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instants philosophie

Le déploiement et la chute

6 Mai 2023, 09:04am

Publié par pascal doyelle

Il y a un être, qui n’est pas un être, et qui ne réside pas dans le monde, mais sur le Bord du monde ; à savoir qui naît de son propre effort et de ce fait dans le présent ; dans le présent il s’actualise ; puisqu’il existe en tant que rapport et qu’un rapport est en acte, ou pas. Et donc dépend de l’actualisation de son acte.

Cet être, l’arc de conscience de (soi), n’existe, n’apparaît que de se percevoir ; il dit je ou il dit dieu ou pensée ou réel. Et de manière générale il se signifie ; lors même que sa représentation serait le groupe lui-même.

Les choses et les êtres sont réels, mais ils l’ignorent. Pour le savoir, que l’on est réel, il faut se Voir à partir de l’horizon ; non pas saisir qu’il existe un horizon mais se voir à-partir-de, à partir de cet horizon ; c’est parce que l’on se perçoit à partir de l’horizon que, par ailleurs, l’on sait qu’il y a un horizon, ou que l’on sait que l’on sait ou que l’on a conscience de, plus loin, (soi) ; la connaissance est relative à un arc qui n’est pas seulement connaissance mais manifestation ; d’un signe, un mot ou un trait ou une couleur ou une loi, il manifeste et fait exister, à ses yeux et dans le fait même de cette exhibition, un réel, cad un possible ; parce que signifier ça n’est pas seulement se couler dans un donné là, mais bien que ce signe crée un réel, perçu, qui n’y était pas ; le signe est spécifiquement adapté à cette exhibition du possible, qui fouille ou étend la perception, mais bien plus crée cette perception ; et au final une œuvre ou une règle de droit ou un concept font voir un possible, aussi toute découpe, par des signifiants, ajoute à la réalité. C’est pour cela que dès que l’on nomme on crée une possibilité (qui ne préexistait pas), et que l’on ne cesse pas de produire du neuf. Tout le temps.

C’est bien pour cela que l’on ne tombe jamais d’accord ; depuis que la structure a pris le devant de la scène, les contenus se situent au second plan. Remarquons que, cependant, ça n’a pas empêché du tout, que nous ayons créé un cadre général des libertés, de chacun en tant que libre ; ou donc il existe un organisationnel qui se donne à lui-même un cadre objectif et même hyper objectif puisqu’il permet l’existence et le déploiement de toute subjectivité (pourvu que ce développement ne nuise pas à quelque subjectivité que ce soit, ne contredise pas l’originelle capacité de chacun, la source du possible même). De plus ce cadre absolu, ce qui veut dire formel, que l’on a nommé « démocratie » mais qui ne tient pas limitativement dans un débat démocratique (bien que réel et effectif), mais du libre jeu de tous et de chacun, dans le respect de l’un par l’autre et dans le respect de tous ; de l’intérêt commun, général, de la volonté générale, de l’organisation et ce d’après les principes de liberté Et d’égalité, ce qui cause évidemment de difficiles problématiques, quant à la mise en place d’une coordination de chacun et de tous et quant à la redistribution d’une solidarité, sans laquelle l’ensemble resterait abstrait ; ce cadre formel donc ne consiste pas en une raison ou rationalité, un « ordre » défini on ne sait comment, mais bien en le jugement, la liberté et les capacités de chacun et bien plus encore du créé. Du créé de chacun.

On remarquera de plus que ce cadre général des libertés (bien assuré dans une constitutionnalité et des institutions, qui fonctionnent selon diverses variations dans le monde) ne privilégie aucun sens sinon l’assurance de cette liberté et les moyens de leur déploiement ; aussi le sens (de la vie) est-il ramené, ce qui pose problème, à ce réalisme de toutes les vies vécues, et à ce naturalisme, vitalisme, qui prît la représentation générale, universelle des « désirs ». Supposément il existerait une « nature humaine » qui se dirige essentiellement vers la satisfaction et tenant d’une finalité dans et pour le « bonheur », le progrès, la libération des nécessités et, surprise, le laisser-aller de tous les désirs, soit donc ce que l’on a nommé le règne de toutes les intentionnalités, de tous les projets humains et humanisés et humanisateurs, ce qui signifie projets universel de personnalisation(s).

On considère de manière générale que toute l’expérimentation est acquise au fur et à mesure, sans s’arrêter aux divergences ni même aux contradictions (entre les idées ou les systèmes ou les périodes de l’historicité globale), puisque « le-réel » est admis comme « rapport ». Ainsi dieu, la pensée, le sujet ou le réel situe ledit rapport à chaque fois et il est intérieur, interne à l’idée même de « rapport » qu’il ne soit en aucun contenu de départ ou aucun contenu acquis, puisqu’il est non ceci ou cela, mais le mouvement lui-même ; et ce d’autant plus que malgré toutes les divergences, il existe globalement une « rationalité » ou plus véritablement et plus largement une forme de « conscience de soi » tout à fait admise et même propagée ; durant des siècles par la littérature et même auparavant encore plus avant par le christianisme et au bord de l’antiquité par ces « soucis de soi » qui apparurent, de manière indéniable, et y compris par la pensée qui ne pense qu’individuée. Les esthétiques et les poétiques pourraient, outre leurs finalités spécifiques, être situées comme procédés ou procédures d’embrayages en tous sens possibles de cette individualisation. Que dire alors des mass et micro médiatisations du 19éme et 20éme et 21éme ?

Ce qui implique dans tous les cas un ressenti de soi absolument approfondi et finalement très étrange, totalement implicatif, et littéralement, une épreuve, pour chacun.

Ou donc une « démocratie » (ou ce que l’on entend par là et qui est probablement plus étendu que le seul concept de démocratie politique) repose avant tout sur des individualités ayant reçu en héritage une très forte « individualisation ». Une intensification de ce ‘rapport à soi ‘ en quoi chacun consiste, en quoi nous consistons, et ce dans un rapport à l’autre soi, qui précisément nous sortant de la seule liberté (solipsiste) a dès le début introduit cette individualité par le christique immédiatement lié à autrui.

Il n’est ici aucun doute que depuis le début, cad dieu, d’il y a 3500 ans, on parvient très précisément à situer le réel et son articulation. Parce que cette articulation dépouillée de tel ou tel monde, ancien, cyclique, qui enfermait dans une représentation parce que le langage constituait le Trésor même, ce qu’il ne faut pas perdre et doit être répété très rigoureusement entre les vivants et entre les générations (et les vivants et les morts) – rigueur répétitive qui assure la survie, ni plus ni moins, du groupe, lequel est la vérité, fait office de véridicité -

cette articulation, libérée, déploie son possible en propre ; dieu, la pensée (le monde donné là, l’être), le christique (le corps de chacun/dans ce monde donné là unique qui reprend toute la pensée, esthétiques, etc, grecques), le sujet (cartésien jusque Lacan, l’accès au sujet par le je), le réel (la révolution et l’intentionnalité totale, le « là » de l’existence/exister).

Cette articulation qui vient-sur-le-devant de la scène, qui se représente donc, et qui, se représentant, commence d’influer (le christianisme par ex, ou l’esprit de « révolution » en France ou les années soixante) d’influer puis d’agir, de décider, d’organiser ; et ce bien qu’il sache et ne sache pas à la fois ce qu’il veut, comme les créateurs qui suivront, comme les révolutionnaires qui inventent au fur et à mesure, et parfois avec déchaînement de violence, comme on « veut » soudainement tomber-amoureux (le veut-on ? Qui veut alors? L’autre côté du rapport, que l’on ne voit pas mais qui nous voit).

L’articulation en conscience, en rapport donc, acte de fait y compris les mathématiques ; le « sujet » est la plus grande cohérence possible, et donc les contient toutes.

Cette articulation donc devient son propre chemin et commence de structurer et s’impose en fait comme sortie de tout monde cyclique (ou en équilibre, comme les royautés dépendant de la justesse du roi), mais également et bien plus crée qu’il y ait « historicité » et l’ensemble de l’historicité, de toute subjectivité, et de toutes les objectivités, puisqu’alors chacun devient possiblement et de fait littéralement la capacité des possibles ; qui sont Créés de, par et pour l’individualité même ; de l’individualité ne veut pas dire du solipsisme, mais de l’ensemble des intentionnalités, y compris du relationnel, de l’humanisation qui est de fait originellement et significativement la source de la réalisation, de la réal-isation, lors même que l’égoïsme puis l’égocentrisme (soit donc respectivement le psychologique puis le psychique) se déployèrent très tardivement. Psychologique puis psychique, et psychique puisque le basculement se démocratise, justement, aux années soixante, et qu’il va chercher le pulsionnel dans les corps eux-mêmes.

Évidemment cette réal-isation (c’est pour cela que l’on y insiste) est profondément une blessure (d’abord un enthousiasme puis une blessure) de cette humanisation même, qui nourrira l’esprit révolutionnaire, mais aussi la blessure atteignant chacun dans sa vie vécue elle-même, dont, généralement, on ne se remet pas ; de là que le psychisme vint à déborder le psychologique, le fantasme la volonté, la pulsion l’intentionnel. Le fantasmatique (l’image) ne peut pas combler la coupure du signifiant dans un corps-vivant ; il faut que cette coupure même soit élaborée et non pas une couture, une soudure parce qu’une chose déterminée (objets ou images ni même autrui) ne peut pas remplacer une structure intentionnelle. Ni autrui parce que l’alter ego est en miroir… tel une image encore, et en rivalité de plus (Sartre et Lacan).

Et que la réal-isation de tous les projets humains (dans le temps même de leur réussite, tellement avérée, de fait) est aussi un égarement, puisque tout étant vécu, éprouvé, effectivement ou fantasmatiquement, il ne reste que le « rien », le vide, ou si l’on préfère la forme structurelle de (soi). Et cet étrange désespoir (qui nous revient de la réussite même de toutes les performances subjectives ou objectives ; en ce que « ça n’est pas ça ») peut conduire dans d’obscures dérives, et l’envahissement de la noirceur, de ténèbres, de la terreur, de l’inhumanité de l’humain ou de l’inhumanité de cet univers ; et il y a peu, dans le même temps Descartes prononce le je et Pascal le moi (que le silence des espaces infinis effraie). Les versions et variantes noires et, parfois, délirantes (ou destructrices) en profusion.

Ce qui veut dire que l’ampleur de notre être ne tient pas à une satisfaction ou insatisfaction (qui seraient des parties de monde ou de vie ou de corps, et qui sont fantasmées joliment le plus souvent, heureusement, ou horriblement dans la confrontation), et doit être repris dans le réel d’une structure qui développe cette architecture de l’intentionnalité, cette architecture de la séparation tenue comme vraie, réelle et originelle ; il existe une réalité parce que le réel est un processus de distinction.

On évoquera les névroses, psychoses, perversions diverses et variées, borderlines et dépressions, autant de « moyens », autant de feuilletages de l’unité (ou la désunité) psychologique et psychique du moi, et en somme d’inventions, prolifiques, du moi, de cheminements du moi dans son a-finalité structurelle (seul le je découvre des finalités structurelles, dieu, pensée, sujet, réel et toutes les réal-isations, dans les différents domaines, esthétiques, politiques, etc).

Le moi peut évidemment par ailleurs parvenir à une régulation, une régularité, un équilibre, une humanisation et une personnalisation satisfaisante, et probablement une sagesse tout à fait humaniste. Mais le fantasme, le fantasmatique (personnel ou représentatif généralement) est « de la détermination » (puisqu’il prétend que les finalités sont en direction du monde, de la vie, du corps) et en tant que détermination il s’effiloche, se mélange, se disperse, s’oublie, se mutile, parce qu’il ne peut pas se renouveler vers le encore-plus-haut, mais tombe, systématiquement. Et que dit-on du dieu unique un-tout-autre ; qu’il ne délaisse pas ceux qu’il a choisi, « son bras ne faiblit pas ». Ou si l’on préfère ; comme le je cartésien ne passe pas dans la connaissance (n’étant pas métaphysique mais ontologique, cad réel) ce sujet ne s’épuise pas dans un « connu » et ne subit pas la dégradation du déterminé.

De tout ce qui arrive de déprimant au moi, mass et micro médiatisations ont tôt fait de le mener à partir de son fantasme (de vie vécue, de corps, d’image, de désir ou de projet, très jolis) à leur transmutation en im-monde, ou le langage et la parole en communication, ou l’imaginaire en dérision, ou l’objet en échange et donc en dette.

Le fantasme en lui-même est très bien, puisqu’il rend possible les désirs qui poussent à échapper au fantasme absolu de la jouissance horrible (cad hallucinée qui confond celui qui désire et l’objet de désir, jusqu’à la disparition, cad la fin du rapport entre l’un et l’autre), mais qui dérive bientôt en agitation, agitation jusqu’à l’épuisement des mois (qui n’existent qu’en tant que tension, qui terminent en dépression justement, outre qu’ils, ces mois, épuisent le monde et termine tout ce qui existe, tout ce qui vit).

Que le moi cherche à résoudre l’équation par le moyen même dont il se crée, alors qu’évidemment il devrait outrepasser son être (qui est un empilement ou au mieux un bricolage, qui désirerait un sens unificateur), et que ce dépassement, étant constitutivement libre et créé, ne peut venir que de sa propre intuition de structure ; laquelle ne se fonde pas dans l’être (empilement psychologique ou, version marchande, accumulation d’objets, ou psychique fantasmatique, ou concept de raison ou connaissance objective ou imaginaire subjectif)

mais outrepassement qui se décide dans l’actualité de l’existence, l’exister, l’actualité qui se crée, la conversion ; à ce que l’on veut qui soit élevé, vers le haut ; on découvre la poésie ou dieu, la pensée et l’universel, le sujet et le réel qui ne sont pas « du-monde », parce qu’ils sont le mouvement qui entoure le monde, la vie vécue et le corps. C’est bien pour cela qu’ils y inter-viennent. On ne sait de « où » puisqu’ils ne sont pas dans le monde, et ni dans la vie vécue et pas plus dans le corps mais dans leur perception à partir du dehors, dans la significativité à partir du tout-au-bout, à partir du possible-même.

Il est un effondrement intérieur de la structure intentionnelle parce que effondrement de l’ambition qui entendait réaliser et réussir le monde humain / le bonheur de la vie vécue / la plénitude du corps.

Et c’est un effondrement que l’interprétation selon la réussite, le bonheur et la plénitude on ne peut pas comprendre et auquel effondrement on ne peut pas remédier par ces moyens-là.

Dit autrement ; nous sommes incapables de relever les challenges écologiques parce que nous fonctionnons selon le fantasme et non pas la raison ; nous méconnaissons totalement les enjeux du réel, en l’occurrence de la survie éventuelle tout comme Lacan révèle comme la rationalité n’est qu’un espace limité dans la puissance imaginaire, ou comme le conscient est noyé dans l’inconscient. Le signifiant ordonné est débordé par l’océan de signifiants (la suite désordonné, l’agitation des signifiants, qui nous perdent).

Sauf de remonter à ce qui rend possible les signifiants ; l’intentionnalité, soit l’arc de conscience.

Qui est dans l’antériorité du monde, du vécu et du corps, soit donc dans le présent (le présent étant le Bord du monde).

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