Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
instants philosophie

L’arc d’exister

7 Novembre 2015, 10:58am

Publié par pascal doyelle

La philosophie est donc la discipline qui se charge de rendre compte de ce qui est arrivé à l’humanisation (son impossibilité à renouer avec des mondes clos, avec l’unification en un groupe-langage-monde localisé) et la grande rupture qui se dresse, dresse une barrière infranchissable, est précisément ce qui inquiètera au plus extrême toute notre réalité.

Les grecs tentent d’apprivoiser le donné là, et le là du donné (l’être comme position formelle abstraite, comme formule), mais la pensée ne suffit pas à saisir l’être articulé et pur mouvement que nous sommes ; une plus grande précision s’impose qui puisse capter l’ampleur de l’altérité qui surgit hors de tous les mondes clos, et comme restructuration de l’attention à exister ; le christique est ce redoublement qui consiste à se percevoir selon un Point-Autre.

Dans l’arc de conscience il est impossible de se saisir de sa performance ; l’arc impose une racine qui se crée dans le mouvement même de son exister ; et l’arc bouté se produit sur le réel, ce qui veut dire sur le présent.

Sans aucun doute la philosophie attachée strictement à discerner ce qui surgissait hors de tout groupe-langage-monde immédiat (et donc hors du corps), a cru être en mesure de définir cette articulation comme si il s’agissait d’un être ; ce faisant elle a créé à chaque fois un archi, hyper, méta contenu (soit donc l’archi des grecs, l’hyper des chrétiens, le méta de Descartes et suivants, jusqu’à Husserl en passant par Kant et Hegel). Il est clair que ce contenu à chaque fois est distordu puisqu’il doit recevoir la structure qui est purement formelle ; ce qui signifie n’est que et rien que rapport et non pas stabilisation en quelque contenu que ce soit ; de ceci que les supra contenus (comme on dirait supra conducteurs) sont intégralement toujours traversés par leur supposée unification et que la pensée, l’être, le un, dieu ou le christ ou le sujet se constituent non pas comme clôture mais comme division et s’imposent comme opérateurs de distinctions, de distinctions en plus.

Puisque nous existons bien en aval de cette opérativité formelle, nous considérons comme contraintes ces constructions internes à la forme ; mais dans le creux de leur historicité les (pseudos) unifications furent l’intervention du Un diviseur et séparateur ; de brutales altérités qui s’utilisèrent à partir de la découverte de notre être structurel de conscience actuelle articulée au présent. La pensée grecque, le christique, le sujet sont des diviseurs absolus (cad formels, de brutes formules archi, hyper et méta actives).

De fait puisque c’est cette structure qui sort du monde clos, et lance l’arc de cercle vers le réel (d’un réel non qualifiable par un contenu), il faut user de stratagèmes, d’une pensée retorse, qui répercute le mouvement lui-même ; puisque c’est un rapport, il est impossible de le figer ; la pensée, les idées, l’idée des idées, le moteur, le un, dieu ou le christ, le sujet ne sont pas des objets décrits là au-devant mais via cette description (unique à plusieurs entrées)ils se réintroduisent et ce mouvement de description permet à chaque conscience qui y pénètre de se réintroduire elle-même, de ré-actualiser sa structure ; de là que les grecs demandent la performance hors de soi (par la pensée), le christ la conversion et le sujet la suspension de son être (au profit de son Exister, qui durera jusqu’à Sartre et même Lacan, via Kant et le sujet transcendantal et Husserl et l’épochè, y compris la reconduction de la phénoménologie hégélienne).

Notre être articulé hors de soi, vers le réel, est le pur et brut mouvement, rapport, et ce qu’il nomme dès le début absolu ou éternité ou infini est en fait l’altérité dressée dans l’instanciation du Un, de la forme du présent qui réclame ici même que tout soit appelé. Le Un est la forme et la forme est le présent.

Si l’on prend le problème à son terme on devra donc imposer ceci ; l’exister ici même s’est décidé comme forme agissante, dont le donné, la ou les réalités sont les effets ; tout le donné est produit du seul exister, toutes les choses sont des mémoires des présents, ou plus exactement du seul et unique présent ; et notre être lorsqu’il sort de sa gangue monde-langage-communauté instancie un renouvellement toujours constamment instantané (étant entendu que dans l’instant tout ce qui fut revient et doit être réorchestré). L’actualisation de notre être, très étrange, qui rompt toute la réalité, sa propre réalité, son corps, son immédiateté, ses mondes, son vécu, est indéfiniment ré actualisable ; même pour un moi, une personnalisation, un vécu, cette réarticulation menace toujours et constamment ; toute conscience se tient sur le Bord, littéralement, du monde, du donné, du vécu, et sur le Bord du corps.

C’est donc la forme qui prédomine et ce non seulement en notre être (que Descartes en posant « là », sur l’étendue, transforme en cet-être, méritant ainsi qu’il soit méta, « après lui-même »), mais dans la réalité même, le monde ; le présent est la réflexivité interne-externe de la réalité ; la réalité se réfléchit, se renvoie hors d’elle-même. Et ceci au plus intégral degré ; ça n’est pas seulement que le présent relance la réalité, c’est que le présent est le seul réel et produit la réalité.

Tout est question de technologie ; la structure de conscience est une technologie inventé par le donné là et plus exactement le « là » du donné, aussi pour comprendre ce que « conscience » signifie faut-il se plier à la compréhension technique de la torsion de notre être, de la pointe de cet-être que nous sommes ou dont nous sommes l’effet ; la structure de conscience qui nait dans la communauté-langage-monde localisé et immédiat, prend le pas sur la masse des données et réorchestre à partir de la forme arcbouté au présent.

C’est ainsi dans l’arc d’exister pur et brut que l’arc de conscience s’est branché, arcbouté, et par lequel il surexiste.

Et ce qui fut produit à partir de cette rupture n’est pas un défaut, un manque, une négativité, un néant mais lorsque la cadence de la structure de conscience se calcule au plus près du rythme du réel, comme présent ici même.

Commenter cet article