Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
instants philosophie

Le moi dans son Réel

20 Mai 2014, 15:33pm

Publié par pascal doyelle

Si le moi, la personnalisation est ce qui suit l’universalisation, si au-delà de l’humanisation à fondement universel (raison, droit, Etat, Kultur, celle qui a pour horizon l'universalité, l’humain lui-même comme humanisme), s’impose l’humanisation mais à fondement de personnalisation, c’est que l’on ne voit pas à quoi pourrait bien servir l’universel, sinon d’aboutir à des sujets ... ou des mois.

Ça ne prend pas encore le nom de sujet, pour l’instant cela se nomme des mois.

Pour découvrir les sujets, il faut s’orienter vers les Grands Sujets ; ceux qui battent leur être à coups de trique. De Rimbaud à Ph K Dick, mais il en existe des quantités ; des quantités parce que Descartes à déchausser notre être et en état de suspension intégrale, il y eut quantité de sujets, quantités d’êtres libres. Ils s’en prirent à leur moi, à leur vécu, à leur monde ; c’est que l’horizon des grands sujets est le sujet tel quel, de même qu’auparavant l’horizon des inventeurs et créateurs était l’humanisation et l’universel, qui se sont réalisés comme révolution des droits et de l’Etat, comme acculturation généralisée et humanisme, science et raison (à distinguer donc de la pensée).

Une fois l’Etat et le droit réalisés, chacun est reparti à la chasse, à la chasse au vrai, ce qui veut dire pour ceux là, au réel. Et leur horizon, au-delà de l’universel réalisé (Hegel a tout parfaitement raison pour ce qu'il tient lui-même, mais l'historicité continue) se dresse absurdement sur le sol : en tant que sujet.

Mais on est, semble-t-il, loin par les mois se dépatouillant de leur donné vécu bricolé, de ces grands sujets (qui explosent leur donné en sacrifice et de par leur être, élancés vers ce réel inusable et impossible, impossible à exister).

Cependant la révolte (la révolte ontologique, celle qui s’en prend au monde tel qu’il est, ou dont une variante fut le révolutionnaire qui s’en prend au monde dit aliéné, à juste raison), et la révolte ontologique du moi (qui n’a plus de révolution universelle possible, puisque le monde est « là », déjà là, effectivement fondé en Etat et Droit, le monde unique de la révolution unique, il n’y en eut qu’une, en fait, de révolution, il y en aura d’autres mais internes à celle là, la première), la révolte ontologique du moi est encore plus tordue et en fin de compte inimaginable.

La révolte ontologique du moi, c’est son soulèvement ; la construction et déconstruction de ce que le moi est, un corps. Évidemment un corps tout à fait spécial. Et par ontologique on s’en prend donc à une version spécifique de l’ontos. La version qui conduit de notre être à notre être via le moi et son « corps ».

Ça s’est produit ; le moi s’est vécu (lui qui s’inventait, puisqu’il n’y eut jamais de société humaine fondée essentiellement sur une entité telle que le « moi », la « personnalisation », et outre les grecs, qui dénotent en tout apparemment, parfois ici et là un seigneur ou un roi se permettait ses gouts et ses couleurs, c’était même sa marque insigne de grandeur et d’élévation, qu’il soit une « personnalité » reconnue telle), le moi s’est vécu et éprouvé en se découvrant.

C’est un cheminement invivable que celui des mois ; leur vécu est à la fois une réalisation et une abomination (dont les grands sujets offrent, gratuitement mais chère payée l’autre face, laquelle ? ). Il fallut que le moi s’organise abandonné à lui seul ; plus aucune couverture pour le rassurer, livré aux productions industrielles de leurs vies ou à la sexuation incompréhensible et au corps, ou aux angoisses indescriptibles détruisant la structure même du sens qu’ils en attendaient. Un total désordre et il fallut une puissance de représentations, du cinéma aux mass médiatisations décuplées, pour couvrir ce dés-ordre, ce délitement réel de tout, la séparation, la division portée à son maximum.

Le moi à lui seul … en réalité avec et par les autres mois… c’est une aperception généralisée distribuée en chaque moi qui a agi et réagi, produit et inventé. Ce sont les grand sujets qui sont seuls, parce que là où ils avancent, dans la zone réelle de leur sujet effrayant, il n’y a rien ni personne. Mais le moi lui se tisse dans une aperception ; cad dans une zone en propre qui produit son humanisation qui, comme vu, ne relève plus uniquement de l’humanisation universelle. Une aperception tel « le monde des mois ».

La révolte ontologique du moi est infinie ou plutôt (comme on ignore ce que veut dire infini), est indéfinie (indéfiniment complexe) ; on ne peut pas supporter que ça existe comme ça, la réalité, le corps, la fin, les liens et les déliaisons, tout cela pèse et appuie sur le moi jusqu’à le déchausser lui-même, et c’est en et à lui-même qu’il s’en prendra. Il nourrira une détestation repliée, une négation d’exister, ou une et des reformulations de sa réalité à partir de son réel.

Et il le peut, il le peut en ceci qu’il se voit du point de vue de son sujet. Il se regarde et de là où il se regarde, il peut nier sa réalité, la détruire en croyant y exister encore, en plus, dans l’observation ou plus exactement dans le retrait de cet être. Mais cela il ne le sait pas. C’est replié dans sa conscience externe, mais lui, il est le moi et se situe dans la conscience intérieure, celle qui croit « qui il est ». Il se peut donc que sa conscience externe joue avec lui, alors qu’il ne le sait pas ; il peut, croyant y survivre, (parce que la conscience externe est prodigieusement indifférente, elle n’est pas un « moi ») s’engager dans des couloirs insortables.

Si l’on doute qu’il existe une conscience externe, il faut bien qu’elle existe ; parce que l’on n’est pas un « moi » comme une chose ou un objet ; on se voit exister. Si un moi était collé à même son identité, ça ne serait pas une identité. Il existe donc un point externe (qui n’est ni l’intériorité ni l’extériorité qui se rapporte à cette intériorité), par lequel on (se) voit.

De cette conscience externe (qui le regarde vivre, exister, elle-même n’existant pas), elle n’est pas seulement radicalement dangereuse, elle est aussi ce qui vise au-delà du moi. Par-dessus son identité.

On pourrait désigner conscience intérieure et l’extérieur plus conscience externe comme étant une « personne », mais ça n’est pas ainsi ; il faut distinguer une conscience externe et désigner intérieure et extérieur, parce que c’est un dispositif, un dispositif complexe ou mieux un dispositif de dispositifs.

Cette conscience externe, si étrange (et insituable ; si elle était situable, notre latitude de point de vue divergent cesserait … ce qui nous rendrait impossiblement existant), est un danger effroyable qui pèse (un « regard » terrifiant, qui n’appartient à personne, pas même à lui-même, infigurable) et en même temps est la possibilité externe de notre être. (En tant que dispositif de dispositifs dont l’un se nomme le moi).

Commenter cet article