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instants philosophie

Nous ne manquons de rien

6 Mai 2011, 20:35pm

Publié par zwardoz

Que notre être soit intentionnel signifie que l’ensemble de nos facultés aboutissent ou prennent pied par et via l’intentionnalité ; soit donc via l’attention à « ce qui se passe » ; et ce au-dessus et en plus de « ce que l’on sait déjà », de toute mémorisation, mais aussi en tant que cette attention se saisit d’elle-même et se permet de s’orienter, de réorienter, voir de désorienter « ce qu’elle est-déjà ».

Ça ne signifie pas que l’intention annule le monde ; elle vient en plus de tout ce qui est déjà. Toujours en plus de quoi que ce soit, qui existe ; aussi sommes-nous constamment au bord de l’inexistence ; au bord du monde. Et à la limite de notre propre identité. Excepté que puisque c’est d’inexistence dont il est question, ça ne peut jamais se dire.

Aussi nous empruntons des chemins de traverse. Et de plus l’intentionnalité est à la fois notre être et qu’en même temps, il nous échappe : l’intentionnalité est continuellement l’horizon sur lequel se détache ce que nous mémorisons, ce que nous exprimons, ce que nous percevons ; attaché à notre objet, nous cessons de comprendre l’horizon lui-même, qui nous délimite alors au-delà de nous-mêmes. Cependant puisque cet horizon se produit à propos de tel objet, (toute conscience est conscience de quelque chose), lui-même, en tant qu’horizon, ne participe pas du monde ; mais constitue une nouvelle surface (sur laquelle parait tel ou tel objet).

Ainsi l’horizon existe-t-il en et par sa propre dimension (bien que cette dimension soit évoquée à partir toujours d’un objet précis et très déterminé, et donc recevant quantité de déterminations).

La surface sur laquelle se détache l’objet, existe en elle-même. On a l’habitude de visualiser l’intentionnalité comme un faisceau, mais ici ce plan autre (qui parait à propos d’un objet) est étal ; il inaugure une dimension à part.

C’est en tant que tel qu’il est impossible de le réduire : on peut entériner une objectivité de nos actes ; psychologique, sociétale ou historique, ce que l’on voudra ; tout cela n’est pas faux. C’est surtout que, pour ce qui nous occupe, l’acte lui-même qui fait entrer telle détermination, psychologique par ex, dans le champ, l’acte est à lui-même-seul sa propre logique, hors des autres. Non pas qu’il faille se méfier de telle objectivité, mais bien placer que c’est en une intentionnalité (celle de l’historien, du clinicien, etc) que ces objectivités s’utilisent. Et qu’identiquement il nous est utile d’en user.

Mais l’essentiel n’est pas là ; il est que l’intentionnalité en tant que telle ne s’offusque nullement qu’il puisse exister quantité de déterminations qui la précèdent. Son essence, sa nature, son être n’est pas en contradiction avec le monde, le vécu, le donné, les objets, leurs logiques, les causalités.  Il faut ajouter cependant que le degré de liberté, d’orientation dans le donné, est très limité ; et surtout que c’est sa nature même que cette limitation.

Une structure formelle et totalement vide n’aboutirait à rien ; et il s’impose toujours des contenus. Mais une structure formelle vide en son ordre, existe en tant que telle ; au sens où elle dispose d’un laps de temps (et d’espace, et donc, plus loin, de présence) pour ouvrir sa dimension.

Que ça ne puisse jamais se dire, tient en ce que tout énoncé est certes lui-même tel quel, (ce qu’il dit), mais également est dans l’acte d’énonciation placé dans l’horizon, qui se non-dit. Ça n’est pas seulement que l’énonciation ne dit pas tout, ne dit pas tout ce qu’elle peut dire, puisqu’elle peut en ajouter tant et plus, ça ne résoudra pas le problème insécable ; l’horizon, l’intentionnalité qui porte tel énoncé (ou tel désir ou telle perception ou telle décision), l’intentionnalité comme acte ne peut et ne pourra jamais se dire elle-même. Et ça ne dénote pas un « manque », mais plutôt l’inverse ; qu’une dimension existe qui est ouverte de fait.

Que l’on prenne cela pour un manque (et qu’il serve de fourre-tout à toute espèce d’irrésolutions issues des identités bâtardes dont on s’enroule), ne manifeste que notre croyance en un unique moi-même. Alors que nous sommes autres, bien qu’alors "inexistant".

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