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instants philosophie

Structure au-devant de tout

28 Janvier 2016, 17:28pm

Publié par pascal doyelle

Si l’on avance dans le repli que constitue notre être, devenu cet-être, un mécanisme opérant, toujours opérant puisqu’il n’obtient jamais aucun contenu fixé, on ne manque pas de poser le problème du mouvement, du devenir incessant ; l’être, dieu, le sujet, et évidemment l’altérité font office en ce cas d’accélérateurs, puisqu’ils permettent de montrer jusqu’à quel degré de fusion et de fission la réalité est constamment explosée par la structure. Il faut lire inversement à la chosification, qui est seulement l’interprétation que la raison raisonnante, le réalisme naturaliste, assénera à juste titre, aux pratiques des groupes, églises, systèmes, idéologies, mais qui ne se retrouvent pas dans les articulations, les philosophies elles-mêmes. Par exemple le christique n’est pas l’église, le marxisme n’est pas le communisme, la science n’est pas l’objectivisme, la philosophie n’est pas l’idéalisme abstrait.

Ce qui retombe dans les groupes divers quitte la structure et il n’est pas moyen de ne pas succomber, sauf de se remémorer l’articulation première, de la réactiver et ce par-dessus ou par-dessous et au travers, envers et contre les représentations, cad les échanges. Le désir de l’homme est le désir de l’autre, sauf qu’il nous prendre, on ne sait comment ou plutôt on ne le sait que trop, d’articuler un tel Autre qu’il outrepasse n’importe quel autre conscience … Et dès lors on se retrouve sans rien, sans rien du tout, sans plus aucun visage. Pas même le sien propre, puisque celui-ci, grosso modo, se tient d’un regard d’une autre conscience ; et c’est toujours non pas un mensonge (version moralisatrice) ou une illusion (version naturaliste objectiviste), mais une pseudo-représentation, une représentation par défaut, ou plutôt parce qu’il faut bien représenter « cela », cette structure, même et parce qu’aucune représentation ne lui correspond. Et donc cette représentation manquée sera toujours un symptôme du devenir ; du devenir réel, du devenir du réel.

De même que pour un moi, pris dans l’arc de conscience, ses « pensées » seront le devenir de son-corps.

Une conscience-de ça ne correspond à rien ; c’est le rapport à (soi) en lequel le soi est le rapport lui-même. Et il n’apparait jamais ; il est ce qui fait apparaitre. Et il ne peut être « atteint » que supposé ; il ne faut pas mécomprendre Descartes ou Kant, etc ; ils montrent comme l’être antérieur supposé n’est pas atteignable ; on se moque de Kant avec le nouménal, mais c’est cela qu’il dit ; « ça existe ailleurs » et on dira même que c’est cela qui existe vraiment ; le reste est dépôt, résultats, alluvions, concrétions ; l’être est concrétions de l’exister et seul l’exister existe.

Tout passe, sauf ce en quoi tout passe ; le présent, ce qu’il faut comprendre comme « l’exister » ; toute la réalité, toutes les réalités, tous les mondes humains mais entre autres mondes, sont des essais, des erreurs, des tentatives ; des tentatives qu’il puisse éventuellement, dans l’exister, s’opérer un sursaut de l’exister même ; un truc en plus. Ça cherche le truc en plus. Et visiblement ça n’est pas du tout écrit, nulle part, où que ce soit. Et c’est « en acte » ; raison pour laquelle il est un présent.

Et ce qui se cherche, par le seul jeu des statistiques pour ainsi dire (lancement un tas de paquets de particules ou une énormissime quantité d’énergie en refroidissement), créera d’abord un être spécifique qui sera non plus tel ou tel portion de la réalité, mais un rapport-à-soi ; à proprement parler une conscience-de ; puis dont le devenir de rapport-à-(soi) se mesurera à sa propre possibilité… Il dépendra évidemment de la tenue de ce rapport (vers lui-même dans le milieu unique et présent constant du réel) de ce qu’il deviendra.

Aussi ne correspondant à rien dans le monde (et il n’est que le monde, sauf qu’il possède un Bord que ce Bord est l’exister cad le présent) l’arc de conscience (qui est toujours un retour) peut bien s’incarner dans l’autre regard ou le regard de l’Autre ou la conscience d’un tel ou d’une telle ou dans le langage ou dans le groupe ; en bref en quelque retour que ce soit. Puisque l’on ne reçoit, à partir d’une structure de départ, que le retour. Le retour nous dit quoi être, qui l’on est, mais comme ça ne vient que mot à mot ou d’un signe ou d’une chose ou d’une partie du corps, etc, ce « qui » est toujours un « quoi ».

Il est impossible de croire que l’idée, l’image, le signe que l’on a, représente l’acte de conscience, parce que l’acte de conscience surgit nu et sans rien de la cervelle, opération purement formelle, et vide, sauf que l’on y croit effectivement et que l’on continue d’attendre que ça nous vienne de l’extérieur, de l’autre conscience ; l’acte de conscience est un arc, cad un mécanisme ; c’est le retour, et non l’arc, qui renvoie parole, signe, image, imagination, corps. Mais son surgissement c’est exclusivement une tension de la cervelle qui se place ; se place dans le «là », le réel, puisque « conscience » est ce qui nomme « ce qui a rapport à (soi) » ; qui est une proposition totalement absurde.

Et ça n’est pas un manque. Ça existe tel ; si une conscience-de existait autrement (comme elle se croit ou s’imagine par ex), elle n’existerait pas ; c’est parce que Vide qu’elle existe (et Lacan se déduit donc de Sartre). Et ce vide se dévoile peu à peu, ayant d’abord û être identifié par Descartes et Kant et Hegel, etc, comme une structure spécifique, husserlienne, mais dont Sartre va retirer tout le dedans (il n’y a plus que la structure du pour soi), que Heidegger va situer « là » dans le « là » de l’être-rien, cad formel (et non pas « néant »), que Lacan va entourer de ses bras agiles (puisqu’il pense le Moi, la personnalisation dont nous sommes le réel).

C’est pour cela que Nietzsche, qui est le grand affirmateur de l’acte pur et brut, nous apprend à utiliser, gérer, manipuler l’insatisfaction ; et il le marque de fait et préalablement en supposant que notre être n’est pas le nôtre … mais est la « volonté » ; elle ne sera jamais atteinte, c’est par elle que l’on atteint.

Sauf que l’on ne peut pas se contenter de dire ; c’est la Volonté. La Volonté ça représente ; ça donne une image, idée, principe. Mais ça ne dit pas le truc étrange et autre, radicalement Autre, qu’est un rapport à (soi)… ce qui définit une conscience en articulation ; une conscience qui surgit de la cervelle c’est vers le réel, le « là », dont il n’est pas du tout besoin de connaitre « ce que il est », le réel, pour le positionner ; et ce choc qu’un réel il y a et qu’il est Autre, et que notre être est autre par rapport et vers cet Autre, est la « castration », la déperdition totale de soi, la subsomption du moi dans et par le rapport. Ce qui non seulement ne peut pas se supporter, mais est même incompréhensible et donc se représentera autrement et ce faisant restera à jamais loin de soi ; le soi ne sera qu’un prétexte. Ce qui compte c’est la structure et c’est la structure qui se suppose ; Descartes suppose la structure, et Kant, etc. Ils utilisent les résultats pour supposer un « être » antérieur, qui est une forme.

Autrement dit on se trompe complètement de croire que Descartes nomme notre être, comme Pensée, déterminée, et qu’il prend pour notre être ; notre être n’est pas la pensée, il est « ce qui pense », il est le « ce qui », pas le résultat. Et il le voit si bien qu’il identifie finalement notre être à la « volonté » ; cad rien du tout. Et plus exactement la volonté lorsqu’elle suspend tout contenu. C’est là qu’elle est et donc déjà bien en-deçà de toute pensée. Et si bien encore que la « pensée » pour Descartes, c’est un peu de tout ; volonté, pensée-entendement et puis idée, cad rapport (et l’idée cartésienne st tout à fait autre ; elle est un rapport à un « là », l’étendue est l’idée même, « ça désigne le là, la surface autre », le réel, qu’il assigne désespérément au mathématisable, mais par défaut, puisqu’il est dit nettement « que si ça se trouve on n’a qu’une toute petite vision de tout ce qui est », très limitée, on n’en sait rien, seul dieu sait tout ce qu’il est), et imagination et sensibilité et corps ; il le voit tout à fait que c’est comme un Accès qui met en branle tout un ensemble, un dispositif de dispositifs.

On dira mais toute conscience fait-sens ; c’est même par là que l’on croit comprendre ce qu’elle est ; elle fait-sens et un jour notre personnalité sera elle-même ou il y a un sens à travailler son humanité, son humanisation, ou à être heureux ; oui, bien sur, mais ça n’est pas le fin du fin.

C’est que la découverte invention grecque ou autour de la méditerranée consiste à définir l’absolu comme étant ici même (le monde grec) ou ici et maintenant (le corps du christ), et que situer le « là » du donné implique de soulever le donné là ; la position de l’être ou du sujet (dieu ou plus tard Descartes) emporte le monde et le corps. De même le (non) sens de notre articulation est précisément l’altérité ; l’altérité de Nietzsche, Heidegger, Sartre, Lacan ou de Marx et Freud ou des sciences objectives est aussi l’altérité que tout moi, toute personnalisation affronte dans son vécu et son corps tels quels. Le (non) sens de cette articulation est de proposer au défilement sous-nos-yeux de notre réalité, de nos réalités, qui nous composent (et ce envers et contre ce qui pourtant nous fonde ; l’universel ; raison de la révolte envers la raison idéaliste, l’individualisme contre l’humanisme, alors que sans humanisme l’individualisme n’aurait pas lieu d’être, pas de « lieu » en lequel se développer, c’est précisément le chiasme par lequel nous nous contredisons).

Ou encore ; le moi croit qu’il est qui il Est (sa conscience est fonction, simple fonction d’une identité en soi), alors que c’est le moi qui est effet de l’arc de conscience qu’il existe (il l’existe, ce qui signifie qu’il a non pas reçu son moi, mais qu’il l’a inventé, créé, recomposé, élaboré ; de là qu’un « moi » est une complexité) ; mais le moi est l’effet de l’arc de conscience parce que l’expérience en cours est justement d’un arc de conscience « dans un corps » ; on ne sait pas ce que cela donne, peut, se supporte ; chaque moi cherche à gérer ou organiser ou inventer ce qu’un corps peut tel que pris dans un arc de conscience (tendu au réel donné « là », à la fois donné et « là »).

Cela veut dire non pas que le moi n’existe pas (ce serait absurde et ne pas comprendre que la personnalisation est un acquis radical dans l’humanisation, elle poursuit l’humanisation), mais au contraire qu’il est une plus grande et autre sorte d’individualité après le moi ; dans le moi il est un sujet ; et ce sujet n’est possible que si un moi (et donc antérieurement une humanisation qui supporte la personnalisation en plus) est activé, et ce sujet n’est nullement le Sujet Idéaliste, etc, puisqu’il se concocte depuis que dans l’altérité, les altérités, il est jeté.

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