Devenir de tout (2)
Parole et tribus
Il y eut donc la Parole comme régulation complète de tout ce qui arrivait dans un monde particulier, celui de la tribu ; toute espèce de réalités, de choses, d’êtres qui apparaissaient dans ce monde était pensés ensemble, avec-chacun, dans l’échange surplombant les échanges, les présentations, les identités, et cet échange surplombant est le langage en tant que parlé et donc organisateur ; il était essentiel que la parole soit en elle-même sacrée et absolument conservée. La transmission de la parole ; par la parole ; est l’état de la vérité en ce monde particulier ; est vrai ce que le Groupe connait comme tel. Si un doute ou une incertitude s’immisçait, l’ensemble risquait de se démantibuler.
Les deux réflexivités
Les deux irruptions organisées sont d’une part celle grecque et d’autre part celle chrétienne. La conscience refuse de se laisser faire par le groupe et sa vérité, et invente l’universalité et les universalités (politique, éthique, esthétique, idéel du savoir) ; la compréhension de ce phénomène qui rompt tout précédent, cherche à se définir en pensant l’universel même ; le principe actif qui permet bel et bien, effectivement, de penser les différences du monde dans des séries (idées) se dénomme universel pur. La recherche de cet universel, de même que le développement de la pensée universelle produisent quantité d’idées et épuisent le pensable ; tout est exploité absolument. Tout le pensable est littéralement à notre disposition. Il se heurte à l’impossibilité de mettre à jour l’universel pur (qui est censé préordonner toutes les idées comme les idées « produisent » les choses et les êtres).
La seconde irruption est chrétienne et propose la dernière conscience possible ; elle subsume sous elle toutes les consciences (prises dans un vécu, lequel vécu contient tout ; désirs ou intentions, idées et sociétés, etc) en une seule qui les préorganise mais au sens où par la conscience dernière unique aucune conscience n’est plus esclave (de son vécu, de ses propres contenus, de son immédiateté). Le seigneur (de toutes les consciences qui contiennent tous les vécus qui comportent tout ce qui est rencontrable dans n’importe quel monde) libère, comme il est dit.
Deux époques ; le monde et l’individu
Ces deux époques constituent les deux réflexivités qui manifestent la soudaine prédominance de ce mécanisme de conscience qui décidant de ne plus se laisser faire (par les groupes des mondes particuliers et les vécus des consciences prises, emprisonnées en elles-mêmes)et sont dites réflexives ; elles dépassent les langages (des groupes, langages enchâssés dans des particularités) et les vécus de conscience (limités à tel donné pauvre et sans espoir aucun, qui s »effondrent dans la mort certes mais aussi dans la vie et son horizon faible).
Les deux principes vides ; la vérité et la liberté
En cette réflexivité généralisée, il est clair que le mécanisme de conscience ne peut pas se figer ; il provoque l’afflux de l’universalité (dans le monde s’imposant en structurant les mondes donnés, proposant la vérité comme principe et non plus des vérités comme contenus, contenus toujours limités) et d’autre part cette révolution interne d’acculturation ; il crée une culture absolue au-delà de n’importe quelle culture (jusqu’alors relative à chaque groupe particulier et impose ce qui nous est évident ; que le libre pur est un principe, comme la vérité et qu’il ne dépend pas des contenus, des vécus, des autres). De même l’universalité grecque de son côté vise non plus tel monde, mais le monde unique ; tout comme la conscience dernière attire toutes les consciences divisées en une seule qui emporte n’importe quel vécu, n’importe quel corps, contenu ou intention.
Liberté et vérité comme augmentation de toutes les différences possibles
L’universalité de toute la réflexivité, (elle s’applique indifféremment à toutes les différences) engendre ceci ; une acculturation et une universalité qui crée une quantité phénoménale de différences, de choses, d’êtres, de vécus. Contrairement à ce qui présupposé dans les révoltes intérieures (contre l’universelle acculturation), la réflexivité crée indéfiniment puisqu’elle propose une structure partout et dans tous les cas particuliers, valide et agissante.
Autrement dit la réflexivité (grecque et chrétienne) est un Réel ou met au jour ou commence de manifester une forme qui est, antérieurement (à n’importe quel monde humain), qui vise le monde unique, qui est au-delà de toute conscience prise (vers une conscience indéfinie absolue, qui permet un renvoi constant à zéro, cad en la libération pure et simple).
La définition philosophique de l’être de l’homme
C’est ce Réel, cet être-un qui est exposé cartésiennement (illustrativement, au sens où Descartes exprime, fait apparaitre, présente cet être au plus proche, mais non pas le seul ni totalement) ; c’est un roc, l’os ontologique qui porte toutes les réflexivités et que l’on a nommé spécifiquement ensuite ; conscience.
Et qui s’est réduit ainsi, à partir de la conscience cartésienne (qui se pense comme une entité forte et en tous cas idéalistement posée (tout comme son développement husserlien) à un simple mécanisme ; prendre conscience-de.
C’est ce mécanisme (qui se nomme tel par illustration) qui est le propre même de la philosophie. La réflexivité s’applique où elle se doit, mais la philosophie seule cherche à remonter jusqu’au principe.
Elle formule diversement le fait lui-même de conscience, sous la vérité ou sous la liberté (cet être-autre incompréhensible, comme est incompréhensible qu’il y ait quelque chose plutôt que rien), et ce qui réunit toutes les explorations (qui annule et réaffirme leurs divergences) est la forme réflexive qu’est de a à z l’être de conscience. Entendant par là que la conscience est un être (et non pas un faire valoir d’autre chose) et qu’elle est à ou pour elle-même (quand bien même l’humain s’y refuserait, replié dans ses ourlets).