une signification et une signification n’est pas un « sens » mais est une intentionnalité qui est aussi une intention ; et généralement une significativité, une inclusion dans un horizon, réclamant que soit tenu cet horizon à bout de bras (tandis que le libéralisme et capitalisme bien que réel, ne forme pas du tout un système et ne peut se gouverner, de sorte qu’il signifie « rien »,juste l’absence à ciel ouvert pour rien).

Et ceci ayant affaire avec le corps (et non la version éthérée de l’esprit, un esprit sans corps est seulement perçu de l’extérieur, par un autre, un médecin, un psychologue, un journaliste, un politicien) ; le corps du psychanalysé n’est perçu par personne, le psychanalyste est juste l’occasion qu’apparaisse le regard qui n’est pas, de sorte que l’intentionnalisation sorte. Perçu du dehors on l’est mille fois quotidiennement par les images et les sons. Une carcasse extérieure qui se continue abstraitement par une autre-intention, par l’intention des autres. Des pouvoirs.  

Or d’intention il n’y en a pas. On a laissé cela derrière aux révolutions ; ce qui remonte au   libéralisme, communisme, socialisme. Le libéralisme a tout absorbé puisque contrairement aux deux autres il fait fond sur le réel ; sur la découpe individuelle de chacun (qui génère une complexité effective qu’aucune organisation universaliste communiste de l’humain ne peut ni atteindre ni gérer, ça ne peut pas se gérer d’en haut puisque c’est techniquement décentré et ce décentrement constitue l’essence même du non-pouvoir libéral) ; ou donc sur la possibilité de chacun d’agir selon son pouvoir ; le roi est écarté et chacun peut vaquer à son invention ; le centre est évidé et chacun creuse son décentrement propre : tout ce qui n’est pas explicitement autorisé est interdit, tout ce qui n’est pas interdit est autorisé, renversement du possible ; dans les sociétés traditionnelles (celles qui ont inventé la culture et non pas celles qui créèrent l’acculturation par-dessus et en plus de la mise en forme culturelle) dans ces sociétés l’ordre préexiste, le groupe préexiste, le roi préexiste ;

dans les sociétés individuelles (celles de l’acculturation donc), depuis le christique, l’individu doit s’auto-organiser, et plus ou moins librement ; le christique, dans sa réalisation institutionnelle, est évidemment soumis à une compréhension en apparence négative de la liberté ; car il s’agit non pas de réprimer la liberté de chacun que de conduire ou imposer à chacun la liberté du un-seul, le christ, à l’imitation du christ, mais néanmoins le principe est que rien n’existe sans cette motivation individuelle ; la foi seule, la conversion, la libération du monde et du vieux corps par le corps renouvelé et pour l’autre-monde libèrent ; le un-seul christique permet de passer outre la détermination, des intérêts du monde qui se livrent à la guerre et la violence, des envies du corps qui mènent à la dispersion de l’intentionnalité (qui tombe dans la chose, le corps, l’immédiateté et ne peut plus subvenir en une stratégie formelle), et qui nous situe à partir du point hors du segment naissance-mort ; c’est de là, tout là-bas que l’on se perçoit et percevra dorénavant, à partir du point-autre.

On a beau se la raconter, c’est parce que la révolution et le statut de citoyen (par ex et objectivement) nous exportent et que l’on est-déjà hors de soi, et ce cadre historiciste est ce qui nous maintient. Mais lors du christique cette altérité n’existait pas sinon en dieu et fondamentalement n’a réellement existé que par le premier sujet-autre, qui nous choisit un par un, et c’est non pas dieu mais le christique ; non le divin (au-delà) mais le surdivin ; le divin-en-plus-du-dieu, qui existe ici même et en quoi consiste l’absolu apport christique ; le divin est ici même possible d’une part et qu’est-ce alors que le réel ? Et d’autre part qu’induit la possibilité du divin ici même dans la compréhension que l’on a de dieu ?  Et du réel ? Questionnements totalement effarants et que signifient l’intrusion de la structure christique (qu’elle soit effet de la structure ou révélation, pour les croyants, ce qui est tout à fait admissible en droit).   

On voit ainsi l’immense acquisition qui nous structure ; qui nous structure parce que le fait fondamental (la révolution, qui bouleverse dans l’effectivité la totalité de l’espace humain, intérieur et extérieur) intègre dans sa formalité ce qui structurellement jusqu’alors était en suspend (dans la pensée et le christique, et autrefois encore recouvert par chaque groupe humain qui entendait former un tout, corps-monde-groupe humain confondus, unité de tout que la pensée et le christique ont déchiré ; de laquelle déchirure nous existons depuis lors).

Concrétisant l’acculturation qui a travaillé toute l’historicité et qui consistait à passer de la forme (non mondaine) et jusqu’alors concentrée dans et sur et par « le mana du groupe humain », de faire passer cette forme donc dans le monde et la détermination et les corps, en tant que structurelle, et ce séparément un par un, et individués maniant l’universel, puisque l’universel n’apparait que un par un-seul, le héros grec ou le christique (il n’y a de pensée, de raison que dans et par l’individué puisque relevant d’une expérience, expérimentation et devenir distincts, arguant d’une immense distinctivité de toutes les intentionnalisations possibles à propos du monde, grec, et de la vie, christianisme) ; et c’est ainsi le gant qui s’est retourné et la face interne du gant est devenu la forme des réalités (on croyait que le gant d’apparence était le monde-la parole-le groupe) ; et sachant que la forme, la structure n’ont aucun représentant, aucune correspondance dans le monde, ni selon le corps, la détermination ou la réalité ; donc cette forme cette structure vient comme de l’au-delà, d’ailleurs et en conséquence et par contrecoup rend toute la réalité autre, étrange, terrible, horrible, effarante, illuminée aussi.

Et comme la révolution a instancié chacun comme un, alors tout le reste parait abstrait et artificiel ; ne demeure plus réel que le gouffre sans fond de la distinctivité de chaque un. Le reste, toutes les constructions en plus se sont écroulés ; il s’agissait d’idéologies, d’idéologies universalistes rationalistes qui prétendaient se substituer au monde, aux corps, aux individus réels ; autrement dit le libéralisme n’est pas un système ; c’est le réel. Le communisme remplace l’individu et ses désirs par le l’homme générique et ses besoins (que l’Etat satisfait). Sur ce réel il est venu s’imposer quantité de systèmes et de variantes de systèmes de libéralismes et de capitalismes ; et spécifiquement que le libéralisme (la théorie économique, qui est à 90% une idéologie du corps donné, découpé, sérié, conditionné) soit la seule et réelle représentation du libéralisme (les choses et les êtres réels). De même que paraissent encore plus éloignés la pensée grecque ou le christianisme, les religions ou les belles histoires ; or pourtant tout l’ensemble explore directement et crument l’immense articulation qui cherche la stratégie adéquate.

A l’inverse donc le capitalisme et libéralisme ne sont pas des « systèmes » ; juste des accumulations mais pas du tout des « pensées » et donc ingouvernables. Personne ne peut décider parce que personne ne comprend et parce que l’on ne peut pas comprendre ce qui n’est seulement qu’un tas désordonné et non un ensemble sur lequel on aurait prise ; c’est que ce qui origine tous les bouleversements, jusqu’aux plus absurdes et de vanité ou de distraction, est une structure à ce point Autre (que tout monde et corps donné) qu’elle peut potentiellement épuiser, détruire, anéantir et le monde et le corps.

Le corps lui-même est démantibulé mentalement et donc réellement par la structure qui étire le corps vers l’externe, non seulement la réalité (des désirs aux objets, qui prétendument sont en mesure de répondre aux attentes, puisque dans ce monde là le donné explique le donné), mais vers le réel même ; la structure de conscience est enclenchée dans la structure du réel, le présent. Et donc chaque arc est déjà toujours instantanément (selon la structure) et immédiatement (selon le monde) engagé dans la valeur de ce qui est ; vers ce à quoi cela mène. Dit autrement : on perçoit à partir du présent, à partir de ce qui n’est pas, de l’exister qui vient, à rebrousse temps, vers nous, vers la réalité, vers l’univers. Et évidemment il est noté « à rebrousse-temps » mais ça n’a rien à voir avec le temps ; ça n’a rien à voir non plus avec l’espace ou l’éternité ; c’est la dimension telle qu’antérieure (à tout).

Espace, temps, déterminations, réalités, vivants, mondes humains sont des effets et donc la Cause est tout autrement existante ; c'est-à-dire que la forme des réalités est autre, ce qui signifie distincte et réclamant d’être comprise distinctement selon sa propre dimensionnalité ; dont on dit et répète qu’elle non pas un « tout » imaginaire (nécessairement imaginaire puisque très kantiennement « monde » ne correspond à aucun concept) ou une unité au-delà (qui reste seulement supposée abstraitement) mais la structure la plus intimement proche à chaque parcelle de réalité, et intimement veut dire « antérieure à toute part du monde, à toute chose, à tout être ».

Le réel est un rapport et en ce rapport unique se créent des tas de rapports, des êtres, et parmi ces êtres et ces choses, quelques uns s’existent, sont rapport-à-soi, dans lequel rapport le « soi » est le rapport lui-même ; de là que l’on ait toujours dit, de tous temps, qu’il était « conscient, rapport, à soi », à soit en tant que conscience, conscience d’avoir conscience et que pour un tel être avoir, ceci ou cela, est plus important que d’être ceci ou cela ; si l’on était ceci ou cela on  n’en aurait pas « la conscience ». On est toujours autre-que et cette altérité est la question même : quel est cet autre qui comme présent ou structure de sujet produit tout le reste ?

Et puisque l’historicité nous a largué sur le sol même du réel tel que donné « là » (existentiellement ou selon l’être-autre de Heidegger ou la volonté-autre de Nietzche ou l’ensoi de Sartre, etc, y compris le désespoir des romantiques) chaque corps prend de plein fouet la puissance abyssale de l’exister. Non seulement de sa distinctivité propre (chaque arc de conscience n’existe que un par un, structurellement autre par rapport à tout, n’ayant aucun représentant dans le monde, et les signes signifiant d’abord et finalement le rapport qu’il existe), mais  signifie l’abyssalité du présent tel quel,  l’angoisse brute que l’essentiel du réel n’est pas mais vient du présent, ayant à se rendre réel. Tout le réel vient d’en avant de lui-même et c’est pour cette raison qu’il existe un présent (qui autrement n’aurait aucun sens).  

Remarquons bien ceci ; cette description ne prétend pas du tout se passer de dieu, du divin, de la pensée, de l‘universel, de toute croyance ou présupposition (pourvu qu’elle soit suffisamment cohérent et non pas livrée au n’importe quoi ou à l’arbitraire fantaisiste) ; elle devrait bien plutôt s’(utiliser afin de, peut-être et selon, préciser, délimiter, explorer ce que dans son fors intérieur on nomme sa croyance propre. Autrement dit ce que l’occidentalisation examine c’est l’articulation (notre être / l’être, quels que soient les évocations) et c’est cette articulation et cet examen (qui initie donc qu’un décalage ontologique existe) qui doit et de toute manière fut utilisée afin d’approfondir telle ou telle croyance.

Quitte à ce que, également, on puisse comprendre cette description comme purement non-religieuse, sauf que l’on présuppose que l’immanence, entièrement là, est originellement dans et par une structure que l’on peut, techniquement, définir comme transcendance pure et brute. Et donc la transcendance est absolument affirmée comme antérieure à tout et antérieure à la moindre part de réalité. Il y a réalisation parce que transcendance antérieure comme attirance du réel ; la réalité est un étirement à partir de l’en-avant. À charge alors de transformer cette brutalité (que tout le monde peut bien constater) en  subtilité ou pureté formelle ; posant la question : jusqu’où peut se réfléchir, au propre et au figurer, ce caractère structurel du réel ?

C’est ce dernier ensemble de possibles qu’il faut explorer ; parce que l’on ne peut analyser une unité au-delà, puisqu’elle est au-delà, mais que l’on peut examiner l’articulation telle qu’ici même elle est perçue ; lorsque Kant annule la possibilité métaphysique (d’un discours qui contiendrait universellement ce qui est) il lance néanmoins un para-discours que l’on peut dire ontologique (à la suite de Descartes, qui observe que notre être est « là », (l’ontologie métaphysique ou théologique est peut-être au-delà, on ne sait pas, mais l’ontos est bel et bien ici, de fait) et donc bien effectivement là et donc démontable, si non démontrable) et qui avec hésitation ou décision consiste à poser que puisque c’est ici même que l’articulation se rend réelle, alors elle peut s’expliciter au moins, sinon s’expliquer (mais cela revient au fond presque au même) ; est alors requis de supposer tout ce que cet être, tel que « là », impose. Et ce non en partant dans l’imaginaire nietzschéen ou heideggérien (qui sont justifiés d’en appeler à l’altérité, au réel en tant qu’autre) mais en conservant toute sa tête, pour ainsi dire. Ce que Sartre et Lacan ont très clairement plus qu’amorcé, l’analyse et rien que l’analytique du réel.

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