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instants philosophie

Notre-être nu exposé

8 Novembre 2014, 09:48am

Publié par pascal doyelle

La philosophie est donc la technologie qui porte au jour la structure de notre être ; ce qui se lit tout à fait si l’on abandonne la caricature qui laisse entendre que la philosophie désirerait l’être ou autre monolithe du même genre. L’idée de l’être même chez les grecs, n’a pas grand-chose à voir avec ce fantasme de traduction qui disposerait « ce qui est » comme étant « l’Etre », une sorte de gros objet qui nous satisferait. Et encore moins de caricaturer le dieu chrétien (et / ou affiliés), la trinité est l’investissement architectural le plus achevé du réflexif qui s’émancipe, se libère, du monde donné là. Et encore, encore moins, René agitant son effigie de Sujet, ce dont on ne trouve nulle trace dans le texte, et qui plante et décrit notre être tel que là, sur l’étendue du donné.

Hormis donc ces caricatures (qui permettent à ceux qui les supportent de remonter à nouveau toutes sortes de vérités du mondes, données là, étales, mondaines, vitalistes, systématiques, d’ontologies directes diverses et variées), la philosophie est la compréhension de la structure de notre être ; suite à sa dé-couverte par les grecs, son non-recouvrement par quelque monde particulier ou quelque contenu que ce soit, puisque ayant pour objet la structure (qui n’est pas un objet), il fallut élaborer une pensée, cad un système formel (et non un système clôt sur ses contenus).

Un système formel et non un système de contenus (on fait passer les systèmes d’idées pour des systèmes de contenus). Un système formel qui ne se réalise pas seulement en s’exprimant, qui se réalise en marquant effectivement le réel… lorsque Platon impose qu’il y ait des idées (cad des rapports), c’est un fait qui s’impose pour les siècles. Lorsque Descartes marque le sujet, du sceau de la volonté formelle, c’est un fait, unique et qui ne sera pas, jamais répété (à quoi bon, puisque désormais il est). De ce que les mots deviennent des faits, incontournables (à moins de nier les faits eux-mêmes), cela revient à dire que ce qui se dé-couvre est notre-être ; comme les vagues se retirant des mondes particuliers, des groupes et des langages, découvrent l’os de notre être ; le roc.

Evidemment si l’on continue encore de comprendre que Platon ou Descartes ou Hegel manifestent seulement une essence d’un type particulier, une interprétation de l’humain parmi les autres, on place encore en concurrence cette essence interprétée et toute autre (de quelque monde ou civilisation que ce soit), et effectivement en ce cas il n’est pas plus de raison de favoriser Platon plutôt que qui que ce soit (sinon de se référer à une « rationalité étroite » qui serait telle le reste squelettique de la pensée grecque). Le problème est donc que ça n’est pas cette essence là qui est manifestée mais ce qui affleure sur le sol c’est notre-être, qui appartient, par en-dessous (pour ainsi dire), à toute et n’importe quel monde, humanité, peuple. Et pour rendre compte de cet-être (qui n’est pas une essence, mais antérieur à n’importe quelle essence), il est nécessité un système formel (d’abord métaphysique puis ontologique, lorsque cet être apparait cartésiennement en plein, sans rien, et cet être qui sera donc exploré durant 25 siècles). La philosophie déploie ou participe ou engendre parfois le déploiement du réflexif formel.

Par ailleurs il est limité et absurde de comprendre cette pensée grecque comme « réflexivité » au sens de « raison » ; il ne s’agit pas de « raison » (qui en est seulement un des effets), mais de la pensée (soit donc l’élaboration sur la conscience-de qui engendre des machineries intentionnalisatrices, des systèmes, fondés sur des rapports de conscience, cad des idées, lesquelles sont en plus et par-dessus tout langage, groupe, etc).

La réflexivité comme "raison" serait seulement la réflexion de notre réalité humaine sur elle-même ; la réalité humaine serait l’héroïne, et la réflexivité le moyen (qui du reste dans ce cas demeure inexplicable et renvoyée dans les limbes d’une « essence » éthérée). C’est l’inverse qui est vrai et réel ; c’est la réflexivité même qui est l’héroïne et qui se prend elle-même comme pivot articulatoire et c’est la réalité humaine qui en est un des effets ou des moyens. Dire la réflexivité ou le réflexif sont ce qui devient, ça ne veut pas prétendre que la réalité humaine se réfléchit, ça veut dire que le réflexif ( la structure de notre être en deçà de toute réalité humaine), est Ce-qui-devient…

Il faut prendre au pied de la lettre ; que l’existence précède l’essence (et d’une manière générale prendre au pied de la lettre cela même qui se Dit). Sartre est essentiel en ce qu’il marque définitivement ce qui se cherchait par Husserl (que la conscience est active, et que Husserl renvoyait à un « contenu », incapable de montrer de où viendrait un tel contenu).

De même ce que veut la « conscience », ça n’a rigoureusement aucun « sens », parce que c’est structurellement le sens… Le sens (de notre être) est de dévorer ce qui est, cad de le relancer. La « conscience » (et sa prise de saisie d’elle-même qui se nomme réflexivité, par quoi « cela », cette abomination devient l’héroïne de ce qui arrive et va arriver depuis les grecs) est un mécanisme pur et simple (sinon il s’empêtrerait de ses contenus à n’en plus finir), qui travaille ce qui est. C’est juste et très simplement que ce mécanisme prit, par les grecs, conscience de son être comme conscience ; comme mécanisme, machinerie, actualisation, cohérence formelle.

Il ne faut pas se laisser avoir ; lorsque les grecs se nomment comme pensée, les contenus dont ils s’agitent sont formellement des intentionnalisations élaborées par-dessus le langage, la perception, le corps, le monde donné là, le groupe humain particulier, etc. Et ces idées n’existent que si on les intentionnalisent, sinon elles disparaissent. Les développements qui viendront ensuite continuent d’élaborer l’architecture formelle de notre position au sein du donné ou à sa surface, étendue. De Platon à Sartre (ou son inverse Lacan) c’est la cartographie descriptive de l’articulation de cet être en plus (qui n’appartient à aucun monde, aucun langage, qui est sans essence, par qui l’exister s’ajoute à l’essence).

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