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instants philosophie

L’altérité comme règle de ce qui est

7 Juillet 2018, 12:11pm

Publié par pascal doyelle

On a donc extrait de la réalité la forme exacte du réel ; et la forme exacte du réel s’est donnée pour nous comme dieu, la pensée (l’être, l’idée, le un), le sujet (Descartes jusqu’à Hegel). C’est de cette manière, par ce moyens, ces représentations non seulement complexes mais distordues que la structure a pu apparaitre dans le monde et être perçue comme représentation vrillée (il faut se convertir pour dieu, par le christique mais aussi selon la pensée et l’universel ou opérer ce méta retour, nouveau tour sur soi cartésien, pour regarder, percevoir le sujet présupposé).Le tout est une affaire de perception (les idées platoniciennes montrent ce que le langage commun ne dispense pas) et Sartre et Lacan avance dans ce qui ne se voit pas autrement.

Après l’acquisition métahistorique du sujet, comme révolution (et dont la seule révolution à peu près exacte est celle qui se fixe la liberté-égalité-fraternité et non pas celles qui privilégient la liberté ou l’égalité, il faut qu’il existe un dynamisme liberté-égalité, sinon aucune fraternité et aucun sens à quoi que ce soit ; l’égalité se perd dans l’universel abstrait (ou le besoin) et la liberté s’égare dans la noirceur de l’ego (ou les désirs indéfinis),

après cette acquisition de la révolution (contrairement à Hegel ce qui se réalise ce n’est pas la raison en chacun mais la liberté de chacun en tant que la liberté offre une bien plus grande cohérence potentielle que la seule raison universaliste, serait-elle l’esprit),

après cette acquisition donc il s’est imposé une idéologie au sens fort ; dieu est remplacé par la naturalité (ou la réalité), la pensée par la raison (et son impossibilité sujet abstrait-objet abstrait) et le sujet par le moi (ou d’abord l’humanisation universelle révolutionnaire puis sa réflexivité de structure ; la personnalisation ; il n’est d’humanisation que si chacun est appelé).

Cette idéologie aurait voulu que se produise un idéal ; que le monde soit idéal ; que les besoins soient satisfaits et que les désirs soient exhaussés ; qu’il y ait un bonheur et une réalisation humaine, humanisée, humanisante, respectueuse et aussi élevée que possible. Mais le hiatus entre toute conscience et le réel ou la réalité est tel que seuls dieu, la pensée ou l’ancien sujet (cartésien, kantien, hégélien) pouvaient assumer une stratégie telle qu’elle soit équivalente à la puissance de la rupture qu’est l’ontologique.Or la naturalité (et le principe de toute objectivité ; que le donné seul explique le donné), la raison et le moi humain sont incapables de gérer la tension insupportable qu'instancie la rupture ontologique conscience/réel

Aussi a-t-on développé une pensée de cette altérité  soit imaginairement, soit analytiquement ; imaginairement Kierkegaard ou Nietzsche ou Heidegger (etc, il est évidement des tas de passages et des quantités d’expérimentateurs) et analytiquement de Husserl à Lacan, en passant par Sartre.

Explorer à vif (N et H) ou en suspension méta réflexive (Husserl, Sartre, Lacan) cette rupture interne au réel réclame dans tous les cas une douleur ou incompréhension ou désorientation ou annihilation ou inhumanité, surhumanité ou une externalité du regard, absolument (le regard d’une cruauté sans limite, dont le prototype est celui de l’ancien dieu,  et que le christique est venu réinstancié comme appelant et non plus comme seulement exigeant, produisant une frustration absolue, et créant un ressentiment dissolvant toute intentionnalité ; tandis que l'appel est le miroir tendu qui pardonne). Dénommons la rupture et de ce qu’elle engendre en nous  comme l'activisme du sur-divin ; dont le prototype n’est pas seulement la pensée divinisée grecque mais aussi, strictement parlant, le christique ; qui se signe lui-même comme surdivin et absolue totale prévision de tout ce qui sera (dans les siècles suivants).

Il est bien clair que sans doute aucun le glissement de dieu, la pensée, le sujet vers la naturalité, la raison, le moi humain, qui aurait du se garder dans l’archi-structure ontologique précédente, c’est littéralement pris les pieds dans le tapis ; on a créé un désir non pas infini mais indéfini et mort né, qui permit de réaliser quantité de projets mais qui ne pouvait en aucun cas se réguler lui-même ; notre facilité c’est retournée contre nous-mêmes ; on a cru gérer (et on ne parle même pas de créer, d’organiser, d’élever, d’élaborer le structurel mais de seulement le gérer), on a cru gérer la structure avec les moyens réduits non ontologiques (et que le donné seul explique le donné et que le besoin ou les désirs sont notre être et que nous sommes des corps-langage, des mois psychologiques, de la sociologie, de l'économisme comme idéologie du corps, de la satisfaction induite du corps seul) ; et c’est plein de découvertes et de réalités et réalisations, de projets réalisés, mais le réel, ce qui veut dire non pas ceci ou cela mais le réel en tant que rupture, en tant que le réel est intrinsèquement et rien que rupture (il n’est pas la rupture de quelque chose, tout quelque chose nait et de par la rupture comme structure), le réel ne peut pas être introduit dans la conscience d’un sujet qui est un moi … dans la conscience qui se prend pour un moi et le moi s'en mord les doigts, il se déchiquette, se liquéfie.

Elle doit se saisir comme sujet ; or elle ne peut pas "se saisir" comme sujet ; on est saisi, par dieu, par la vérité et la pensée ou par le sujet comme structure réelle (c’est ce qui arrive aux existentiels qui perçoivent d’un seul coup et le réel et leur position sur le réel, totalement explosés par l’altérité ou Nietzsche par la Volonté Autre ou Heidegger par l’Etre Autre, c’est aussi ce qui arrive au psychanalysé, etc).

De là donc que tout le structurel soit à l’étroit dans ce raccourcissement de l’intentionnalité qu’est l’idéologie réaliste de la naturalité-raison-moi humain. Que les mois deviennent fous, ou malheureux ou dépressifs ou borderline ou angoissés ou désespérés (le moi invente quantité de versions de lui-même pour s’en sortir de ce cauchemar sans ontologie, Nietzsche et Heidegger essaient de réintroduire l’ontologie sous la formulation inhumaine ou surhumaine, le regard existentiel est profondément cruel, etc, et les images sont en masse produites et reproduites afin de motiver, mobiliser les sujets en les faisant passer à leurs propres yeux, pour des mois ; attendant le bonheur ou la réussite ou la réalisation).

Et néanmoins au travers de tous ces égarements, erreurs, divisions, devenirs déroutants, idéaux ou absurdités, c’est la même structure (de conscience) qui expérimente et qui expérimente là où elle est, là où elle existe, ou plus exactement elle est finalement parvenue à dessiner, de par ces pérégrinations mêmes, et à cartographier, par ses déplacements, et sous couvert de dieu, de la pensée, du sujet mais aussi du naturalisme, de la raison et du moi humain, sa propre position sur la surface du réel. C’était le but. Dont tout le reste fut moyens.

Le but mais non la finalité (on ignore ce qu'est la finalité, on tente de la reconstruire à partir de l'analysable des ici et maintenant) ; ces positions qui dessinent le Bord du monde, du donné, du vécu (relationnel entre autre, y compris les échanges les plus économiques), le corps (quant à la jouissance, cad la jouissance impossible) ne pouvaient absolument être accédés sans que l’on s’y investisse ; c’est en tant que « soi » ou que (soi) que l’on peut percevoir les Bords afférant aux positionnements possibles actualisés ; autrement dit en clair il faut percevoir Descartes ou Nietzsche ou Lacan ou le christique ou Platon pour que commence de se détourer en nous la position du réel.

La position qu’un réel il y a, est quasiment immédiate et peut même frapper toute la structure ; comme les existentiels en ressortaient entièrement déroutés de leur vision de l’existence brut ou comme les révolutionnaires furent saisis de l’extase d’universalisation, partagée par des millions d’individus, si l’on y songe, au 19éme et du 20éme, sans parler du 18éme, ou comme Rimbaud fut brisé par la puissance de sa voyance de rassembler en une fois (et quelques feuillets) toute l’expérience réelle et potentielle. Les ex-stases sont réellement et effectivement agissantes : de fait.

Et donc même si l’on se contente de vivre du moi que l’on est, tout moi est une personnalisation, ouvrée, œuvrée à partir de l’acquisition historique fondamentale de l’universalisation révolutionnaire (de la liberté-égalité), est une invention (et c’est en cela qu’elle est si difficile et égarée et qui s’agite dans l’incompréhension puisqu’atteint par le structurel qui mésinterprète via le naturalisme ou le dit réalisme, la psychologie). Le moi est une invention et non pas un état ou une identité à dérouler bêtement, et cette invention n'est pas sa fantaisie mais son accès à la vérité, à la réalité et à l'horreur très souvent ; le moi est assujetti à la vérité et au réel, sinon il se rêvasse. De toute manière c'est ce que l'on fera, ce que l'on fait ; on se morcelle afin de trouver (non pas "se" trouver, ce qui ne veut quasi rien dire, mais trouver).

 Nous sommes pris dans la structure, laquelle est mouvement, mais non pas mouvement naturaliste ou énergie ou détermination ; ce qui est mouvement est réflexif, ce qui est dit « mouvement »  ne se produit pas sans la réflexion qui est littéralement réflection, image dans le miroir et miroir lui-même, qui renvoie une perception dans le champ perceptif afin que la structure de cette perception se modifie. C’est bien pour cela que l’on a créé les esthétiques ou les poétiques ou récits, et que par ailleurs les mois s’emplissent la perception d’images et de narrations. 

Lorsque l’on se tenait encore du saisissement, par dieu, la pensée, le sujet, puis la naturalité, la raison et le moi humain, les intentionnalisations trouvaient leur unité, leur unification par laquelle elles étaient en mesure, puisque supposant le point lointain, de réguler leurs mouvements proches (la révolution ou le bonheur servaient d'horizons par ex, dans l'idéologie réaliste).

Mais il en va tout autrement depuis que l’altérité s’est imposée par-dessous le un ; il est devenu impossible de réunifier ce que la clairvoyance de l’intentionnalité splittée, divisée, a séparé. Parce que dès lors le réel se tient de la dispersion de la réalité et qu’il n’est une réalité que dispersée. La pensée croyait possible de synthétiser les données en idées et les idées en système et le système suspendu à un principe en lui-même (qui s’auto-expliquait et permettait outre l’unité assurée, d’assurer à son tour toute l’intentionnalité et d’offrir une vision organisée du monde dans laquelle organisation l’action, l’activité, la décision humaine pouvait se couler). Mais la pensée se suppose et se construit sur elle-même, de rassembler tous les éléments ; elle ne peut pas garder hors d’elle-même une unité cachée ; elle peut suspendre le monde et les vécus à partir de dieu, mais elle ne pénètre pas dieu ; elle peut supposer l’esprit universel qui pense le monde et l’historicité mais à moins d’admettre que l’esprit se justifie de par soi (ce qui occulte son être, impossible) elle ne peut pas, peut plus s’introduire en l’esprit ; elle est pensée par l’esprit et de cela s’échappe à elle-même.

Donc toutes les pistes métaphysiques nous échappèrent (or pourtant toutes ces pistes élaborées ont permises de déployer toute l’intentionnalisation et tous les systèmes et les perceptions possibles, faisant varier la nature même du champ perceptif et nous amenant à percevoir considérablement plus à chaque fois).

Descartes en ce sens   re-pose le même problème mais sur une autre base ; de sorte que l’on change intégralement de régime ; de l’extensivité universelle grecque et de l’intensité ponctuelle du christique qui nous crée comme point-image du point-unique, Descartes, lui, pense méta.

Il pense méta en ceci qu’il tient soudainement son être comme un là planté dans l’étendue du « là » du monde. Horizontalité du monde veut dire horizontalité de l’être, de tout ce qui est, dans la verticalité de l’exister, cad du sujet ; Descartes occupe déjà une formulation tout à fait différente. Pour les grecs l’être (que seule nous accorde la pensée) emportait notre pensée et le monde. Pour le christique le point-unique (un-seul qui survit et nous perçoit et de la perception duquel nous renaissons, littéralement). Pour Descartes ce qu’il opère c’est la description (qu’il nous enjoint expressément de recueillir en acte, de faire nôtre), la description forcément in vivo, dans les Méditations et par la méditation, puisqu’il s’agit de jeter le tourniquet ; regardez, dit-il, comme le réel se tord sur lui-même et existe de cette torsion même.

Au lieu de contempler l’être ou d’aimer le christique, on est, on devient la pointe tournante par laquelle le réel se produit. La pointe sur laquelle repose et se meut tout ce qui est. On voit le mouvement, on est le mouvement et on comprend le mouvement du mouvement ; ceci parce que cesse l’obsession d’un être-chose (qui ne parvenait jamais à se clore) ou d’un regard autre qui nous crée (et c’est absolument certain, mais qui se tient de et par cette distance même et reporte sa saisie au-delà, bien au-delà, or on existe ici), et que se concrétise alors par Descartes la possibilité qu’ici-même dans l’existence apparaisse l’exister, brut. Tellement brut qu’il faudra de Kant à Lacan pour élaborer une théorie, une pensée, une vision de ce mouvement du mouvement, de cette articulation en laquelle on perçoit le réel se produire et créer les réalités (ou les pensées ou les champs de perception).

L’activité de dieu ou de l’être (ou du système d’idées ou du un) nous en tenait éloigné ; mais l’activisme cartésien nous montre que le centre est ici même et qu’il est possible au prix du plus grand effort très-étrange de mettre au jour le mécanisme du réel ; puisque cela se passe, se crée ici et maintenant ; ce que dieu et le un initiaient déjà et que l’on comprend alors mille fois mieux au fur et à mesure des révélations, des grecs à Lacan en passant par toute cette historicité de l’approfondissement et de la transparence du réel (comme articulation interne à lui-même) ; on ne contredit pas les élaborations qui eurent lieu, on déploie ces dernières des re-tours, des nouveaux tours opérés dans l’exister, qui permettent, ces tours, de relire et relier à nouveau, ce qui veut dire dans l’existence, de chaque sujet, portée au plus extensif grec et intensif christique et méta cartésien et suivants ; rappelons que « sujet » ne signifie pas l’individualité, mais que l’individualité se tient elle-même, comme effet, d’une structure plus réelle, antérieure, et encore plus individuée, encore plus cohérente, encore plus nue et stricte et d'une cohérence effroyablement autre. La structure-sujet que ce soit celle des arcs de conscience (qui sont des tensions, non closes) ou celle du présent comme méta structure qui cause, crée, engendre des re-tours, la structure-sujet est le réel ; elle l'ex-siste.

Si donc Descartes ramène non pas la pensée (qui était métaphysique) à cette ontologie (de ce qui s’articule ici même comme mouvement) c’est qu’il nous devient possible, puisque tout est ici, de recoller le réel ; non plus en supposant un réel un ou dieu ou pensée ou idée, qui détenaient dans leur éloignement l'unité, mais ici même un réel articulé agissant et dont l’activisme nous est, de fait, accessible ; signifiant ceci que le regard, l’attention, la conscience intentionnelle que l’on porte à cette conscience intentionnelle, étant en elle-même réflection en plus de réflexion, est à elle-même son propre champ d’investigation. Ce qui revient à une capacité de non-être ; Sartre elle est ce qu’elle n’est pas et n’est pas ce qu’elle est, puisqu’elle se tient par devers, antérieurement, comme altérité et elle se tient comme altérité parce que tout ce qui est, est-autre ; un arc de conscience est déjà autre que lui-même ; de même le présent rend tout ce qui est absolument Autre et c’est bien pour cela, parce qu’il y a altérité, qu’il existe une réalité.

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