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instants philosophie

Badiou

24 Novembre 2013, 12:13pm

Publié par pascal doyelle

Puisque la philosophie est la discipline qui se charge de penser « ce qui arrive à l’humain » sous le procédé technologique général de la réflexivité, philosophie qui est donc réflexion sur la réflexivité (ce que Badiou nomme les conditions de la philosophie et qu’il reprend de Platon ; le beau, la justice, la sagesse, le savoir et la connaissance ; soit donc l’esthétique, la politique, l’éthique, la pensée et l’idéel (la philosophie et son savoir et la science et ses connaissances),

La philosophie est à la fois ce qui remarque les réflexivités, les accélère de cela, mais aussi en crée quelques unes et de toute manière impose en survol que la réalité de l’humanisation est non pas tel ou tel monde particulier, ni tel langage, ni tel groupe, (ni telle vérité ajouterions nous) mais est le réflexif pur et simple. On contredira donc en présentant que la philosophie possède en elle-même son objet propre ; notre-être.

Or pour Badiou cet « être » n’existe pas ; Badiou déploie une argumentation qui se fonde sur la vérité ; la vérité est ce autour ou à partir de quoi nous existons ; hors cela nous n’existons pas sinon comme langage-corps, (ce que l’on pourrait traduire par moi psychologique, il suit ou poursuit en cela Lacan ; on se dépatouille comme corps avec le langage dans et via un concret le « moi » qui existe si peu que Lacan doit le doubler d’un « sujet inconscient », non qu’il soit sujet mais il est comme une pièce de monnaie ; le moi retourne la pièce mais tombe toujours sur la même face, alors qu’il est de fait deux faces de la pièce ; l’autre « visage » est inaccessible, il est comme l’ensemble des questions auxquelles le moi tente de répondre, mais qui ne perçoit plus, n’entend plus les questions, les a oubliées ou ne les a, à proprement parler jamais su).

Pour nous tirer de ce très mauvais pas, il n’existe pour Badiou que les vérités ; il n’existe du sujet que de telle vérité ; de sorte que le sujet n’est jamais un individu mais ce qu’il porte, ou ce qui le porte. Le sujet peut être un opéra ou le Parti. La vérité en général sort du donné indéfiniment multiple ; une réserve totale et vide (multiple composé de multiples) de laquelle émerge ici et là des vérités ; ce qui veut dire des généralisations qui valent au-delà du multiple pur, et forment des mondes.

Le multiple pur (l’être) est mathématiquement décrit ; les mondes eux sont logiquement décrits ; dans les mondes (chaque monde se rassemble autour de sa logique propre, son transcendantal), il est une représentation insuffisante de toutes les multiplicités existantes ; de sorte que ici et là il advient des vérités en plus (de celles qui constituent tel monde).

Les vérités apparaissent un peu à la manière heideggérienne ; « ça arrive » ; ça vient de l’être multiple ici et là et il n’est apparemment aucune raison à cela ; c’est l’effort de l’individualité (qui ne vaut que par cela, sinon d’être des animaux humains psychologiques ou sociologiques) qui ramène d’une apparition de tel vrai sur une nouvelle pensée, œuvre, engagement, vision politique, etc. L’univers est somme toute une machine à produire des vérités ; lesquelles réunissant les multiples (ceux qui sont susceptibles de l’être) tendent vers l’éternité ou immortalité ; une vérité est vraie au travers de tas de multiplicités (qui d’elles-mêmes s’effondrent, repartent dans le non être qu’est l’être, le multiple de multiples). Elle va chercher dans les multiplicités des vérités qui transpercent les mondes et leurs logiques propres ; elle va fournir de nouveaux transcendantaux ; elle est irruption et donc les vérités (justice, beau, sagesse, vrai) sont ce qui demeure au cours du temps ; ce qui est conservé.

Il est donc une fondation profonde qui veut ceci ; n’existe que l’exprimable dans l’universalité ; cela seul existe ; de là une théorie alambiqué qui consiste à affirmer (courage, angoisse, réactivité, discipline, immortalité, etc) pour nier les sujets réels. On en revient là à une conception de principe purement classique ; toute conscience est abolie dans les vérités (qui sont au fond La Vérité qui absorbe au final indéfini des temps toute la réalité des choses et des êtres).

Tout cela permet de saisir ce que vérité apporte aux mondes, au monde, mais aboutit à une fascination, une obsessionalité de la vérité comme final, point d’orgue de tout ce qui est, excluant au fur et à mesure, niant ce qui est et qui est devenu, et une dévotion totale est appliquée qui consiste à annuler l’existant au profit du seul pensable.

Autrement dit on retrouve là la même incoordination hégélienne ; toute la pensée existe, mais non pas le monde et le donné et les individualités ; il est une incompréhension, dans tout le système repérable, qui exclue l’existant et le monde là, qui ne permet pas de saisir en quoi il est une historicité (qui soit compréhensible), qui empêche de prendre conscience du devenir d’humanisation suivi de la personnalisation, ou qui condamne ceux-ci comme antiphilosophes et ceux là comme sophistes, et qui, le comble, ne peut pas penser la philosophie elle-même en son objet propre.

Fasciné par la Vérité, on ne peut pas s’apercevoir qu’il existe un système second, celui des conditions réelles de toute humanisation et personnalisation ; et non pas conditions au sens de Badiou (la philosophie se tient de vérités mathématiques, poétiques, etc, elle est obligée de se servir d’une interprétation d’un autre domaine, politique, esthétique, etc, parce quelle n’a pas d’objet propre, sinon la vérité monolithique comme principe unique), mais conditions en et par notre être même ; pour Badiou notre-être n’existe pas ; il ne peut pas élaborer un système formel de toutes les vérités, mais se condamne à n’en saisir qu’une seule (rendant incompréhensibles toutes les autres). S’il n’est que la vérité, il n’est pas d’ontologie effective de ce qui est (la vérité exclue le libre pur, le libre pur en revanche permet les vérités); la philosophie ne dit pas ce qui est, c’est dit par d’autres.

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