Le renouvellement du corps
La question essentielle est donc ; quelle est la réalisation essentielle de notre être ?
(Il est cent manières de se réaliser, c’est évident, on interroge donc spécifiquement la réalisation intégrale de notre être en tant que réfléchissant sa possibilité, mais si cela laisse à chacun la capacité de devenirs, en même temps puisque l’on se saisit de l’essentiel, c’est au travers de l’esthétique, de la politique, de l’humanisation ou de la personnalisation, cet être que l’on retrouvera ; quand bien même serait alors, en cet essentiel, non reconnaissable immédiatement).
Comme vu précédemment, notre-être n’est rien que la fine pointe articulée au réel qu’est la conscience. La conscience n’est rien, sinon ce rapport. Le rapport qui relance la cervelle vers le donné « là », et qui ne comporte rien en tant que contenus. On n’y retrouvera pas l’esprit, ou l’âme, ou l’idéalisme ou le sens ou quelque intériorité ou personnalité ou moi que ce soit. La conscience est un être existant à demi qui prend appui sur n’importe quel ceci ou cela ; elle est ainsi réflexivité au sens premier, elle réfléchit ce qu’elle perçoit. Elle ne contient pas le perçu, qu’il soit chose ou signe, langage ou idée, etc, elle n’est rien que l’articulation. Et ce faisant ce qui est le plus infime et le plus irrégulier, le plus fragile, volatile, vagabond, incertain, est le plus déterminant ; puisque n’étant pas un contenu, elle n’a pas à transporter un tel contenu qu’elle serait, mais il lui suffit d’agir et de provoquer sa structure propre.
Cette articulation est au bout du bout, le corps ; le corps en tant qu’il se déplace à la surface du monde, ou d’un monde humain, ou le corps d’un moi. On sent bine que si l’on dit que la conscience est au bout du bout un corps (et non pas une idée ou une identité ou une personne, etc), on sent bien que la conscience est perdue dans le déplacement de ce corps ; elle s’oriente par le corps parce que dans le monde, c’est tout ce que l’on a. le seul repère qui demeure est le corps ; les images, idées, décisions, autruis, vécus passent, mais le corps demeure.
Il ne serait pas faux de signaler que par l’articulation du corps dans le monde, la conscience bat en brèche la cervelle ; par le corps elle refuse de succomber à l’énorme irréalité toute puissante de la cervelle (qui vit de son propre rêve, se nourrit de sa propre substance, entrainant une partie du langage, du conscient, du moi, de la conscience même). De même par le corps c’est l’universelle règle d’exister.
L’universelle règle d’exister consiste à transmuter le corps. Et tout à fait absolument à modifier le corps de telle sorte qu’il soit pure surface de perception ; de la perception la plus dense et concrète mais aussi la plus subtile et la plus structurante ; l’esthétique, la vraie, est de porter la perception de telle sorte qu’elle soit intellective, sensible, sensationnelle, qu’elle soit idée (et rapport au réel comme ob-jet, objet non évident du tout), de telle sorte qu’en retour le corps soit capable de l’ob-jet ; de l’ob-jet dont on est privé, que l’on peut seulement recueillir en signes, cad dont on peut élaborer non pas telle possession ou telle jouissance ou telle immédiate finalité, mais de l‘ob-jet qui rejaillira comme pur intentionnel, qui permettra, et contient en lui-même la capacité de démultiplier l’intentionnel, de pourvoir à des multitudes de conscience que l’on prendra, que l’on sera, qui deviendront.
Mais par l’esthétique la conscience refuse tout aussi bien de tomber sous les corps du conscient ; c’est non pas le conscient (et la gloriole de se idéaux, fort admirables mais qui pèchent de ne pas suffire à atteindre la conscience ; le conscient s’impose au conscient, mais on ne peut pas convertir, accéder à la conscience même, celle qui perçoit le donné gigantesque, qui lui correspond, qui se calcule abscons dans l’océan des données), mais la conscience qui devient par l’esthétique (de même en leur ordre par l’éthique, la politique, l’idéel, toutes les articulation réflexives universelles, mais aussi par les dérives du moi, folies ou désordres, en un infra comportement qui veut se libérer de, qui est donc, libération, incluse dans l’humanisation et la personnalisation lorsque celles-ci ne s’effondrent pas dans l’immédiateté, dans de pauvres objets ou de pauvres corps).
C’est la conscience, qui n’est plus du tout le corps donné là ou le corps du moi qui le marque de signes et de conscient et d’autruis et de langage, etc, mais qui est le renouvellement du corps par cet influx absurde, inexistant, impossible, qui place, déplace et replace le corps en tant que par lui on accroche aux intentionnels ; non pas à cette œuvre ou cet objet, mais en un ob-jet totalement étrange qui renvoie à.
On comprend bien que l’on ne peut pas atteindre la conscience mais que d’une manière ou d’une autre elle veut s’atteindre ; elle se cherche et étant parfaitement et uniquement active (elle est formelle cad réflexive, réfléchissant un donné), c’est dans l’activisme même qu’elle se saisit, par un bout.
De même de la pensée ou du sujet cartésien on ne peut pas se saisir ; on est saisi. C’est une version tronquée qui caricature la pensée ou le sujet su le modèle du « qui sait ce qu’il fait ». Il suffit de lire les grecs ou Descartes ; on en sait pas du tout où l’on va, ni ce que l’on est (une « chose pensante », qu’est-ce que c’est que ça ? Descartes n’essaie pas même de la définir ; il la montre).
Ce par quoi on en est saisi, c’est le corps. Et ce qui trompe c’est que l’activisme de conscience (de conscience non de conscient) emploie tout ce qu’il trouve à sa portée ; ça n’est pas une immédiateté. Une œuvre est construite, élaborée, en répercussion plurielle aux autres œuvres, en son moment historique, dans la confluence et l’affluence de tout ce qui se présente, dans les perturbations ou conflits du moi, de cette personnalité même, etc, tout ce que l’on voudra ; l‘œuvre conclut (en ouvrant le rejaillissement intentionnel, en le libérant) tout cela. Le corps qui en ressort est le corps travaillé, torturé, découpé, recomposé, son renouvellement, tel qu’il s’acte lui-même.
Ça n’est donc pas un conscient ou une lettre de conduite ou une ordonnance extérieure ; de tels impératifs ne parviennent pas à la conscience en acte, agissante, mais qui comporte ces extériorités. Les sciences sont prises elles-mêmes dans le renouvellement du corps général et de chaque corps individuel. Tout discours est au bout du compte porté dans et vers le corps devenant.
Parce que celui-ci perçoit et ce qui est en intimité incoercible avec la perception est la conscience hors de la cervelle, qui rabat la cervelle vers le donné gigantesque (dont nul discours ne rend compte), et qui, conscience, calcule en percevant. Cette zone est en périphérie, hors de l’orbite, est au bord du monde (du monde connu, identifié en un moi, parlé dans la communication, etc).
Lorsque l’on avance que la conscience est l’articulation qui ne contient rien de la cervelle au donné là, on appuie donc ceci ; que la conscience contient potentiellement et de façon tout à fait externe à son être cependant ce qui se présente, ce qui est perçut, elle réduit par exemple le mot au signe et peut tout à fait percevoir un signe et l’articuler, sans le comprendre consciemment, pour elle le mot est débord une perception visuelle ou auditive. C’est par le corps qu’elle pense, énonce, parle.