De la perfection du rapport unique,
le réel en son élévation.
Il s’agit donc de rendre le réel suffisamment bizarre pour qu’il paraisse étrange et que de cette étrangeté apparaisse le mystère. On ne saisira pas ce que l’on est ; on en sera saisi.
Lorsque Lacan renvoie la psychanalyse à l’éthique, c’est de la conduite du sujet par le moi ; ce pauvre, le moi chétif et bricolé, qui a fait ce qu’il a pu avec ce qu’il a reçu ou trouvé, des autres, du passé, de la vie, de son corps, de tout ce que l’on voudra, le moi étant une synthèse souvent hâtive, qui n’est pas au point, malhabile, au fond inefficace, non sous la contrainte « professionnelle » de son humanité, là on y essaie toujours de se soumettre (sans y parvenir comme Houellebecq) mais inefficace quant à sa destination (de même que le Voyage de Céline), et finalement son destin, dont on dit ici qu’elle est le sujet… l’inaccessible. Mais peu importe parce que le sujet est fondamentalement inaccédé. Sinon il serait du monde et donc pas un sujet.
Rappelons que l’on a décliné la structure selon le sujet, l’individu et l’individualité (soit le citoyen communiste et le citoyen libéral, le besoin et le désir), puis le moi (depuis les années 50-60). À chaque fois la réalisation se concrétisant mais, de cela, l’intentionnalité s’enclosant toujours plus dans ce concret (qui était tout à fait nécessaire et inévitable) mais également se perdant, s’enfonçant dans le détail, la vie, le donné, les images. S’enfonçant selon la jouissance du corps, alors que la structure ne promettait que l’insatisfaction et ne reconnaissait pas du tout que dans le monde le réel ou dieu ou le vrai ou l’universel ou donc le sujet puissent se matérialiser, sinon à s’imposer comme garde-fou ou comme transcendance nouménale du phénoménal, comme je sartrien du vécu.
Tout le moi se tient dans la disposition (selon le monde, le vécu, le relationnel ou le corps), tandis que le sujet supervise dans la pré/disposition ; l’appel, le recours, le secours, le virtuellement, la possibilité antérieure qui jamais ne paraît, mais pose tout dans le champ du donné, mais aussi du vécu et du relationnel, du moi et du corps ; tout est en suspend et de ce sus-pend absolument cartésien (c’est par là que tout re-commence en sortant le sujet de la seule pensée, de l’universel, puisque le sujet entretient une bine plus grande cohérence).
Rappelons que le le sujet n’est pas ; il se tient au bout du champ intentionnel sans jamais se montrer ; puisqu’il fait-voir les réalités par les signes qui se tiennent à partir de lui ; de même que l’horizon (qui recule indéfiniment) pose les choses au-devant de nous ; nous ne percevons pas seulement l’horizon, nous nous percevons à partir de l’horizon.
Tout empirisme se trompe lourdement ; on ne peut juger de l’intentionnalité (qui ouvre tous les champs à partir du possible, et donc de l’impossible tout autant) selon le donné ; sinon il deviendrait invraisemblable de parler de quelque intention que ce soit (de ce dont on ne peut parler il faut le taire, résultat on ne parle plus de rien…)
L’horizon est tout aussi bien la suspension ; la suspension est l’arrêt intentionnel ; on sort du « désir » qui semble la marche à suivre depuis toujours, et on se rend compte que non. Il n’y a rien à désirer. Aussi, comme l’océan, le sujet, le je se retire du moi (existentialisme pour nous, ou dépression version douloureuse).
C’est qu’il est énormément plus de possibilités selon le je que selon le moi ; le moi et sa synthèse hâtive, qui rassemble tout ce qu’il a reçu, dans une finalité suffisamment absconse, parce que l’on ne peut pas découvrir une unité dans la multiplicité des réalités. Des universalisations oui, puisque l’intentionnalisation trame les perceptions dans des ensembles de signes et que le signe, qui est rapport, est immédiatement universalisation ; dès que l’on signifie on universalise. Mais une unité non. Ce que Sartre désignait par totalisation, et qui ne peut pas se produire ; il n’y a pas d’unité massive et concrète du donné, puisque le donné est tout entièrement détermination, cad découpage de champs, de réalités ou de perceptions. Il n’y a pas d’unité du divers ; l’unité vient de la forme et la forme des réalités ( de toutes les choses qui sont) est formelle, cad est l’exister (l’être est second par rapport à l’exister), ce que l’on prétend ici, ou, plus évidemment, unité intentionnelle, telle qu’elle se donne pour nous.
S’il existe un présent alors toute la diversité, la multiplicité, la détermination, l’ensemble de la matérialité ne possède structurellement aucune unification, excepté le présent lui-même ; reste à décider, chacun pour soi-même, si on l’entend fonctionnellement ou dimensionnellement (l’existe en ce cas existe comme dimension valant en et par elle-même). Ce que l’on perçoit quand même nettement c’est que l’univers, ce qui est nommé tel, ne peut pas se « résumer » à un noyau ou un être ; il n’y a pas de réalité de la réalité ; il y a la réalité, d’une part et puis le réel, le fait, qu’il soit fonctionnel (le présent a déroulé tout ce qui est), ou dimensionnel (le présent est en lui-même une, et donc La dimension, n’imaginant pas, alors, qu’il ne s’agisse pas de l’unique absolue dimension formelle, laquelle se situe en chaque instant ; en chaque instant nous sommes au Bord de tout ce qui est, et donc déjà dans et par l’Exister ; le Bord du monde, du vécu et du corps nous existons dessus, en équilibre et donc en déséquilibre, puisqu’il devient, pur et brut présent).
Or nous voici, depuis toute cette historicité, profondément marqué par la cohérence, par ex la rationalité, et ce afin que l’attention, l’intention, l’intentionnalité, la conscience puisse suivre mot à mot, signe à signe son déroulé et qu’ainsi elle ne se perde pas ; parce que si elle s’égare c’est que des éléments hétérogènes se glisseraient dans son procédé, dans son processus. On comprend bien qu’il est agréable de se laisser déborder, mais momentanément… parce que si la sortie de rail nous déborde, alors c’est tout entièrement que l’on tourne en rond, ou s’effondre, même si la chute est imperceptible et lente, puisque cette attirance rêvée selon le monde et la vie pourra très bien effilocher l’ensemble des intentionnalités, étant entendu que notre être n’est pas un être mais un tissage et souvent déjà fort décousu si bien que tirer un fil paraît délivrer la pelote et on croit un temps que tel objet va résoudre, dénouer le désir, mais cette libération, imaginée, re/tombe dans le monde et s’y disperse légèrement et tristement ou lourdement et catastrophiquement, abattant au final le moi, et emprisonnant le sujet dans le moi.
Et si la rationalité peut paraître comme représentative particulièrement de la cohérence, en vérité la liberté et le sujet témoignent d’une bien plus grande possibilité, puisqu’il s’agira pour tout sujet de rassembler sous son unité les plus grandes capacités, et spécifiquement non plus seulement ses dispositions mais sa pré/disposition ; formelle, qu’il nommera comme il veut, qu’il découvrira comme signe, œuvre, révolution ou amour, et quantité d’autres possibles, le sujet est le lieu du possible même, de la Possibilité ; et c’est ce sujet qui tente de se montrer, de s’exposer, de se démontrer en philosophie mais c’est aussi cette élévation qui sous-tend la capacité religieuse et c’est elle aussi qui est supposée par toute Œuvre. Etc.
Dit autrement si la rationalité oppose brutalement la représentation explicite au monde, plus loin la liberté, le sujet est cette structure qui entend instancier, faire-exister, la cohérence dimensionnelle selon le réel de la réalité et donc de nouvelles réalités ; la raison prend peut-être son envol au crépuscule, mais la liberté est initiale ; de là que cette structure devra déployer, inventer, créer la continuité du réel, la continuation de la structure et rendre à chaque fois actuelle la cohérence même ; on ne se transforme en et par une œuvre qu’à son contact… de manière générale et parfaitement scandaleuse puisque l’on n’est pas en soi « quelque part » c’est dans l’actualité, le présent, la conversion (à dieu, l’universel, au christique, au sujet, à la révolution, selon les œuvres) que la structure s’active.
Ce qui peut très bien, comme d’habitude, se figurer par ; celui qui croit en moi sera sauvé… Pourquoi ? De où cette fulgurance frappe-t-elle ? Est-ce nominalement (jésus) en qui il faut croire, tel quel ou quiconque se conduit selon ma logique sera sauvé ? Mais dans les deux cas il faut, il est impératif, il est impérieux d’admettre la logique, ou Jésus, de la rendre réelle.
Qu’elle s’active veut dire qu’elle n’existe pas autrement que via la conversion. Il faut ici et maintenant en être saisi. En prendre conscience. Actualiser la plus grande part de votre être étant entendu qu’il ne s’agit pas d’un être (qui se situerait où ?) mais d’un exister, un rapport et un rapport est Actuel. Et que ce rapport est antérieur à tout monde, vécu ou corps, hors la vie (transformant la vie en existence).
C’est ce que signifie qu’il faille se convertir « de son vivant » parce qu’après il sera trop tard, pour ainsi dire. Non seulement donc que l’actualisation de la structure se déroule durant une vie (et transformant celle-ci en existence) mais que cette conversion se saisisse comme actualisation du réel ; de là qu’elle se tienne de plus grand que soi, que le sujet n’existe en vérité qu’à partir de plus grand que soi, plus grand que le moi ; aussi notre amour pour les œuvres est-il in-fini (et seraient-elles de ces œuvres adaptées au moi, au moi du 20éme, le rock ou la pop, qui ont attiré le moi hors du corps, puis de lui-même, le cinéma ou la pub).
Le sujet à la différence du moi ne croit pas que la réalité tourne autour de lui-même, de son moi-même, mais il sait qu’il est un rapport et ne tient que de ce dont il existe en ce rapport. Et un rapport (de par sa nature même de rapport qui ne tient ni dans le départ ni dans le terme mais « entre deux ») nous propulse instantanément dans le réel unique et formel et donc absolu. Aussi dieu ou l’universel ou la liberté ou l’œuvre sur/existent au sens de manifester ici même, ici-bas, ce à partir de quoi cet -ici- naît.
C’est pour cela qu’il y a conversion ou décentrement philosophique ou engouement révolutionnaire ou illumination. C’est, littéralement et dans tous les sens, la seule possibilité pour qu’il vous arrive quelque chose de réel. Le reste c’est tomber vers le bas, ou ça reviendra à cette chute. Tout arc de conscience cherche désespérément à se convertir (et on utilise « convertir » à dessein, afin de bien marquer le scandale que constitue la capacité d’actualiser la fonction ou la dimension de réel). Ce qui se montre par le tomber-amoureux du moi, signe d’une exaltation, qui ne prend que quelque fois puisque son élévation tente une synthèse selon le vécu et le corps, laquelle est si largement impossible puisqu’elle ne stabilise pas sa correspondance ; l’autre conscience, autrui, n’est pas en mesure d’actualiser le je.
Le je est auto-fonctionnel (comme on le verra à propos de Nietzsche, qui révèle ce que Descartes implique).
Car outre l’actualisation absolue, cad formelle, de la structure (qui ne naît que dans et par l’exister, dans un présent, qui se présente comme éternel ou a-temporel ; la vérité comme le christique, le sujet comme l’œuvre prétendent à cette hors-temporalité) il faut insister sur cet autre pan de la Fonction de réel ou la Dimension de réel que l’on ne peut pas passer par l’autre, par autrui, et que le je est seul et sans secours, sans recours. Il n’y a rien dans le monde, en l’humain ni même en son propre vécu qui puisse l’aider à élever sa possibilité ; seul existe véritablement en avant son Intention.
Remarquons ceci ; le christ paraît indiquer, du doigt, autrui, comme garant de ma salvation, mais il ne faut pas se tromper ; ce sera en passant par le je (le sujet et non le moi) ; en passant via le christ ; aimez-vous ‘comme’ je vous ai aimés. Il ne s’agit pas de se livrer aux autres… ou alors, oui, si l’on veut, mais à condition, sous la condition expresse et in/finie que l’on s’y élève, que l’un et l’autre soient élevés.
Une œuvre ou le christique ou Platon ou Rimbaud vous orientent le regard, tournent votre attention, mais ils ne peuvent rien si vous ne vous sauvez pas vous-même ; que la structure de chaque conscience soit un rapport dit parfaitement ce dont il est question, que ce rapport peut seul s’engager lui-même vers sa Possibilité. Si ce rapport dépend d’une relation quelconque, est une formulation irrecevable. Et si Rimbaud vous atteint ou Plotin ou Spinoza ou Bacon c’est que vous vous engagez dans l’adhésion et percevez selon leur intention, vous métamorphosez votre être, qui n’est plus un être, et qui se tient de la fine structure intentionnelle qui se meut via les signes ; parce que ce sont des signes, des rapports qui entrent en rapport.
Or le bouleversement est proportionnel à l’engagement ; et l’engagement est possiblement in/fini. C’est en ce sens que l’intention christique, la volonté cartésienne, le sujet libre kantien, celui de Sartre (ou l’idéal nietzschéen tout autant) indiquent « vers le haut » ou « plus loin », de manière indéterminée. Ce qui paraît designer le futur proche ou lointain, mais en fait non. Il s’agit du proche comme du lointain dans l’instantanéité de la structure, dit autrement dans la Possibilité pure et brute ; ce qui existe comme rapport est déjà-toujours-encore le rapport qu’il existe-tera-tait (sinon il ne serait pas). Lorsque l’on avance que l’on entre dans le rapport lui-même on nomme cela même qui arrive, qui nous arrive (depuis très longtemps et en différentes civilisations) depuis que le sacré, puis surtout, pour nous, le divin (dieu ou la pensée ou le christique), l’universel ou le sujet se sont introduits dans le champ lui-même, lorsque le champ s’est signifié lui-même en lui-même, afin qu’il prenne conscience de la conscience, de son activité en propre (c’est le dieu jaloux), qu’il actualise qu’il existe justement comme rapport ; qui crée des rapports ; c’est la seule version de l’infini que l’on reconnaisse et la seule qui soit compréhensible même si étant rapport il en manque toujours un des bouts...
De sorte que cet infini-là est parfaitement explicite et en même temps effectivement infini, on peut toujours ajouter des rapports aux rapports et au rapport unique ; le rapport unique qui est en lui-même un non-être, ce qui est non pas un néant (qui est « rien du tout ») mais un exister ; et si on pose, suppose un exister alors il est l’exister-même, étant formel il ne peut pas se composer et donc existe formellement ; tout ce qui existe, existe ; il ne peut pas exister deux formes, c’est aussi pour cela que la forme exister est originellement le Un ; le un n’est rien que le rapport qu’il est ; deux est le rapport doublé et ne désigne rien d’autre ; on peut donc tout à fait « compter », puisque toute réalité est déjà toujours le rapport à « soi », quel que soit ce « soi ». Il n’y a donc aucun mystère aux mathématiques ; qui substituent des rapports dans des rapports.
L’infini en tant que rapport est seul réellement infini (l’être, le bien ou le un ne se comprennent qu’ainsi, de même dieu, mais dieu annonce qu’il est cette Intention), puisqu’il suppose la perfectibilité de son ‘être’. Et ‘est cela qui nous fait sortir de tout contenu, autour duquel on se love habituellement, ou que ce soit le groupe ou la communauté, ou autrui ou le tomber-amoureux ou l’image idéale ou idéelle de soi ou de ceci ou cela. La vérité est que si le réel est le rapport, il ne rentre en aucun contenu : aucun.
Et se sauver soi-même, ça n’est pas maîtriser mais admettre la maîtrise en et par la forme pure et brute ; on ne peut la pré-voir, elle surgira intégralement telle quelle. Picasso est tout de go, ou Rembrandt ou Vermeer. Ça s’impose, ça se rend si immédiatement évident qu’il s’agit bien d’instantanéité, et étant un hyper-rapport (dans la visibilité du monde, du vécu ou de la perception) inépuisable en soi, de cette in-finité qui ré-adresse (au sens informatique, si l’on veut) constamment l’arc de conscience entraînant toute la réalité, donnée, et toute la réalisation, humaine ; et ce si vous admettez que l’Autre, le regard instancié sait, voit, comprend, instruit, informe au sens d’in-former (ou autrui dans le tomber-amoureux, c’est bien cet emportement qui est une expropriation de l’intentionnalité qui est jouée, mais autrui, ni vous-même, n’en assurent réellement la puissance, c’est certain) ; ce qui veut dire que le rapport contenu dans les signes (du tableau, du texte, de la Constitution) traverse la réalité et embraie dans votre attention, sous-entendu qu’elle soit libre, libérée.
Nul doute que l’illumination, si elle vous a atteint, rappelera le je, le sujet à lui-même (comme si il était éternellement actuel) ; puisque lors même serait-elle un abandon, elle ne parvient à percevoir que si elle élabore une construction intentionnelle en laquelle l’intentionnel se crée, et se crée à neuf ; étant Actualité.
On n’insistera jamais suffisamment sur le constructivisme Actuel ; c’est une décision, non pas selon le conscient mais selon l’intentionnel, qui crée dans l’instant le rapport ; on ne peut pas ne pas créer le rapport qui sans cela n’existe pas ; n’existe pas… on y retrouve la décision de la foi, de la conversion à l’universelle pensée, de la suspension du sujet (Descartes, Kant, Hegel, Sartre, et à sa manière surgissement du sujet-qui-se-voit lacanien), de la continuelle et continuée révolution ; liberté et égalité étant des règles ontologiques et non pas mondaine, lequel monde tombe, toujours, dans ses propres pièges, pseudo-résolutions, distorsions et satisfactions immédiates et non pas de médiation ; et bien que la fausse historicité veuille nous faire accroire en un état figé, gelé, inerte du cadre général qui puisse légitimer que chacun repose finalement en son corps d’individu, de sorte que via la ’nature humaine’ la jouissance demeure la finalité, immédiate, qui puisse tordre l’intentionnalité, subtilement ou lourdement mais invinciblement, et l’actualité de l’intentionnalité tombe vers le bas, inertie du donné, du vécu et du corps, l’en-soi sartrien, la matérialité de la Chose, désirable, désirée, usant de tout le corps pour fondre et confondre le champ intentionnel et le champ des désirs, des images, de la complétude rêvée, imaginée.
Seul l’articulation, langue-épée de feu, sépare, dans la douleur, certes, mais afin que nous soyons libérés.
Si rien ne vient relever le rapport, l’intentionnalité, le champ intentionnel (un point X, un point-autre), alors le monde qui se présente, partout, le vécu et autrui, le corps et toute perception toute-venue occupent le terrain du champ, viennent prendre la place vide (et formelle, cad absolue), et lors même que l’on part d’une très bonne intention, tout donné pèse de tout son poids et pousse dans la chute, l’abaissement, l’oubli de la possibilité ; c’était une démonstration d’orgueil que de se croire capable de tout relever pour et par le bien (Kant s’en aperçoit tellement qu’il prend soin de situer au-delà du champ, phénoménal et donc seulement vivant, le bien comme Idée régulatrice, et Descartes Dieu comme plus-grand, plus grand que n’importe quoi, puisque tout, la pensée y compris, est posé extérieur à sa Volonté).
Et sans doute aucun pourtant, malgré que je fasse le mal que je ne veux pas et ne fasse pas le bien que je veux (Saint Paul), c’est bien subtilement et avec quelque ruse ontologique que l’on a su, malgré tout, malgré la pesanteur du monde, du vécu, du relationnel, du corps, des désirs, des images, que l’on a su cependant étendre le champ compossible de la liberté et de l’égalité… ou philosophiquement tenir le cap de l’arc de conscience du sujet (qu’il soit dieu, la pensée, l’être, le bien, le un, le christique ou le sujet, la possibilité et le réel),et, subtilité des subtilités, marier le réel (la structure) et les réalités (la vie, les vies, le corps et le champ de perception et d’expression de chacun) en une civilisation dite individuelle, qui s’élabore du seul bâti de ‘sujet’. Cela ne put se rendre réel que de tenir non pas à telle ou telle réalité (qui aurait été bien vite absorbée par le monde et le vécu) mais de se tenir du rapport seul ; de percevoir en somme que le rapport de l’autre est égal au mien et ce abstraitement, cad en l’occurrence structurellement, pour la révolution et de concevoir que le rapport à soi… n’est pas le rapport à soi-même… mais au sujet.
(en quoi la psychanalyse vient pointer et aplanir toute épreuve psychologique et psychique, puisqu’elle renvoie le moi au ‘sujet’, dont on a compris que l’on tenait celui de Lacan, le sujet de l’inconscient, comme strictement l’envers de celui de Sartre ; ils analysent absolument ce qu’il en est de vivre (Lacan, et de souffrir en tant que vivant pris dans le signe, ou donc dans l’arc de conscience) et ce qu’il en est d’exister, dans la décision sartrienne in-finie du sujet-qui-n’est-pas-un-moi).
Puisqu’il s’agit de rapport il n’est pas question d’abstraction, qui emploie des notions, des idées déterminées, mais de concevoir le rapport en et par lui-même, et ceci à partir de chacun, puisque ce rapport n’existe que là, en et par chaque arc de conscience et de plus tout uniment et tout unanimement, qu’il soit unanime, volonté du peuple ou uniment, volonté de chacun, tout fut de cette manière exprimé tel quel et parfaitement ; ce qui existe en tant que rapport atteint dans l’expression, aussi apparemment éthérée soit-elle, une effective, une pure perfection ; bien au-delà même des mathématiques, qui ne la possèdent qu’abstraitement justement).
Ce qui passe entre dieu qui s’adresse à une nation, la pensée qui actualise l’intentionnalisation en tant qu’idées et ce qui se perfectionne ensuite en laissant à chacun, christiquement, selon le sujet cartésien, kantien, selon le citoyen, c’est l’improvisation intentionnelle, étant entendu que certes on observera quantité d’intentionnalités diverses et variées qui pour la plupart tomberont dans le monde, mais la confiance supposée en et par la structure-seule reviendra continuellement replacer la barre au centre, à partir duquel recentrement à nouveau le même sujet (qui lorsqu’il se-sait admet que la perfection n’est pas de ce monde) ou d’autres sujets relanceront les possibles, jusqu’à obtenir la possibilité même.
La vérité ne se dépose pas du tout dans un contenu, une pensée, une œuvre, une Constitution, une mathématisation ; pourquoi et comment l’acte de conscience serait-il enclos dans une détermination, un tableau est un tas de couleurs ; elle réside exclusivement dans l’arc de conscience qui la perçoit.
Et si, lorsque le sujet se-sait, il admet que la perfection n’est pas de ce monde, alors c’est qu’il est entré et se situe dans la structure ; quand bien même l’ignorerait-il (ça n’est pas, comme la philosophie le pensait, du seul ordre de la connaissance ou du conscient) ; il y est entré et ce par quelque moyen, œuvre, illumination, expérience, religiosité, mysticisme, politique, éthique et donc est entré dans la nature même du rapport qu’il existe, et auquel rapport il ne peut pas ne pas avoir affaire (ne serait-ce pour le moi que celui du tomber-amoureux, ou si l’on veut de la « crise d’adolescence » ou de la dépression, etc) ; aucune conscience ne peut ignorer qu’elle existe, quelle que soit cette modalité, qui se dit multiplement puisque la structure n’indique pas le monde mais sa propre altérité formellement absolue (il n’est que le rapport de conscience, et le présent, qui existent formellement). Aussi la réalité n’est pas dans sa détermination parfaite, ni la perfection une sorte de monde amélioré, mais tout autrement « parfaite » et le monde effet de cette perfection au sens réel.
Le créateur ne va pas aimer son œuvre, bien plutôt il va passer à la suivante. Le spectateur tombera peut-être en extase, mais ça ne durera qu’un moment, puisque le foyer n’est pas dans la « chose » ; serait-elle idéalisée ou fétichisée ou objet d’adoration. Du christique il ne reste rien (et explicitement, il s’en va afin-que l’esprit saint entame sa propension) et le « je pense » n’est pas un argument rationnel, ou le noumène libre kantien n’est pas dans le discours qui le désigne, et encore que le sujet inconscient est hors du conscient et même hors de toute atteinte, puisque l’on « fera avec » peut-être, mais on ne le résoudra pas, il est la limite interne à partir de laquelle il y a un moi, qui lui-même ne se saisit que par son sujet inaccessible, qui est au-devant, dans l’activité psychanalytique du divan, il apparaît un instant, qui suffit à déciller, à se-voir et le pli est pris).
Or autre paralogisme absolu, cad description formelle, si le rapport existe et rien que le rapport, celui-ci s’étend sur toute l’existence ; il n’y aura jamais qu’un seul rapport unique selon l’exister. C’est ce rapport que chacun déploie tout au long du temps, ce rapport qui n’est pas selon le temps… Aucun rapport (de soi à (soi) ne peut être pris dans les choses, les vécus, autrui ou les signes ; sauf peut-être cette structure étrange de la jouissance (imaginaire et imaginée) selon qu’on y croit ou non… mais n’y croyant plus, abolissant la source du désir, des désirs, que reste-t-il ? L’affirmation. Et ce de type nietzschéenne ; Nietzsche maniait, on l’a dit, l’auto-affirmation, imposait et durcissait pour ainsi dire la volonté cartésienne comme source, origine, cause de la pensée, de toute intention, de toute représentation.
On verra que l’affirmation du je est-autre ; ce que dit bien Nietzsche, à savoir que la volonté est en moi non pas moi-même, mais cette altérité fondatrice absolument, il convoque l’altérité de la volonté-autre afin de manifester qu’il, le sujet, n’est pas le conscient ni la raison ou la représentation mais se tient antérieurement-à, et ce sur le mode imaginaire (de même que Heidegger, qui, lui, s’aperçoit que l’être est-autre que les étants, y compris autre que la pensée-raison), alors que ces deux modes imaginaires relèvent d’une structure, et peuvent et doivent être intégrés dans une structure plus grande ; à savoir au lieu de demeurer attachées à un seul Nom (Nietzsche) ou un seul peuple (Heidegger), elle est le rouage absolu d’un système formel, celui du réel pur et brut. Qui parle selon tous les peuples (et donc les nations) et tous les noms (chacun).
De sorte que y compris Nietzsche et Heidegger ne zigzaguent pas au hasard mais appartiennent, impérativement, à la structure et l’historicité de la structure. On ne peut pas ne pas être un arc de conscience, et de la sorte éprouver le réel-même, sous diverses formulations.