Le devenir du réellement existant
Il faut donc partir du principe que notre être est au sens strict et limitatif définit par et seulement par cette articulation hors cervelle (et donc tous ses contenus, la physiologie, le langage, le conscient, les autres, etc) vers le réel (lequel n’est pas défini, qui est seulement et n’est que la positon qu’un « réel » hors de nous, existe).
Évidemment notre réalité est l’ensemble de toutes les réalisations humaines, les consistances comme on dit, les choses massives et concrètes, y compris cervelle, conscient, relationnel, humanisations et personnalisations, etc, sur la base d’un être physiologique, nommé un « corps » (dont la qualification n’est pas du tout évidente, comme on le verra).
Mais par-dessus ou en plus de ces réalités, il est cette articulation au réel, soit donc l’arc réflexe qui nait dans la cervelle, vers le réel s’arc-boutant, et lançant un arc de cercle vers un « horizon » indéterminé (qui englobera tous les autres, mais qui positionné en premier ou en dernier, peu importe, garde une partie de la main sur les autres, il est cet horizon dernier inamovible).
Cet arc est ainsi ce qui s’impose par les grecs (puis les chrétiens, puis Descartes) en plus et autrement que la formulation antérieure de l’humanisation (qui utilisé cet arc dans et par et pour une synthèse, au lieu que l’arc vient briser toute synthèse, et bascule, se tend, se supporte de l’analytique ; on nomme analytique la capacité de formuler des intentionnalités qui ne succombent pas aux synthèses, mais maintiennent l’arc (réflexe, boutant et de cercle) de pied en cap en une possible une-fois.
La brisure que cause l’arc de conscience invente par-dessus le langage et le groupe et le corps immédiat et évidemment tout monde particulier ; puisque cet arc forme sa propre élaboration dont l’essence, la forme, le non contenu est son être même ; c’est donc non pas un système d’idées (parmi d’autres systèmes) mais la survenue de notre être en sa structure même qui apparait au centre de l’humain. De sorte que les idées ne sont pas des idées mais des rapports, des rapports en plus ajoutés à n’importe quel monde humain, groupe ou langage ; les universalisations (éthiques, esthétiques, idéels, politiques) se réfèrent non pas à un contenu quelconque ni même électif mais à la structure-même.
C’est ce qui arrive à la pensée qui par Descartes se découvre comme originée en un sujet et par un sujet, ce qui ne nuit pas du tout à l’universel ; le point essentiel est qu’il faut tout conserver ; l’un ne chasse absolument pas l’autre ; le sujet est plus « grand » que la pensée, à l’extensivité de la pensée (cad de la machine intentionnalisatrice qui outrepasse groupe-langage-monde particulier ou immédiateté, cette machine, cette technologie intentionnalisatrice étant fondée par le mécanisme de conscience pure, formelle), à cette extensivité s’ajoute l’intensité du sujet. Autrement dit un sujet qui perdrait l’universel se condamne lui-même à ne plus être, mais il sait également instantanément que l’universel ne lui suffit pas. Les étages s’ajoutent à la construction, et rien ne se retranche.
Aussi est-il peu raisonnable et franchement illogique, de nier ou renier les acquisitions et les possibilités augmentées au fur et à mesure et ne pas voir que c’est le Même, qui se creuse, qui s’articule, qui s’tend ou qui s’intensifie ; le Même-être.
Le problème est d’orchestrer le plus grand jeu possible ; il est admissible de considérer que l‘acquis fondamental est la raison, par exemple, et cela fonctionne, mais cette perspective ne prend en compte la totalité du devenu, on manque une part de ce qui s’est réalisé et on cesse de comprendre. De sorte que philosophiquement il faut retenir la totalité du devenir et faire comme si il ne s’agissait que d’un seul devenir ; à charge de dénicher le concept, cad en fait l’idée qui sera le rapport qui contient tous les rapports.
Évidemment cela exclut que l’on cherche la vérité, parce que la vérité n’est pas un discours tout extérieur qui s’appesantirait sur la réalisation (de où sortirait-il ?), mais la vérité est le devenir lui-même et ce qui devient n’est pas un agencement bigarré mais est un être ; les deux tenants et aboutissants sont serrés l’un et l’autre, les deux extrêmes tiennent sur la même ligne indéfectible. Ce qui implique qu’il faut creuser à même notre-être, à même la structure ; creuser au sens propre ; avancer dans son être, ajouter non seulement des possibilités (ce que tout le devenir montre) mais augmenter son rayon d’activisme.
Ainsi plutôt que de proposer la raison comme devenir (que ce soit la raison objective ou la raison scientifique ou l’idéalisme de l’esprit rationnel ou hyper rationnel, y compris de ce rationalisme critique kantien), il faut amener non pas la raison mais la cohérence ; à charge qu’elle rende compte de toute la réflexivité (qui a eu lieu en politique, esthétique, éthique, idéel ou en cette part spécifique, la philosophie, qui doit réfléchir sur ce mouvement interne à l’humain qui a basculé du côté de l’exposition, l’exhibition de son être-même et non plus qui utilisait cet être en une synthèse, en un monde particulier). De l’esthétique, de la politique ou éthique ou de l’idéel (sin l’on songe aux sciences par rapport à la philosophie), mais aussi de l’invention du sujet ou des mois, la raison peut difficilement rendre compte (en ces derniers cas parce que la raison ne sait pas parler de la liberté pure sans la réduire à un quelconque contenu).
Qu’il existe une telle cohérence signifie que notre-être qui émerge de tous les mondes humains, qui se définit une structure de machine intentionnalisatrice (par les grecs), qui se reprend à nouveau comme structure de sujet (de sujet formel et non de cette ipséité qui fut utilisée par la pensée allemande de l’esprit et de l’idéalisme, idéalisme allemand qui viendra de toute manière buter en et par Husserl sur son Réel de conscience même), qu’il existe une telle cohérence ne peut pas se prédéfinir a priori ; cet être qui se dé-couvre ne se connait pas, absolument pas du tout ; il se-sait. Il est la certitude absolue de son rapport à soi (sinon de rapport il n’en existerait même pas).
De sorte qu’en plus de créer des universalisations (qui valent pour la pensée comme pour l’esthétique ou le politique, etc), une humanisation généralisée et une acculturation (ce qui signifie que c’est une culture universelle, une a-culture mondiale, une culture hors localisation), la survenue de notre être s’explore elle-même ; qu’est-ce que cette articulation au réel et que porte-t-elle ?
Rien de cela n’est écrit, et sont requis aussi bien les descriptions de Plotin, de Descartes ou de Husserl, mais aussi artistes ou poètes, les esthétiques qui touchent au corps même, mystiques ou psychanalystes ; ce qui veut dire que notre-être est une structure qui travaille, qui œuvre multiplement et toujours au plus prés de « ce qui est », de sa potentialité, au point que l’on peut considérer les mois, cette personnalisation, comme des inventions effectivement existantes et qui se réfléchissent, puisque de notre-être on ne peut pas se passer ; il est toujours déjà là (quels que soient les contenus ou les dispositions dans la cervelle).
Lorsqu’elle passe par-dessus les mondes humains et les synthèses, elle aboutit sur le sol-même ; elle tombe sur le monde donné là, mais tel que le « là » (que tente de formuler Heidegger) soit lui-même qualifié comme réel (ou comme étant l’être, qui a donc échappé, depuis au moins Descartes et l’étendue : l’étendue de Descartes comme formulation de l’être est une bombe), comme réel et non pas comme composé (de déterminations). Cette positon du réel (que reprend Kant en l’utilisant dans son criticisme) est depuis le début ce à quoi fait face la philosophie mais puisqu’elle a pour première finalité de réfléchir sur la constitution de notre être (qui est ce qui arrive à l’humain), elle concentre ce réel en tant que l’Etre.
L’Etre est ce qui définit la cohérence ou ce par quoi se veut la cohérence. Notre-être (qui est "ce qui refuse de se soumettre") n’accordera d’être réel qu’à la plus stricte exigence.
(En l’occurrence la pensée intentionnalisatrice, machine à foudroyer analytiquement et à créer intentionnellement, mais ensuite exigence dont toute la puissance se reportera sur l’être-sujet impossible, impossiblement et pourtant vivant).