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instants philosophie

Altérité et différences

23 Septembre 2015, 08:01am

Publié par pascal doyelle

La conscience qui a franchi le cap, en fait ne s’est jamais basculée. On ne peut pas basculer dans la verticalité ; on ne peut qu’en partir, constamment. Ou le plus souvent possible. Réatteignant sans cesse le possible, et donc se formulant pour soi-même la Possibilité, l’antériorité ; que l’on apprendra de quelque intitulé que l’on voudra ou trouvera ; soyez bouddhiste ou hindouiste, juif ou musulman, rationaliste ou athée, mais d’une part vous suivrez toujours le Même fil (dans le réel il n’en est qu’un), et d’autre part il dépendra toujours de vous de vous y investir « plus ou moins » ; tout est dans le « plus ou moins », et cela regarde chacun, et non pas de suivre ou non le fil (puisque l’on y est) ou tel ou tel ligne du réel (qui re-viennent au Même) ; il n’en est qu’un seul et personne ne sait où il conduit, on ne peut rien affirmer ni infirmer de la ligne du réel et personne ne peut en méjuger.

C’est ce que dessine la pensée, la pensée en tant que philosophique, selon les grecs et la suite (on lui réserve « pensée » pour ne pas tout mélanger, ça ne signifie pas qu’ailleurs on ne pense pas, mais d’une autre manière ; la philosophie, la pensée, grecque et suivante, veut amener l'absolu ici même et puis ici et maintenant, qu'elle nomme le Un, étant insécable et puisque ici et maintenant existe, c'est ici que le Un est, et ceci la philosophie élabore la technologie adaptée à discerner les interstices dans le monde, en lesquels le Un ex-siste) ; on s’étonne que la philosophie a pu si longtemps re-partir de dieu ou de tel ou tel absolu (en réalité de tel ou tel Un, quel que soit sa dénomination, puisque la philosophie ramène l’absolu au un, qui ne peut être qu’ici même). Mais c’est que le Un y assure une fonction et qu’il s’agissait et qu’il est question (aussi bien de Nietzsche, Heidegger, Sartre ou Lacan) de circonscrire cette fonction ; la fonction unique, la seule, la première et la dernière à la fois, la ligne.

On a condamné cela comme religion, christianisme ou comme platonisme ou comme métaphysique, ayant à charge ensuite de réintroduire une sorte de Volonté de puissance ou l’Être, ou le marxisme comme philosophie indépassable de notre temps, doté du pour-soi néanmoins, ou l’inconscient. Pourquoi pas… ça fait aussi bien office de Un.

Et pour le dire vrai, ça fait encore mieux office du Un ; ça le précise, le nuance, le réinstalle autrement, étrangement, et il adore cela ; le un est l’altérité. C’est par le Un que l’on produit toutes les crevasses internes au réel. En supposant que ce qui est, est « ici », et toute pensée (articulée comme réflexivité, retour-vers-le réel) est absorbée, aspirée, attirée par le Un qui est-là.

Et le réel adore cela. Il est plein d’altérités. Le Un est très exactement à cette fin ; que tout soit d’une divisibilité telle qu’elle nous abreuve et qu’au final nous l’aimions. Ce qui n’est pas évident du tout, parce que pour de vrai nous la haïssons.

Tant que l’altérité est localisée en telle ou telle, on peut couper le monde en deux (ou le donné là ou le vécu ou les corps, ou la vérité, ou l’humain, les gentils et les méchants que l'on voudra) mais si tout est l’altérité alors elle est une forme indéfiniment réelle. Elle est l’ensemble des dès jetés.

Et qui plus est, au lieu de simplifier (tout serait ceci, ou cela), si le Un existe comme altérité, il implique, à chaque fois que possible, de le signifier en chaque altérité, très précisément, très exactement, au plus prés de toutes les distinctions. Impossible de violenter l’altérité si elle est ce qui est, il faut l’amener dans et par toutes les distinctions, et peu importe les divisions, ou plutôt ce sont précisément les divisions qui importent ; plus il s’en découvrira ou inventera et plus l’exister se déploiera ; l’altérité deviendra la Racine. Puisqu’elle est la forme réelle du Un.

L’altérité comme principe, n’est pas le désordre, et évidement pas plus l’ordre, parce que pour la tenir il faut à chaque fois prouver ou éprouver (selon le corps) les distinctions, dans le détail même des réalités ou du réel. L’altérité signifie que tout ordre est dans le renouvellement. Les dégager une par une et tous les uns qui composent telle ou telle altérité, les inscrire, les écrire et les situer en tel lieu et tel temps et tel corps et telle perception, et il est impossible de les recouvrir (par quelque malformation d’une unification dolente ou abstraite ou morte ou ignorante ou méprisante ; de quelle altérité accoucherions-nous alors qui ne correspondrait pas à telle altérité effective ?).

Il faut s’y investir le plus loin possible. Et si l’altérité est le principe (le principe même du Un, qui n’a soif que de se préciser au plus loin et au plus près) c’est la Possibilité même qui s’existe.

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