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instants philosophie

Signifiant et liberté

22 Mai 2021, 09:19am

Publié par pascal doyelle

La philosophie est la discipline qui se charge de comprendre ce qui est arrivé à l’espèce humaine autour de la méditerranée.

Il nous est venu que nous ne possédons pas immédiatement de monde tel que donné ; que l’on n’est pas maya ou égyptien. Et qu’à l’inverse nous produisons les contenus de cette représentation, qui ne sont donc pas tel ce monde maya donné et partagé dans une communauté via sa parole, ses échanges, ses rituels.

Il y eut ainsi un blanc, un vide, une forme sans rien ; dieu, l’être (l’idée du Bien, la pensée de la pensée, le un) ou le christ (qui se signale de ceci qu’il est parti, il n’est plus « là » dans ce monde mais s’est éloigné, dans le lointain possible). Ce qui distingue la différence entre le sacré (une partie du monde ou de la temporalité est réservé) du divin (qui existe en-dehors). Dieu, la pensée, le sujet sont donc des formes structurelles brutes.

Soit donc pour résumer ; l’intention unique et formelle (dieu), l’intentionnalisation (qui se nomme elle-même idée, puis système d’idées, d’intentionnalisations), et l’intentionnalité de chacun (le christique ; en chaque corps vivant se développe on ne sait quoi, le divin mais incarné, le vide mais agissant).

Trois formes qui formulent ce par quoi, ou comment, nous inventons des mondes, des contenus de par cette structure. Structure désignée comme intention ou volonté selon dieu, la raison (intentionnalisation) ou vérité selon les grecs, et l’intention et la liberté cette fois forcément individuelle par le christique.

(C’est pour cela que la « liberté » n’approuve que l’individualité, il n’y a pas de liberté pour un groupe, une indépendance oui mais pas de liberté. De même que la vérité implique la liberté, il n’est que l’individualité qui puisse accéder à l’objectivité, sans en passer par une idéologie).

La structure a commencé dès lors de s’incruster dans le monde, la vie vécue, le relationnel, la perception : partout.

Puisque formulée, exprimée, elle est entrée sous son propre champ et tout s’est accéléré. Le principe de l’intention, de la vérité, de la liberté augmente la pluralité des intentionnalisations possibles. Connaissant l’agissement lui-même nous avons pu l’appliquer en tout et partout.

La philosophie élabore donc ce qui dans l’humanité s’est soudainement produit ; que la structure de conscience passe sur le devant de la scène qui jusqu’alors produisait chaque monde qui se prêtait comme vrai. Et la question se pose immédiatement ; si nous ne recevons pas la représentation en tant que monde donné, mais qu’il faut en construire, consciemment, le reflet, comment procéder ? Par la raison, ou par la représentation organisée qui ne s’appuyant plus sur celle du groupe natif revient à l’individualité ; en tant que la communication et la transmission (entre générations) s’effectuaient jusqu’alors dans la communauté (de perception et de représentation), dès lors il est requis que chacun soit en mesure de penser et surtout il sera question de percevoir dans le donné là immédiat et se presse donc sous nos yeux la perception brute, qui prévaut aussi bien pour la pensée que pour la raison plus tard, et la science enfin ; sorti de tout monde clos, le donné tel que là s’impose.

La pensée grecque donne à voir le donné là du monde (le « là » de l’être) tout comme le christique commence d’initier la vie vécue, qu’il hausse au rang d’universalité ; chacun a sa propre vie (peu importe les rôles et les castes, votre moi ou vos désirs, tout est subsumé sous la désignation du « je suis » et je vais mourir ; soit donc la mise en forme du segment naissance-mort (et tout ce qui se déroule au dedans), sous-entendu que chacun, quel que soit son vécu, en ait la conscience, en est la conscience ; même la vie est sous la condition de l’avoir (avoir une vie) tandis que l’être est du côté de « ce qui perçoit » et est autre, autrement.

Pareillement lors de l’apparition, dans le champ, du sujet, du je pense ou du sujet kantien ou hégélien, tout se déroule à l’extérieur et la structure ontologique se fait pressante puisque recevant sa propre ambition ou capacité ou son propre devenir ; et s’ajoute, à tout ce que l’on est déjà, la possibilité de devenir selon la structure, selon le structurel.

Ce qui n’est pas sans conséquence puisque dans l’histoire cela impliquera que chacun est non seulement le paysan qu’il est mais le citoyen à tout autre semblable, et que cette orientation « méta », qui vient en plus et qui s’ajoute vient modifier, peu à peu ou rapidement peu importe, la totalité de la manifestation ; si la structure de seconde et secrète passe sur le devant la scène, elle transforme le déroulé de toutes les scènes du monde ou de toutes les scénettes de la vie ; l’introduction de la structure dans la réalité est un foudroiement. Non seulement de par les objets qui se font montre (dieu, la pensée, le sujet) mais parce que c’est la structure intentionnelle, le champ intentionnel lui-même, et donc tout ce qui apparaît et l’apparescence même qui est atteinte ; il s’agira d’être plus rigoureux, autant idéellement qu’existentiellement et relationnellement, et de produire de nouvelles distinctions d’intentionnalisations, y compris ua cours de la vie ; éthique ou politique, idéel ou technique, notamment sous la désignation de l’invention, et donc acculturation générale.

Il est clair que le 20éme eut lui aussi comme tous les siècles, depuis l’invention par l’historicité, son lot de déploiements de tous les possibles, puisque ce qui se systématise c’est justement que s’impose la capacité de se situer et de replacer constamment le possible brut à la source de la réalité.

Ce que tentent également les mois qui aimeraient disposer de leur choix non seulement de vie mais de psyché ; se remodeler de telle sorte que l’on puisse se coordonner au mieux voire autrement ; modifier son identité, se psychanalyser au sens large puisque le principe de modification de tout est acquis comme règle ; et c’est tout aussi bien ce que l’on recherche dans la mass médiatisation, la représentation de la réalité ; qu’elle soit idéale, comme Hollywood ou cathartique lorsque les difficultés ou impossibilités ou dégradations ou la noirceur sont manifestement exposés, dans tous les cas grossissant le trait. Tout comme nous sommes passés d’un certain réalisme idéal à une irréalité généralisée, et plus important encore d’une vision ou d’un consensus accepté et accessible à un dissensus né de l’inacceptation (de soi, de sa propre vie, des autres, quels qu’ils soient, de l’ordre social ou sociétal) ou de l’inaccessibilité (d’un centre de pouvoir, obscur, occulte, abstrait, idéologie larvée ou donc d’un devenir complotiste non seulement des quelques-uns mais de l’ensemble de toutes les instances, de la finance aux gouvernants, supposément corrompus, probablement à juste titre).

Cette désintégration est profondément mentale (dans la liaison et donc la déliaison esprit et corps, représentation et vécu, idée et émotion) et de surcroît intentionnelle ; ce qui veut dire que l’on ne peut plus lier certaines intentionnalités à certaines autres qui échappent de ce fait à notre conscience, quelque chose (de plus en plus incommensurable) glisse hors du monde, et rejoint effectivement les ténèbres.

Un système, une systématique intentionnelle doit retomber sur ses pieds et former une totalisation (qui n’est plus un tout comme autrefois mais au moins un minimum d’assurance, de base). Raison pour laquelle, entre autres, il y eut démocratie ; au vu et au su de chaque sujet. Lorsque l’intention s’égare l’unité (intentionnelle, littéralement, relativement à l’intention) se dégrade en densités et les densités sont les immédiatetés. Ce qui veut dire que la même charge de structure de conscience va s’appesantir ; elle ne prendra plus le chemin vers le haut, mais vers le bas ; et tandis que l’élévation autorise une subtilité (elle use de signes et rend accessible l’intentionnalisation complexe, qui demande elle-même un renforcement de l’unité interne du je, non spécialement du moi mais du je), à l’inverse la dégradation s’enfonce dans la massivité.

Mais tout ceci fut préparé par le phénomène lui-même de représentation ; ce qui est exhibé sur l’écran (au sens large) est toujours plus beau … plus désirable, que l’obtention de l’objet ou du projet ou de l’identité ; aussi l’arc de conscience retombe constamment, qui s’est confié à ‘limage, à autrui, au monde, à la vie, dans la perte, et, lors même qu’il n’y a pas catastrophe, se rend compte que « ça n’est pas ça ».

Parce que rien dans le monde ne correspond à notre être qui n’est pas un être mais une structure.

Rappelons le processus de base ; une conscience crée un champ intentionnel, qui attrape quantité de perceptions via quantité de signes, lesquels sont combinables évidemment, et c’est donc toujours à partir du bout du champ, son Bord, que l’on intentionnalise et conséquemment que l’on perçoit ; aussi la philosophie ou la religion ou tout langage partent du bout du champ vers la proximité (et non l’inverse). Ce sont les « idées générales » ou les liaisons universelles qui comptent, qui organisent les proximités, les immédiatetés. Qui n’apparaissent que via se grand détour. Le monde mais aussi le vécu ou le corps ne surgissent que dans le tissage intentionnel qui doit se tenir.

C’est la menée du structurel tel qu’il s’instancie dans le réel et au plus proche de chacun puisque chacun, qui dispose d’un moi, ou d’une vie vécue, d’un relationnel, d’une entreprise, d’un projet, d’une ambition, d’un idéal (le bonheur est une idée neuve en Europe), d’une quantité de récits (invention du roman, poétiques, esthétiques) cette menée du structurel qui tire entièrement le monde.

De même la technique ; les moyens de productions n’y suffisent pas (à ce titre le communisme organisait la production, mais n’intégrant pas les vies individuelles, aussi les désirs que les entreprises il devait s’essouffler), et les moyens de production ont pour finalité l’inflation du monde de chacun, l’énormité de l’individualisation, des objets qui deviennent des signes et les signes des images ; une ribambelle de richesses.

C’est que le problème est toujours le même et unique ; comment organiser l’intentionnalité lorsque celle-ci n’est plus liée dans un groupe par une représentation commune mythique ou sacrée ou rituelle ou dans tous les cas admise et apprise par cœur et que dans cette absence, dans ce retrait chacun doit élaborer son être, et produire quantité de représentations et qui, chacune, soit à peu prés réelle, réaliste, ou raisonnable ou rationnelle (pour la science et les techniques ou le droit et la Constitution des sociétés) ?

Le grand manque consiste en ceci que si effectivement fut élaboré l’encadrement général (le sujet comme structure mais aussi comme jugement et décision de soi, d’orientation de sa propre vie, la coordination sur la liberté et l’égalité, le bien commun et la volonté générale, etc), il n’empêche que les finalités de ce monde, nouveau, de cet encadrement renouvelé par l’histoire, de la finalité des vies et du sens de l’individualité, de l’individualisation, ne sont pas du tout exprimées. Il existe un cadre, général, et tout le reste vendra comme remplissage ; ainsi la Constitution délimite la société civile et les vies vécues, les objets et les techniques.

Comme elle est reléguée à cette mise en forme, la société civile s’imposera et débordera, jusqu’à absorber l’universalité, et de fait le moi énormisé mangera le je. Et le moi trouvera cela absolurent normal, tout à fait sensé, et même hyper essentiel puisque c’est, idéalement, de sa vie en propre dont il s’agit ; il ne peut pas, le moi, concevoir qu’une dimension ajoutée seule le délivre, dénoue son intentionnalisation vécue. Cette conscience est la sienne, la conscience de Pierre ; Pierre prononce synthétiquement le signifiant majeur ; le je n’y a aucune place, sinon comme fonction d’une identité ; laquelle n’est pas même ce signifiant « Pierre » et que donc celui-ci, le moi, est pris dans un réseau de signifiants donnés, l’inconscient, tenu par l’autre, par un autre acte de conscience, qui n’est pas forcément autrui ni les autres (mais éventuellement oui) mais tenu par l’Autre qu’impose la ligne des signifiants, qui évidemment n’existent pas sans conscience.

De là qu’il existe toujours pour le moi une conscience supposée ; qui s’impose par exemple comme images de sa vie, idéalisée, représentée (les images le voient, lui). Et ce pour une bonne raison ; c’est que comme on a dit le bout du champ intentionnel de conscience re-vient vers le je ; qui se situe toujours dans la visibilité ; le moi est Vu avant qu’il ne se voit lui-même, et ce lui-même perçu vient de l’extérieur, par quoi il est scindé, splitté, divisé, autre que lui-même, tentant constamment de se recoudre, via des objets. Il dévore la visibilité, les objets (à moins que le sacré ne vienne borner cette série indéfinie, ou que le divin le marque d’un signifiant tout à fait autre, qui permet de transformer le signifiant et le regard, de les fixer sans les déterminer ; dieu, l’universel, le sujet (ou le christique qui n’est pas là dans le monde et donc ne peut pas ressembler au monde ou à un objet) repèrent le réel mais n’importent pas une fixité immédiate (ils sont formels et non déterminés).

Le moi veut donc fixer la structure (le signifiant ou le regard) dans une déterminité ; ce qui est impossible et à terme le déprime (outre les désordres constitutifs si largement partagés) ou dès le début le rend fou. Et l’oblige à remplacer continuellement le signifiant par un autre (traitant même les objets comme des signes, ce qui est absurde, c’est un monde et une vie délirante) ; puisque son être n’est pas un être (de satisfaction) mais un mouvement (d’insatisfaction absolue, cad formelle). Nous sommes des êtres d’insatisfaction, et donc nous ne sommes pas des êtres, mais autrement.

De même le signifiant est certes prégnant, mais un signifiant n’existe que par et dans un regard, une intentionnalité (et non pas suspendu dans les airs), c’est donc le regard (la question ; qui regarde?) qui explicite ce que le « signifiant » est.

Le seul moyen de devenir, ça ne sera pas du monde mais de la structure elle-même ; par un saut. Qui fut effectué quantité de fois par quantité de sujets ; des esthétiques à la révolution, de la foi à la pensée, ou plus habituellement par le tomber-amoureux du moi. Beaucoup de variations donc puisque c’est une structure qui peut s’incarner diversement sans rien perdre de son être qui n’en est pas un et ne peut pas se coaguler au monde, au relationnel, au vécu. Le christique l’annonce dès le début ; il n’y a que lui, le christ, pour prendre votre douleur, votre égarement, réguler votre délire, il est non pas le signifiant maître, mais le signifiant non-maître, celui qui révèle que personne ni rien ne contrôle le signifiant, la pensée, le sujet, sinon Le Sujet qui ne se montre pas, n’étant absolument pas du monde. De même le sujet cartésien ou celui Kantien, qui se situent sur un autre-plan, ou l’esprit hégélien qui est n’est pas en soi mais la récollection de tous les signifiants ; le savoir est ce qui fait-voir tout ce qui est pensé, mais ne s’expose pas lui-même dans la monstration ; le pour-soi néantisant sartrien n’est-il pas non-visible ?

Et de la sorte ceci est fondamental. Que chacun jusqu’alors pouvait si aisément transformer le regard, le signifiant en un point concentré et délibératif absolument (dieu, la pensée et l’universel et la révolution, le sujet et en creux du moi le je). Sous-entendu ; il n’y a pas de libération à proprement parler (sinon relative) dans le moi, ni même l’humain, ni dans l’histoire ; seul un point autre absolument externe nous libère. C’est seulement une fois acquis ce point externe qu’il engendrera ses effets. Dieu, la pensée et l’universel, le sujet créèrent cent mille effets effectivement réels, dénouant le signifiant par en haut (il ne peut être atteint et agissant que dans l’élévation). On n’est pas libre sans abandonner toutes les pesanteurs.

Dit autrement lorsqu’il se passe ou prétend ignorer le transcendant (sous quelque forme que ce soit) aucun moi-même ne peut de par soi assumer son regard ou le signifiant ; il y a de quoi, formellement, se rendre fou ; une conscience ne peut se valider elle-même, non seulement elle tendra à admettre n’importe quoi, cad n’importe quelle intentionnalité ou intention (ce qui veut dire aussi bien perception que désir, mais également fantasme au sens d’illusion quant à la réalité, sombrant dans l’irréalisme ; il peut bien se raccrocher à quantité d’objets qui lui paraissent simuler le réel, mais qui, étant de la densité, physique, matérielle l’enfonceront plus encore dans la croyance en l’immédiateté (jugeant le plus souvent non réels dieu, la pensée et l’universel, le sujet et le réel même). La structure nous ouvre le réel et la réalité, et on croit, une fois atteints, que l’on peut refermer la porte, mais c’est faux. Nous avons un corps (que nous ne sommes pas), et ce à partir d’un point-autre.

 

Luc 14 : 26

Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut être mon disciple.

 

Ce qui ne veut pas dire qu’il faille renoncer à tout, mais que le point d’acception est tel, et alors seulement le reste comptera par ses effets. Sinon nous ne demeurons qu’informés en tant qu’effets d’effets, non pas instruits par le Pli lui-même causant de réels plis seconds mais replis illusionnés au-dedans des plis seconds et sans effets sinon ceux du monde. Ce qui répète la détermination du monde mais ne remontant pas antérieurement au monde, rien de nouveau ne naît structurellement. La révolution est un pli structurel ayant de réels effets de structure. Le remplacement d’un tyran par un autre, non. Le devenir d’un moi non, l’existence du je en ce moi, oui.

De même que le signifiant pur (dieu, l’universel, le sujet, le réel) ne recoudront pas le moi

(qui est en lui-même de fait scindé, perçu du dehors, ce qui est catastrophique pour un vivant qui s’éprouve dans un milieu, dont il est le centre non conscient, ce qui ne veut pas dire du tout idiot ou dépourvu du sentiment de soi, puisque c’est son unité de vivant mobile, mais qui ne se perçoit pas à partir d’un horizon ; la scission n’arrive pas à un moi déjà là, c’est de cette scission qu’un moi existe, et supprimer la déchirure ce serait annuler le moi),

les trois statuts s’ajouteront au moi ; il obtiendra au minimum un espace et un temps et donc la possibilité de détermination en plus, née de cet ajout de structure, qui consiste évidemment en un saut ontologique, en une actualisation du statut, pour ainsi dire, une mise à jour qui embraie sur l’agissement lui-même ; et qui ne laissera pas intact ce que l’on est, refluant ce que l’on est dans le passé, et par là se mesure également votre capacité, quoi que vous choisissiez, d’investir l’arc de conscience en tant que renouvellement ; désignation de dieu, naissance à la pensée et l’universel, baptême christique ou cogito de différentes formes, épiphanies esthétiques ou extases poétiques ou encore évidence existentielle que « l’exister existe ». Qu’il existe une colonne dressée du présent qui restructure instantanément ou dimensionnement ce qui apparaît, la manifestation.

Une œuvre, esthétique, vous rend soudainement la perception sous telle et telle formulation. S’impose un instant qui remodèle votre réalité, à partir du Bord qu’est le réel soudainement introduit selon son angle dans le cercle de votre réalité habituelle, connue, perçu d’un autre-regard, ordonné selon la ligne écrite de vos signifiants.

La structure est ce qui décale le donné et le vécu, le corps et la représentation, le groupe ou le langage, etc. Qu’un tel décalage soit à l’origine de toute inventivité, toute création ; puisque pour le sujet dit libre, celui qui invoque la liberté en son nom propre (dont il substitue le signifiant par un autre et qu’il confie son énergie hors de lui-même, dans une extase, poétique ou révolutionnaire, bref selon ce que l’on crée), pour ce sujet il n’existe pas de phrase toute faite, mais la liberté des signes. Or les signes ne restent pas des signifiants mais portent plus haut et plus loin ; le plus grand éloignement étant, évidemment (peu importe d’y croire ou non), celui du christ ; le divin qui fut ici même (il faut bien mesurer l’immensité ontologique de ce que tout cela implique), le divin qui a existé et existé comme corps humain vivant, est parti. Le lointain dont il est question est et restera celui-là ; l’éloignement in-fini du divin et donc notre délaissement, mais un abandon qui n’est pas refermé, puisque les signes demeurent ; la vigueur et la rigueur des signes imposent leur absolue finalité ; ce sont les signes du divin ou les effets réels de la structure qui seront recherchés, sous condition de tenir le point in-finiment lointain. Ça n’existe que de ne pas être (du monde, mais aussi de ne pas être de la vie vécue, du corps ou du relationnel, des réalisations humaines ni des œuvres, puisque les œuvres ne se contemplent pas ; elles créent la conscience qu’elles requièrent).

Rappelons que la liberté ne consiste pas tant à choisir entre noir et blanc, mais à inventer (ne consiste pas à trouver des raisons, mais à les créer, à créer universellement, puisqu’antérieurement à la pensée on ne savait pas qu’elle existait, ou qu’antérieurement à la liberté-égalité tout cela paraissait impossible voire impensable). Et relativement à ce problème de la liberté, réinventer les conditions même de tout choix, relire à neuf et autrement la même situation ; modifiant les conditions initiales on modifie les possibilités de résolution, y compris les résolutions qui n’étaient pas du tout données dans l’antérieure situation, n’étaient pas perceptibles et parfois même pas existantes, ni préexistantes sous quelque forme ; on invente ou réinvente la situation. Toute situation est déjà prise dans une représentation, déjà signes, et ce sont ces signes dont on comprendra autour de la méditerranée que l’on peut la réactualiser. Tel monde ou telle société humaine n’était instruite, informée en aucun adn ou en aucun milieu (le même milieu aboutissant à quantité de sociétés ou civilisations différentes, et de toute manière chaque configuration de monde créant un champ spécifique est relative, au sens qu’elle croit ou veut discerner, toujours originale). Ainsi la «capacité de choix » est une sous-catégorie du processus et procédé général d’invention.

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