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instants philosophie

Descartes, petites vérités et la Grande

28 Août 2011, 12:18pm

Publié par zwardoz

Croire que la philosophie va nous délivrer un contenu tout fait, ou une connaissance nécessaire d’un système ordonné, c’est ne pas lire ce qui se révèle par en-dessous. La philosophie sert à indiquer de où ça vient et par où ça s’en va. C’est un axe perché, penché sur le monde, sur le vécu, sur le donné, sur le là, mais qui varie son angle, et les variations ont probablement un sens de lecture.

Le choc cartésien consiste à passer outre, même l’utilisant, le système de discours précédent. Il n’est plus la construction d’un corpus de vérité ; de sorte que l’on peut difficilement dénommer idéaliste la visée cartésienne. Et la preuve en est en ce qui suit Descartes ; Leibniz ou Spinoza ne pensent pas l’idée et les idées mais tentent en ce qu’il existe un monde, une étendue et un possible réel, d’appliquer la pensée systématique. Ce qui est tout différent que de penser le monde en une essence ou une série d’essences idéelles. Que le possible caractérise le monde comme peut-être contingence radicale, ou comme étendue pleine et sans faille, c’est faire référence à la densité du monde là.

Or là même où l’on utilise encore la pensée abstraite pour acquérir le dit donné extérieur, il s’y importe une déflagration d’espace et puis viendra le temps. Ce qui veut dire que les idées ne régulent plus en elles-mêmes, mais en un monde. La belle ordonnance pensable des idées issues du monde unique était elle-même en perfection de l’universel ; ce n’est plus le cas.

L’extension du monde, prévu comme calculs et matières et poids et mesures, est parallèle au déploiement du pensable lui-même ; le pensable n’est plus la pensée, (système supposé fixe qui ramasse les immédiatetés dans leurs essences respectives aristotéliciennes ou système qui tente de déduire le vrai du vrai platonicien) mais la pensabilité ; les idées sont posées là devant comme le monde est constitué d’objets et de circonscriptions. De même Hegel disposera des systèmes d’idées en une architecture au-delà du pensable, arguant d’une pensabilité opératoire productrice elle-même des systèmes d’idées.

Ce qui se met en place, ça n’est pas tant un idéalisme qu’un « structuralisme philosophique » (dont les contenus ne sont pas ici des parties du monde, des parties de signes, des contenus, mais des formes géométriques, topologiques de la position des sujets dans un réel, vis-à-vis d’un monde, d’un donné, d’un vécu). Il est donc éhonté de ne pas accorder que Descartes aborde le réel même.

C’est du reste ce que ciblait l’être philosophique, et bien qu’ensuite il ait pu s’interpréter comme double du monde, comme abstraction hors-monde. Ce qui en soi est déjà absolument faux ; les idées platoniciennes indiquent essentiellement qu’il est une procession de l’universelle idée de par elle-même et qu’il vaut mieux suivre le plan strict de la déduction, construction, que le désordre du monde donné, et que cette procession éclaire le dit monde donné par le dedans ; l’idée est au-dedans du monde, et seule le rend pensable ; ce que même les sophistes utilisent, l’idée, sauf qu’ils ne lui rendent pas sa suprématie et que ce faisant ils brisent le dit monde en fragments et nous le rendent inabordable.

C’est qu’en cet esprit là on voudrait rendre concrète la compréhension du vécu, du monde et du donné ; et l’on taxe l’idée d’irréalité. Mais tenir l’idée comme réelle, c’est uniquement et essentiellement poursuivre le concret du monde dans toutes sa/ses conséquences. Et hors cela, de désirer le concret, on tient telle ou telle partie pour le vrai (bien solide) alors que les idées tiennent, seules, la vérité et l’entrainement de toutes les déterminations (sans partialité) en une seule reculée visée. Tenir la vérité, cad les idées, c’est admettre possiblement toutes les parties et non en élire quelques unes qui feront office de solidités. Lesquelles solidités ne sont pas, ou sont des illusions ou des prétextes à une tendance cachée qui nous imprègne par devers nous, tandis que la vérité affirme le joug certain d’un non aboutissement radical … est une non illusion, et le refus des prétextes comme des faire semblants.

Autrement dit tous les mouvements qui se sacrifient pas à la vérité (cad à l’idée ou à « la plus grande intention possible » pensée comme régulation impossible mais certaine) héritent peut-être de l’une ou l’autre des parties du monde, du donné ou du vécu, mais non pas du monde-même, du vécu réel ou du donné en ampleur. Cette barre, ce joug qui rend à jamais impossible la satisfaction est la satisfaction même, ou si l’on veut le contentement cartésien. Contentement synonyme de réjouissance. Ré-jouissance non d’agir simplement vers un objet qui sera chose jouissante (ce qui est une absurdité et un fantasme imaginé), mais de se savoir agissant et de régler l’agissement à sa seule mesure qui soit ; de le savoir.

Le savoir du savoir, qui parait tautologique, ne l’est pas. Dans le retournement, il s’extrait ce qui pose la pure question épistémologique ; quelle est la mesure de ce qui mesure ? Quelle est la loi de « la pensée qui se sait », et qui sait qu’elle est de ce fait, étant entendu que tout le reste est annulé ?

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