Saisie instantanée de notre être en sa perfection
Saisie instantanée de la forme libre par elle-même
L’intentionnalité évasive et fuyante
De sorte que question de bonheur ou d’extase on ne sait pas vraiment ce que l’on attend, désire, etc, et pour cause puisque l’on ne veut rien qui soit au monde, nulle part et en aucune manière. Et tandis que l’intentionnalité file naturellement ses fibres et ses flux, embauchant le corps vers une satisfaction supposée, de même l’identité du moi se révèle telle une synthèse jetée là, absurde et bricolée (rien de bien confondant) qui ne peut donc qu’imaginer une résolution, et comme cette imagination passe par la synthèse des intentionnalités (diverses qui peuplent le flux, la perception, la parole, les idées, le relationnel, etc), et que l’intentionnalité étant structurelle ne se fixe en aucune intentionnalité particulière (sinon elle se perd comme vide et apte à « ce qui vient »), le circuit intentionnel se retourne et revient à une supposition d’être, un état-être qui n’existe pas en lequel elle se mélange.
Court-circuit
Pour court-circuiter le circuit, il faut que l’intentionnalité stoppe et gèle son flux en quelques réalités auxquelles elle s’adapte et qu’elle se stabilise dans le monde au dehors ; dans le relationnel, les objets, le statut social, ou les universalités, (mais qui requiert, ces derniers, un niveau d’atteinte suffisamment autre, autre que le vécu immédiat, tels l’éthique, la politique ou l’esthétique ou l’idéel, et qui, universalités, flirtent avec la structure).
En ce cas l’intentionnalité se fixe sur une réalité extérieure ; celle-ci ou celle-là qui la maintiendront à mi-niveau.
L’intentionnalité basse, l’intentionnalité haute et l’intentionnalité mitoyenne
Hors cette stabilité, ce qui inquiète le moi est la finalité indicible de son intentionnalité telle qu’elle s’évase et s’enfuit hors d’elle-même, et s’imagine dans une unification, un « moi-même » doucereux ou extatique. Sentiment vague d’Etre et inutilisable, mais peuplée d’un manque qui n’est pas celui de la structure mais celui de la synthèse dans sa supposition ; si donc la structure s’évase vers la pluralité et la multiplicité (de la perception, du corps, des paroles, des signes, des autres etc), par le bas, elle s’enfuit vers l’indicible de son unité qui n’existe pas puisque ce qui lie tout l’ensemble est cette intentionnalité laquelle étant relation, rapport, ne dispose d’aucun contenu fiable, fixe, figé.
Or l’intentionnalité fonctionne par sa finalité ; toute conscience est conscience de quelque chose ; mais l’intentionnalité en elle-même est la dispersion de tout contenu en d’autres contenus de sorte que pas un seul ne sort vainqueur de ce mélange, sauf que la conscience en sélectionne quelques uns qui font office d’unités (et reste donc l’unité de ces unifications limitées et qui se dit « je suis moi », rien de plus).
La liberté se veut elle-même, purement et simplement
Elle les sélectionne ou en est sélectionnée … puisque formelle elle s’emplit de ce qui advient. Il faut donc qu’elle prenne le pas sur ce qui lui arrive (du monde, du donné, du vécu, des autres, de sa propre expérience, des signes ou de son intégration potentielle dans les universalités d’éthique, de politique, d’esthétique ou d’idéel). Ce qui tombe sous le sens, puisque libre cette liberté ne peut pas ne pas s’acquérir elle-même ; cela n’aurait aucune compréhension qu’elle ait à « être saisie » extérieurement par une autre réalité qu’elle-même ; l’instant de saisie de soi est donc absolument interne à la structure elle-même et non pas commanditée par quoi que ce soit du monde.
La saisie instantanée de la forme libre par elle-même ; l’expérience unique de chacun
L’instant de saisie de soi est évidemment bien plus que seulement l’idée vide de soi-même et comporte même des degrés mais aussi parfois un saut brutal inexplicatif. L’inexplicable est la forme pure telle qu’elle se sait instantanément sans retour possible, et les degrés internes grappillent ceci ou cela de libre pur, mais à l’image, à la ressemblance de cette structure telle qu’en elle-même non mélangée de monde ou de vécu. L’existentiel sartrien, la durée bergsonienne, la surconscience nietzschéenne, et quantité d’autres opérations, procédés, tous structurels, marquent l’advenue incompressible de la structure dans un monde donné vécu qui ne la comporte pas.