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instants philosophie

La perception possible

14 Septembre 2019, 08:25am

Publié par pascal doyelle

Si l’on enquête (c’est de cela dont il s’agit) sur le christique c’est que l’on considère que notre être, actuel, tout ce que nous sommes, est tenu par l’initiative nommée « christique » et que, sans que l’on puisse l’expliquer, s’est imposé à ce moment là la totalité du processus, processus qui suivra et dont nous sommes toujours les effets, et que donc analyser le christique c’est non pas remonter dans le temps, mais c’est instruire la compréhension du présent initié il y a 2000 ans.

Et il y eut initialisation de la structure de « sujet » parce que celle-ci est réelle et n’est pas une « idée ». Ça n’est pas le contenu, quel qu’il soit, qui commande le déroulement historique, c’est un réel, dur, solide, existant en lui-même, consistant, élaboré, et qui se plaçant sous son propre regard redouble, quadruple, décuple sa propre élaboration ; de ce qu’il se voit, il devient.

De se signifier, comme dieu, être ou sujet, il se rend perceptible dans le donné. Il grandit en tant que structure et non pas comme contenu. Ayant acquis, absolument, son historicité de sujet, par la révolution, on s’aperçoit plus ou moins, que c’est quasiment contre ou hors de sa « volonté » ; la structure à vrai dire s’impose du dehors, ce qui veut dire du Bord. C’est la forme, de la réalité, en tant que cette forme est le réel, qui vient se montrer dans la réalité elle-même et la forme est plus grande, en capacité, que la réalité qui est toujours déterminée.

On n’est donc jamais « qui » l’on est, mais seulement l’intention de cette identité, identité qui ne tient que par cette intention. Laquelle n’est pas définie mais sans cesse en cours ; c’est dans la continuité absolue, cad formelle, que l’on existe et que reprend constamment la possibilité ;  c’est ce que signifie le christique ; vous convaincre de ne jamais lâcher la possibilité pour l’ombre. Il n’indique rien de particulier, et au contraire toutes les dérives à partir du christique vous collerons constamment telle ou telle réalité sur le dos.

Ça n’est pas que le christique veuille remplacer le donné, le vécu ou le corps par autre chose ; c’est qu’il montre que c’est rétroactivement que tout cela pèse ou s’allège. Et qu’ainsi il est exigé de poser le point d’attirance absolument au-delà du donné ; et que c’est par là que cela se passe. Puisque la nature de notre être est une structure et qu’elle se crée en tant que rapport ; une fois institué le rapport il se tire de lui-même par en-avant ; ce qui veut dire par l’intentionnalité.

L’intentionnalité est un champ qui se crée de ce qu’un signe, un mot, est posé là au-devant et ayant été propulsé en avant, il étire à sa suite ; tout dépend donc de l’étendue ouverte par le champ et la plus grande étendue acquise est celle du christique ; toutes les autres sont copiées ; cela est clair ne serait-ce que seul le christ est encore vivant, après la mort, après le point d’existence, cette fois, le plus éloigné, pour quiconque, et que seulement par ce point là il est possible de (se) percevoir de la naissance à la mort ; cette naissance-mort est fondamentale. Ça ne peut être occupé que par un seul. Et curieusement (c’est une des nombreuses curiosités, logiques, un des fondamentaux) il est le seul qui ait affirmé l’individualité de conscience ; que chacun est indépassablement réel et qu’il n’est qu’un seul plan qui ne peut être plié à son tour puisqu’il est, ce plan, le pli lui-même ; le réel est le pli et le pli est le réel ; et donc chacun est absolument fils de dieu (cad fils du pli premier et dernier qui se déplie constamment). C’est ce que cela signifie ; indépendamment de toute croyance, l’articulation est mise en place, telle quelle.

Chacun est ainsi convoqué explicitement, ce qui en effraie bon nombre qui estiment que dieu n’a pas à venir mettre son nez dans nos affaires … mais on comprend alors que ce refus est la plupart du temps mésestime de soi ou inobjectivité du rapport que l’on est, affaissement quant au réel de ce que l’on veut, fuite dans l’imaginaire et non pas maitrise de l’imaginaire vers le réel.

Rimbaud nous impose son intentionnalité découverte, mais ce faisant il nous replace dans le réel… c’est l’horizon autour de nous qui est investi et soulevé et l’œuvre s’utilise afin de se produire dans le monde donné tel que « là », ou selon ce-corps, ou de par sa surface ou une temporalité instantanée qui les contient toutes.

Mais une intention, une existence qui ne se confronterait pas à l’intention divine, à l’immense stratégie demeurerait tout simplement en deçà de ses possibilités. Ou ce qui est pire, s’imaginerait l’égal de l’intention absolue ou le substitut et penserait comme évidente que toute intention peut témoigner de soi, de soi et par soi seul ; ce qui est absurde. Même en régime agnostique ou athée, une intention qui mènerait sa propre vérité est une absurdité et doit au moins sacrifier au réel ; et le réel est autre, toujours. On ne peut pas se débarrasser de l’altérité et toute définition de l’intention comme déterminée est une identité, un collage, un copié collé.

Cependant on a cru que l’horizon du monde donné de la science ou du naturalisme, offrirait une surface d’épaisseur suffisante, et puisque dieu, l’être ou le sujet n’y entraient, autant les délaisser. Sans qu’il vienne à l’esprit que dieu, l’être ou le sujet opéraient exactement d’une même, cette fois, hyper objectivité ; et que sciences et naturalismes ne se tiennent que dans l’intention divine, métaphysique (l’être du discours universel) ou ontologique (le sujet depuis Descartes), et sans ces architectures l’intention quant au monde, au vécu ou au corps tombent dans la détermination, se perdant des myriades dans tous les sens.

Ce que signifie  dieu, comme ce que signifie que la Vérité ne soit pas telle ou telle vérité mais un principe absolu et architectural, c’est que jamais l’acte ne coïncide avec l’être. Et qu’il faut ressaisir l’acte même et donc le structurer en et par lui-même et non pas le déjeter on ne sait de quoi, de quelque partie de monde, morceau de vécu ou signe du corps. On a tenté, alors donc, de remplacer le signe, absolu, dieu, par ceci ou cela, et de fonctionner selon cette détermination et de produire un monde, une humanisation, un moi, d’une réalité donnée et apparemment acquise mais tout vient à manquer, puisque notre être est une structure, un rapport et un mouvement et non pas un quelconque être.

S’est élaborée l’architecture du réel. Et nous autres, puisque nous n’en voulions pas, de nous débattre envers et contre l’intention, tout de suite architecturée, tout de suite armée sortie de l’attirance de son champ intentionnel ; ça vient tout d’un coup et complètement et ce corps-langage, ce langage-groupe, cette réalité-contenu, s’y refuse. Elle ne voit pas du tout où cela conduit. Elle ne saisit pas qu’il existe alors une possibilité, de même que les révolutionnaires seront entrainés (y compris Robespierre) dans la révolution qui a porté dans la réalité un réel de structure absolu, formel, se déclenchant de lui-même, tout comme les juifs refusèrent l’intention divine. Ces corps-langage, ces vivants-parlant ne sont pas près pour basculer d’une unité de monde selon la détermination et le contenu de l’intentionnalité, qui peut aisément être inscrite comme corps et perception,  vers une unité structurelle et une indétermination de l’existence, qui doit se réfléchir et se signifier en plus de toute finalité mondaine, naturelle, et évidemment créer son réseau ; non seulement sa structure en propre, de chaque arc de conscience, mais son réseau entre tous un par un.

Sans structure individuée pas de réseau, aussi le réseau est second ; mais une fois la structure acquise, elle doit se retrouver dans un réseau qui l’augmente, l’accélère et la maintienne et la suppose.

Le christique veut absolument inscrire le sujet en et par lui-même ; du champ ouvert au-devant et tenu par un regard régulièrement autre, raison pour laquelle aucune église ne peut cerner le réel de la structure et que celle-ci essaimera en ensembles différents et sujets divergents ; la forme « christique » est à ce point formelle qu’elle requiert de plus fortes interprétations et étant la structure même elle ne s’usera pas facilement… et ce qui se renouvellera c’est non seulement l’ensemble de tous les contenus qu’elle rend possible, mais les plis et replis de la structure comme telle ; Descartes est un tel pli nouveau et autre, situé sur l’étendue du monde, Kant bâtit selon l’interne et Hegel déploie la perspective ouverte sur toute l’historicité … de même que Sartre augmentera vers le donné, les autres, l’histoire, tandis que Lacan repliera vers l’interne du moi-sujet et les deux ensemble régularisent l’extériorité et l’intériorité (par quoi l’on est infiniment ou intimement ou extimement proche du dévoilement) ; l’ensemble du mouvement de prospection, d’analyse, explorant la dimension même du réel tel qu’il agit, à partir du christique (qu’il soit révélation ou exploration) dans son activité et même dans son activisme.

Et il est clair que beaucoup instancieront cet activisme, Rimbaud, Nietzsche, les créateurs, les artistes, les esthétiques mais aussi les politiques et éthiques et idéels et poétiques, ceux  qui n’analysent pas mais créent l’activité forcenée du sujet ; ils donnent à voir du point extrême de sujet dans le réel, tel qu’il regarde et éprouve les réalités et le réel lui-même (un arc de conscience s’inclut lui-même dans sa recherche, son enquête). Le sujet, comme tel peut se dupliquer, à chaque fois il est autre, mais le sujet-même est hors champ.

Jusqu’alors il devenait sous des mondes, des représentations, des groupes des langages ; mais les grecs vont créer un langage en plus (de celui du groupe) qui permet de développer la pensée, cad le repérage des réalités sous des idées ; des idées sont des intentionnalisations qui débutent par et dans l’activité d’un regard, d’un sujet ; de même le christique sera l’initialisation du regard qui crée « chacun » comme infini, comme existant en tant qu’intentionnel, et ce que l’on a nommé « moralisation » du christianisme est en fait la saisie par soi-même d’une stratégie qui permet à chacun de devenir sous-ses-propres-yeux. Vous êtes responsable de l’intention qui vous anime, qui vous attire, qui vous guide, qui vous conduit, vous oriente.

On reviendra sur l’étrangeté absolue d’une structure qui s’oriente bien que non déterminée… Comme de faire un saut périlleux suspendu dans le vide ; sans point d’appui c’est impossible, c’est pourtant ce que se passe.

Si vous abandonnez cette capacité vous délaissez tout. Mais vous ne pourrez pas vous démettre ; à moins de cesser d’exister. Donc vous remplacerez telle intention par telle autre, qui sera sans doute encore plus difficile, sous couvert d’une plus grande liberté. Si vous choisissez le mal plutôt que le bien, c’est considérablement plus insupportable que le bien répudié.

Si le réel est une structure, passe soudainement au-devant ; elle passe outre le groupe humain et se signifie comme réel dans les réalités ; grecque ou christique (ou monothéiste originellement). Dont on a vu qu’aucune réalité ne peut prétendre toutes les rassembler ; la réalité c’est forcément les réalités, parce que la détermination détermine, partout, constamment et sans doute infiniment (dans cet univers ou selon d’autres).

Rappelons que l’infini n’est pas le terme mais le moyen ; la réalité est infinie (de même que le néant) et c’est ce qui se passe dans cette réalité, par ailleurs infinie, qui est intéressant… Le réel est plus grand que lui-même ; le réel est une machine infinie qui crée des infinis, en lui-même ; c’est sa finalité, son but. Le pli infini crée une infinité au-dedans et probablement cette infinité dans l’infini est elle-même encore pliée selon une logique, une Possibilité que nous ignorons ; le mouvement ne peut pas cesser. Ceci suivant donc le principe très simple que le réel est un mouvement et qu’il ne cesse pas comme mouvement ; penser ou imaginer le contraire est incohérent. De plus seul ce qui est mouvementé, pour ainsi dire, est susceptible d’exister (ce qui seulement « est » est limité et s’effondre de par son propre poids).

Et donc. Pour ceux qui croient encore qu’il s’est réalisé une plus grande performance entre le christique et maintenant, et qui croient par ex que la science ou la révolution ou Freud, ou qui ou quoi que ce soit, insiste plus profondément que le christique, on dira que l’on n’a rencontré absolument rien, aucune pensée, aucune éthique ou politique ou manifestation ou mise en forme systématique ou non qui soit équivalente au dit christique.

Nommer le christique et non le christianisme, implique que l’on considère le dit surgissement comme plus grand que les églises ou les théologies ou les idéologies qui suivirent le moment initiateur. Et il n’est pas initiatique, le dit mouvement, parce qu’il n’introduit à aucun autre plan que celui de l’historicité la plus circonstanciée et le plus précise qui soit.  

Puisque de fait le christique est radicalement le concret lui-même ; il n’exhausse pas la réalité, il nait de, dans et par la réalité la plus concrète ou la plus douloureuse ; explicitement qu’il s’agisse du corps, de chacun, du vécu, spécifiquement de la naissance à la mort, comme de juste, ou de votre intention, et de votre capacité de traitement, dirait-on, de la réalité et comment vous lui répondrez.

La vérité est qu’il est strictement clair et net. Il définit strictement ce qu’est votre être, à savoir un mouvement et donc qui ne peut pas être fixé, sauf par dieu qui est le mouvement absolu. Il vous sera donc demandé de ne vous confier qu’au pur rapport, lequel ne cesse jamais (sinon il n’existerait plus) et cela revient à analyser notre être comme intentionnalité ; c’est ce à quoi l’on a aboutit depuis au moins Hegel et soutenant même que la suspension cartésienne n’est rien d‘autre que l’examen du mouvement initial (lequel n’est compris et ne comprend en vérité que dieu, cad l’infini mouvement).

C’est, en conséquence de quoi, toutes les autres attitudes qui sont des fixités en comparaison ; ce qui se prend comme, partie du monde (matière ou énergie, économie ou inconscient, cognitivisme ou rationalisme) ne se prolonge pas vraiment et s’emberlificote dans une partie du monde, qui souvent n’obtient sa monté en épingle que de sa nouveauté toute relative (le vivant, l’inconscient, les performances économiques, le non sens, la multiplicité, etc)

L’inverse est donc le sempiternel. A savoir que l’on connait la réponse depuis le début et que l’on ne la saisit pas. Parce qu’elle ne peut pas être saisie, mais que l’on en est, sera, fut déjà saisi. C’est absolument le message (sous le message) du christique ; et de toutes les traditions en vérité, chacun peut, absolument parlant, choisir son mouvement ; comme il n’est pas « du monde » il peut se manifester ou s’exprimer et s’expérimenter diversement, ou plus exactement pluriellement, à voir si cette pluralité possède une systématique, quelque part, ou si il s’agit strictement d’invention, d’invention du chemin lui-même ; ce qui ne serait pas surprenant à vrai dire, puisque le mouvement est la création elle-même … le réel crée.

De même que le christ est ce par qui la création apparait. Soit on considère que le christ crée effectivement, soit on prend l’interprétation selon laquelle le christique indique qu’il existe un regard qui crée par sa vision seule ; c’est pour cela qu’il faut rendre à césar ce qui lui appartient et à dieu ce qui est à dieu ; c’est parce que le travail christique se situe à un autre niveau ; ce qu’il lance sera toujours antérieur, et de même la révolution ou la liberté du sujet (Sartre pense antérieurement les possibilités de chacun).

La vérité, la logique interne est donc celle-ci ; il faut pré-penser les intentions que l’on aura. Il n’y a pas de dogme préétabli, mais la capacité et celle-ci doit se-prendre-en-copte. On indique par là que l’on ne peut pas se considérer comme « naturel » ou « donné », mais qu’il faut se-vouloir et que ça ne se réalise pas sans se-réfléchir (le christique est le miroir qui ouvre la grande réflexion globale et spécifique). Il faut se penser-en-avant, ce qui veut dire bien avant la pensée grecque, avant le conscient, avant la décision, et cependant sans que ce soit un corpus strict et défini ; d’om l’insistance sur l’amour, l’élévation, la charité et sans que l’on sache de quoi il s’agit vraiment. Puisque ce qui doit être exécuter c’est l’arc de conscience que l’on a et qui n’est pas du monde, du vécu ou du corps. Donc il faut chercher plus loin, plus en avant ; selon une typologie inattendue, inouïe, inaccessible, non par manque et obstacle mais parce qu’elle est l’accès lui-même ; c’est déjà là mais on ne sait pas « où », parce que ça n’est pas, ne sera jamais de l’ordre du « où ».

Et donc ça inquiète et ça inquiète d’une manière incompréhensible ; on ne peut pas coller à plat l’interrogation, c’est impossible ; il faut déplier quelque réel insituable ; et cela se comprend, a priori et tout théoriquement, abstraitement, en tant que le réel est un pli et qu’à la fois ce pli est inaccessible avec les moyens du monde et puisqu’il est un pli, cependant, il se communique à lui-même étant une articulation. Parce qu’il est une articulation et bien qu’impossible, il est exactement là.

Introduire à la forme de toute réalité, en quoi consiste le réel, c’est poser la « question », si l’on peut dire, du Fait du réel, « il y a quelque chose, plutôt que rien ». À quoi on répond, d’abord qu’il y a « rien » (qui n’oppose rien du tout à quoi que ce soit) et que donc le Possible est le principe. Et si le possible est le principe du réel, alors le réel est mouvement ; la possibilité indéfiniment ouverte.   

Et donc le christique est la mise en route du réel ; lequel n’existe, pour nous, nulle part ailleurs que dans l’attention, la capacité intentionnelle, celle là même qu’il faut convaincre, mais surtout qui doit se convaincre … elle, qui est une, doit non pas devenir double mais se supposer double ; se supposer comme christ ou comme sujet cartésien ou kantien ou citoyen ou héros de roman, de récit ; cette supposition est tout. Tout ce qui suivra, dans le vécu, se tirera du présupposé accédé.  L’adolescent se précipite de combler cette présupposition, il se prend pour Rimbaud ou Nietzsche.

La présupposition se nommait pour les grecs « vérité » ; on ne décide pas de la vérité, pareillement on se tient extérieurement d’une figure, cad  d’une intention située au dehors, qui tient lieu d’objectivité et pour atteindre à la volonté du sujet (en clair à son intentionnalité) il fallait un sujet. Et si l’on peut mentir à quiconque, à ce sujet là c’est impossible, puisqu’il est l’intention même en ceci qu’il vous renvoie non pas à une quelconque réponse mais à la si difficilement intention qui est la vôtre ; de même que le christique n’anéantit nullement le corps, de même il n’impose pas une moralité, mais l’inquiétude de l’indéfinition de ce qu’est l’intention d’exister.  

Plus généralement la mise en place christique s’étend absolument à toutes les possibilités qu’atteint l’intentionnalité et ce pour une raison à la fois simple et complètement aberrante ; le christique ne définit pas, il montre, il expose, il suppose notre être comme une structure et un mouvement ; il fait-voir un être réel, une structure effectivement active qui ne consiste en aucun mot, aucune idée, aucune image, aucune représentation, aucun discours (et donc outrepasse les discours grecs, comme les mythologies habituelles), et donc il renvoie instantanément à votre conscience intentionnelle. C’est ce qu’il impose partout, toujours, constamment et quelle que soit le moment historique. Ce qui arrive dans la réalité, le monde, le vécu et toute société humaine c’est la structure nue et formelle de l’arc de conscience. Et c’est parce qu’il se manifeste comme sujet qu’il appelle chaque sujet comme réel.

Autrement dit le dispositif n’est pas sans cause ; il a pour effet cela même qu’il instancie, qu’il expose ; et ce qu’il expose n’est pas une formulation hasardeuse ou arbitraire ou subjective ou accidentelle ou de facticité ou simplement une disposition, une congruence facticielle, une « secte ayant réussi » (ce qui est le comble de l’absurdité et l’incompréhension, anti rationnel au possible sous ses airs de naturalisme). Mais c’est la structure même tout à fait réelle qui soudainement apparait et apparait toute entière ; de là l’ampleur que cette disposition prit. Si l’universel n’était qu’un contenu rien n’expliquerait sa performance. Ce qui est mis en jeu aussi bien chez les grecs que dans le christique c’est l’arc de conscience non plus comme contenu de l’intentionnel mais comme structure intentionnelle et donc s’élabore les paramètres de cette structure.  

On ne s’étonne jamais suffisamment de la disposition générale de toute cette scène ; qu’elle soit mise en scène ou révélée est quasiment le même ; comment, si elle est inventée, a-t-on pu créer, instancier l’ensemble de toute cette monstration ? Qui a écrit « cela » ? Qu’est-ce qui s’est passé pour que mentalement, idéellement, psychiquement, métaphysiquement et ontologiquement une telle extrapolation structurelle s’impose comme fondatrice de 20 siècles ? Que l’on considère l’événement comme une détermination, cela revient à la situer parmi d’autres ; parce que si l’on n’affecte pas une unité ontologique à une détermination, la série entière des déterminations s’impose et noie le poisson.

L’ontologie (le métaphysique selon l’ancien discours avant Descartes) s’utilise afin de passer par-dessus la détermination, les contenus enfilés incontinents, et de créer une organisation qui puisse se juger selon le réel ; c’est la finalité, superposer le réel aux réalités (qui cesse d’être signifiée en tant que « la réalité » comme si il était possible qu’existe une réalité les réunissant toutes, si il y a une unité, elle est autre). L’ontologique permet une gradation, et la gradation entraine l’articulation, laquelle articulation est le réel même (dont on a dit qu’il s’offrait pour nous en tant que présent, ce qui est, littéralement, une articulation, formelle, non situable étant ce par quoi tout est placé).

On voit par ceci que c’est de fait le réel même, en tant qu’il se meut, qui est analysé via ce moyen qu’est la « pensée », cad la dénivellation ou la remontée des intentionnalisations, de l’intentionnalité même, qui est faite pour cela, bien qu’elle s’imagine qu’elle se figure, se représente un contenu ; c’est ce qui trouble intensément à partir de Descartes ; on ne comprend pas tout de suite qu’ici même en et par chaque sujet le réel se juge et ré-articule le présent, cette structure. Aussi faut-il purifier, élaguer, abandonner ses illusions et non plus seulement se convertir à la pensée universelle (alors même que les grecs avaient parfaitement saisi qu’il s’agissait d’une ascèse.

Mais de par Descartes il ne s’agit plus seulement de basculer de son moi vers l’universel et le non intéressement, mais de remonter plus en amont et d’une décision existentielle ; et ce jusque Sartre qui éprouve quand même une difficulté à positionner la conscience comme sujet ; il ne veut pas tomber dans ce qu’il juge être un piège, un miroir idéaliste ou universaliste, l’idée de l’homme. Et il a raison de son point de vue, parce qu’insister sur le point qu’existe le sujet, c’est rencontrer la structure comme réelle et ne dépendant pas de son existence … Si il y a un sujet, alors ce sujet a une consistance qu’il faut définir et Sartre veut garder la structure sans rien (elle est « rien », le moi ou le monde apparaissent dans le champ, le « sujet » est toujours une représentation, toujours sous condition, en somme Sartre impose le nouménal comme actif mais vide). On insiste ici au contraire sur la forme strictement individuée de l’acte de conscience, qui est un arc, ce qui veut dire non seulement un arc et non pas un cercle (ça ne forme pas une « pensée » mais des intentionnalisations, plus ou moins organisées) mais aussi un arc de la cervelle vers le donné (du monde) qui re-vient vers le corps.

Et chacun n’a qu’un seul et unique corps et tout corps est absolument individué dès l’abord en tant que vivant et surindividué en tant qu’arc de conscience créant une autre-surface du corps recevant les signes) ; un champ intentionnel, de type sartrien, ça n’existe pas ; ça peut être pensé et instruit (par les sujets, Flaubert par ex, ou par un philosophe ou un psychanalyste) mais ça existe comme naissance et mort et comme existence. Nous nommons existence cet effet total dans le monde qui se tient d’un arc de conscience, qui ex-siste. Si l’acquisition, qu’il y a un corps et un sujet tenant, est supprimé (dans un dieu-total par ex, dans un absolu de « surconscience »), cela aboutirait à supprimer l’acquisition elle-même ; ce qui est absurde. Et donc le christique est la seule perspective ouverte qui maintienne, d’une magistrale pirouette complètement insensée, qu’il y a individualité et que tout est effectivement réalisé à cette fin.  

Le christique qui est l’initialisation du réel dans la réalité (comme les grecs mais encore plus formellement), lance officiellement la possibilité indéfinie du retournement de tout champ de perception. Et il initie ce par quoi ce champ débute ; le corps. Le retournement du champ est un mystère intégral. Et ne s’explicite, et s’explique vaguement, par l’arc de conscience comme intentionnalisation (du corps, du vécu, du donné, du monde).

Présentons la même chose autrement. C’est la capacité de passer outre le langage. Le langage durant les mondes particuliers constituait l’horizon réel ; dieu, les grecs, le christique et le sujet se créent par et via le dépassement du langage. Lorsque la vérité quitte le groupe et s’installe dans le monde, l’intention, le corps individuel ou le réel. Le langage est fabriqué, créé par et dans cette mise en forme culturelle, cette invention de la culture que furent les groupes humains, mais ensuite chaque conscience s’autonomise et passe outre, outrepasse le commun. Aussi ceux qui vont commencer de créer passeront au-delà du groupe (récupérant l’intention de dieu, le donné du monde et l’universel, le corps et le sujet et enfin le réel et l’existence ; toutes perspectives qui existent en plus du groupe et du langage. De là évidemment que ce furent par ex des révolutionnaires ou des artistes ; ils perçoivent l’historicité (et non l’immédiateté du groupe) et le donné-monde (la perception, esthétique) et le récit (le poétique et le récit), etc.

Cette perception-en-plus est très exactement l’acculturation qui s’ajoute à la mise en forme culturelle (qui occupait les groupes humains dans chacun des mondes particuliers séparés). L’acculturation est à disposition des individus qui seuls perçoivent en plus ; regardent dans le monde ou regardent le regard christique (qui le leur rend bien, puisqu’il crée leur âme actuelle, celle qui vaut tout). Percevoir par au-delà du langage joue à plein non seulement selon l’acculturation, mais bien sur selon l’individualité ; qui doit faire-avec son corps … sans le groupe et la parole… individu qui doit se tenir seul face-à, et réclame ainsi son éthique absolue, c’est-à-dire formelle. C’est ce qui se cherche, de Descartes à Lacan (tandis qu’auparavant le « sujet », ce dispositif structurel, ne se signifiait pas encore individuellement).  

Il est clair que cette éthique est profondément ontologique et non simplement une disposition morale. Et le christique est originellement le regard situé hors de tout, structurellement c’est par lui que cela arrive. C’est à ce niveau que cela se joue. Le surdivin, le dieu en plus du divin.

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