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instants philosophie

La découpe du Bord du monde

4 Juillet 2015, 07:49am

Publié par pascal doyelle

« Conscience » est donc ce qui n’apparait jamais dans ce que l’on voit. Pour commencer (sans jamais y parvenir) d’y atteindre, il faut la supposer. Si l’on suppose autre chose que « conscience » on s’égarera ; on la remplacera par quelque fétiche ou facilité ou extrême complexité qui se tordra en tous sens afin de laisser entrevoir le vide originel et en cette logique qui veut à tout prix nommer « conscience » autrement que structurelle, comme on demeure en ce cas dans l’attention en un contenu (la pensée, la raison, dieu ou la nature, le moi ou l’inconscient ou le langage, etc), en toute description qui se représente en ceci ou cela, on aboutira à une impasse, un trou, un néant, un nouménal ou un esprit dialectique, etc.

Et tout cela est très bien. Parce qu’au fur et à mesure de ces approches la conscience-structurelle formule ses approches, les siennes, apprenant peu à peu ce monde çi, et distordant son être propre, sa structure, en fonction des à-coups, des étirements, des lacets qu’elle dessine sur le réel, sur le tableau du réel, antérieur à la réalité.

Autrement dit la conscience de structure est emplie de toutes les causalités que l’on voudra, tous les systèmes, de la cervelle au langage, de l’identité du moi au relationnel, des conditionnements et aliénations de toute sorte, mais elle ne cesse pas d’écrire sur la surface du réel qui existe bien antérieurement à n’importe donné là, donné monde, corps ou systèmes de signes. Le dessin de chaque conscience sur la surface unilatérale du réel, est son dessein en propre, sa finalité, son éthique, sa politique, ses esthétiques, son idéel, sa réflexivité même ; elle est issue de la cervelle, sort de la cervelle et hors de tous ces stockages, ses mémoires, elle est arcboutée au réel. Il n’y a qu’une conscience pour savoir qu’il y a un réel.

C’est ce que découvre, dé-couvre, Descartes, développe Kant, creuse Husserl ; les autres attitudes (Spinoza, Leibniz) (Fichte-Schelling-Hegel)(Heidegger-Sartre-Lacan) tournent autour des trois précis positionnements, trois grandes avancées dans l’intensité de conscience de (soi).

Positions relatives donc à l’interrogation même qui seule ouvre le donné et le donné « là » (cad la réalité et le réel), trois avancées techniques précises et logiques lorsque la logique se plie à examiner « ce qui a réellement lieu ».

Exception faite de Nietzsche, qui prend étrangement la transversale et non pas déplie le un de notre être (en conscience, conscience transcendantale, conscience phénoménologique) mais qui l’existe … Il la prend sur lui, il l’accueille radicalement et suit son exigence ; c’est cette exigence dont il tente de vivre, percevoir, ressentir, se laisse conduire par son extrémisme. Il en est le corps même. Et non l’observateur externe tel que Descartes, Kant ou Husserl. En somme Nietzche est l’interne de l’externe regard ; le dedans sans dedans mais qui s’anime, s’affirme, appuie sur sa faiblesse et son ex-centricité ; empli de l’altérité fondamentale. Il en statue sur l’altérité de cette « volonté » (cad de cette intentionnalité) et dresse la typologie de sa possibilité (la puissance étant la capacité de renvoyer à la plus grande ouverture ou acceptation de ce qui est et de se traduire cette acceptation en réalisation qui assume derechef le réel en s’y incrustant, et non de demeurer en un état « suspendu » et velléitaire, éthéré, non effectivement devenu-réel dans le réel ; il faut en somme doublement accepter le réel).

Ceci étant, dans tous les cas on affronte le gouffre structurel d’un être qui n’a pas d’autre être que le rapport vide et nu qu’il est, sauf que ce rapport il l’ex-siste et qui ne se trouve, rencontre, représente jamais en aucune manière.

Inutile donc de chercher à découvrir comment la cervelle produit une « conscience », ou comment le langage causerait (on se demande comment qu’il y ait « conscience ») ; ou plus exactement tout cela est très utile (c'est incontestable) mais ça ne peut pas remonter au fait pur et brut que « conscience » étant son rapport à (soi), peu importe les causalités qui la produisent ; aucune de ces causes ne lui expliquera à cette « conscience » ce qu’elle fait là, ici même, étant donné que ce rapport à soi se présuppose…mais il se présuppose à vide, pour rien (parce qu’il est l’exister lui-même, et non par défaut ou manque ou coup de déprime ou sexuation impossible ou langage ou cause extérieure quelconque, toutes les causes extérieures sont quelconques en comparaison du gouffre structurel).

Là il faut faire attention ; si l’on dit qu’il se présuppose, ce rapport à (soi) de conscience, ça ne signifie pas qu’il soit son contenu. Sinon il n’existerait pas comme possibilité de tous les contenus. Il se présuppose comme rapport ; le rapport présuppose le rapport qu’il est, ou donc qu’il devient de ce qu’il se présuppose ; et cela tout à fait naturellement ; puisqu’il sort de la cervelle vers le réel, et qu’il (se) réfléchit autant de fois qu’il se rapporte au réel. En ceci aucun contenu ne le satisfera jamais ; tous les contenus sont seconds pour la structure.

Ne la satisfera que le dépliement de ce rapport lui-même ; soit comme configurations ; pensée, dieu-le christ, sujet, altérité ontologique de Nietzsche, Heidegger, Sartre, Lacan ; soit comme figurations (de raison, naturalisme, moi, remplaçant la pensée, dieu et le sujet, mais raison, nature et moi étant réalisés du point de vue du sujet, soit absenté (science et raison) soit ignoré (le moi ignore le sujet qu’il est) soit annulé ou nié (les antiphilosophies, actives ou passives).

Il est clair que raison, naturalité et moi sont absolument impératifs en ceci que pensée, dieu le christ ou le sujet ne sont pas en mesure de pénétrer dans le donné là ; pensée, dieu le christ ou sujet s’occupent du « là » du donné (et non du donné là, du réel et non de la ou des réalités). Mais prendre appui sur la seule raison, naturalité ou moi pour définir le réel est de fait absurde et rend tout, absolument tout incompréhensible et pour le dire dépressif. Ça forme des pensées dépressives. Qui ne mènent qu’à la réalité et négligent le réel ; ce qui est très bien de conduire vers la réalité, mais est profondément douloureux, d’une douleur structurelle gravissime, de nier le réel.

Nier le réel c’est nier la performance indicible et indiscutable qui se réalise depuis que sortant de tout monde particulier affecté à telle ou telle synthèse (de chaque monde humain séparé), on a découvert notre-être et qu’il soit devenu cet-être, observé par l‘externe depuis Descartes (qui littéralement l’expose, l’exhibe, montrant là où s’origine la pensée, et renouvelant la réflexivité, que les grecs avaient conquis en tant que réflexivité systématique des sur-contenus, créés par-dessus le groupe, langage-immédiateté). Nier le réel est d’autant plus étrange comme attitude (c’est une attitude non une position ; une position est un positionnement vis-à-vis du réel, une attitude est un version de ces positionnements, qui eux sont radicaux, à la racine, et non pas des effets seulement de la réflexivité sur la racine qu’est cette structure), que déjà Descartes, Kant et Husserl s’y sont coltinés.

De ne pas percevoir cette restructuration interne à la structure, de croire que Descartes nous entretient seulement d’un nouvel accès à la Vérité, ou que Kant ne dit pas ce qu’il dit (non pas que la raison soit impossible, contrairement à l’entendement, mais qu’il est une description adéquat de toute l’étendue de notre exister transcendantal et que c’est cela, cette description, qui vaut), c’est encore comprendre ou croire comprendre qu’il faut aboutir à la Vérité, sans voir que la vérité à laquelle on s‘est attachée, est celle de l’exposition toute rétroactive sur sa forme pure, de l’architecture fine et sans contenus, (ou dont les contenus sont pris dans les rapports purs et étrnages) de notre conscience structurelle présente dans un monde, que les envolées, élancements de Platon ou de Descartes ou de Nietzsche montrent l’activisme de cette structure ; en bref c’est prendre benoitement ce qu’ils disent pour agent comptant et non pas voir ce qu’ils montrent au travers de leur sur activité créatrice de structure.

Cela revient à dire qu’il n’y a pas de Vérité (sorte de bloc monolithique extérieur), mais qu’il est une introduction à la vérité-qui-est, autrement dit au réel ; ce par quoi le réel avance mais en se sachant comme réel (et non plus fasciné par une production de ce réel qui le symboliserait, le déposerait « là »). On dira qu’alors ce serait aplatir toute la réalité et le réel puisque l’on s’y passe de Vérité (qui apparemment double la réalité), mais en fait cela renvoie la réflexivité dans et comme étant le réel lui-même et la réalité (le donné là, le monde, la détermination) comme étant réfléchie en elle-même, cad Autre.

C’est parce qu’elle est Autre, déjà, en elle-même, que la conscience est Encore une réflexivité dans cette réflexivité … Le réel, et ses réalités, fonctionnent comme ajout sur ajout, le surajout constant est le fait d’exister en considération de l’être, qui n’en est que le dépôt.

C’est donc toute la verticalité de l’exister qui vient couper l’être, le donné, la réalité en tant que le réel est purement et exclusivement actuel, soit donc le présent, et la philosophie consiste à déplier ce Bord du monde.

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